25 Novembre 2023
(NOUVELLE) HISTOIRE DES PEUPLES INDO-EUROPÉENS
Essai de synthèse linguistique, génétique et historique
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Proposition chronologique de la théorie hybride
LES PREMIERS HAPLOGROUPES Y
Il y a plus de 125 000 ans, des tribus d'homo sapiens membres des haplogroupes primordiaux quittent l'Afrique pour entreprendre le passage vers l'Orient depuis la corne somalienne et la mer Rouge, à travers l'Arabie. Des variations génétiques apparaissent.
Le mouvement initial entrepris par les premiers migrants se poursuit en longeant les côtes yéménites puis perses. Les Sapiens arrivent dans le sous-continent indien au plus tôt vers -70 000 ans et suivent les fleuves de la vallée gangétique.
Vers -60 000, des tribus porteuses de l'haplogroupe Y-F s'installent dans le Pamir et au Cachemire. Cet haplogroupe va se diffuser depuis l'Inde du nord, jusqu'en Mésopotamie et autour du Caucase. Cette vague migratoire ne suis pas le mouvement habituel d'ouest vers l'est mais l'inverse.
De -60 000 à -40 000, de l'haplogroupe Y-F, sortiront d'abord les couples Y-GH (Caucase-Himalaya) et Y-IJ (Caucase-Europe) puis Y-K (Eurasie, Sibérie ou Indochine-Pacifique). Les tribus porteuses de l'haplogroupe Y-G prennent un chemin nordique et s'implantent durablement en Asie occidentale et en Europe. Ce sont les lointains ancêtres des habitants du Caucase et de l'Europe centrale et orientale. L'haplogroupe Y-J sera quant à lui majoritaire chez les Sémites et minoritaires chez les Méditerranéens et Dravidiens.
Vers -50 000 ans, l'haplogroupe Y-K apparaît donc entre l'Inde et la péninsule de Siam. De -50 000 à -40 000 (donc relativement rapidement), apparaissent deux haplogroupes : Y-K2a et Y-K2b. Vers -30 000, émerge de Y-K2a l'haplogroupe Y-O, associé aux ethnies chinoises, japonaises et indochinoises.
Les membres de Y-K2a continuent de migrer, en prenant la direction du nord. Ils suivent les rives des mers de Chine, de Corée et du Japon, puis se scindent. Une branche occidentale suit le cercle arctique vers l'Oural. Ce sont les ancêtres des Finno-Ouraliques (Samis, Samoyèdes, Hongrois, haplogroupe Y-N). Une fois la glaciation terminée (vers -10 000), ils s’installeront en Scandinavie et au nord de la Russie.
Vers -35 000 ans, apparaît en Asie du sud-est l'haplogroupe Y-K2b2, aussi nommé Y-P, et marqueur de groupes ethniques qui prirent la direction du nord de l'Asie. Les plaines chinoises déjà peuplées, les tribus Y-P continuent leur voyage vers la Sibérie.
Les membres de l'haplogroupe Y-P sont locuteurs d'une sorte d'eurasien ; une langue qui serait l'ancêtre des groupes linguistiques altaïques (turc, mongol) et indo-européens. Cet haplogroupe est aussi présent en Polynésie et pourrait expliquer les similitudes mythologiques entre les zones pacifiques, chinoises et centrale-asiatiques.
Vers -30 000 ans, aux alentours de la Mongolie actuelle, l'haplogroupe Y-P se sépare en deux sous-groupes : les haplogroupes Y-R et Y-Q.
L'haplogroupe Y-Q correspondrait aux ethnies proto-altaïques, qui continueront leur migration vers le nord pour suivre ensuite deux mouvements : l'un par la Béringie vers l'Amérique, l'autre vers les montagnes de l’Altaï, puis l'Oural. Ce sont les lointains ancêtres des Turcs, des Mongols, des Tatares et des Amérindiens. Leur langue devait être le proto-altaïque, dont les langues turco-mongoles (et possiblement le japonais et le coréen) sont les héritières. Ce sont les Touraniens mentionnés dans l'Avesta. La religion primordiale de ces tribus deviendra le tengrisme, qui peut s'envisager comme une forme de shivaïsme archaïque et chamanique.
Une dizaine de millénaires plus tard, peut-être moins, l'haplogroupe frère Y-R devient indépendant. Ces deux haplogroupes, associés à leur cousin Y-N de quelques millénaires plus ancien, vont peupler l’Eurasie du sud avant la fonte des glaces, puis les régions arctiques, ouraliennes et altaïques dès la fin du pic glaciaire (après -20 000 ans). Naissent dans ce creuset sibérien les substrats linguistiques proto-indo-européen, turco-mongol, finno-ougrien mais aussi proto-coréen et proto-japonais.
L’Amérique aussi sera colonisée : les haplogroupes Y-Q et Y-R peupleront la fin du Paléolithique américain, se métissant aux populations de l'haplogroupe Y-C déjà présentes depuis une dizaine de millénaires. C'est ainsi que les Mayas sont porteurs majoritairement de l'haplogroupe Y-Q et minoritairement de l'haplogroupe Y-C, tandis que les Sioux sont principalement porteurs de l'haplogroupe Y-R et les Incas du Y-Q. De telles mouvements migratoires et une telle généalogie génétique expliquent pourquoi les coutumes et les mythes eurasiens se retrouvent présents de l'autre coté du détroit de Béring et jusqu'en bas de la Cordillère des Andes, alors même qu'une relation directe entre civilisations sibérienne et américaine ne peut pas être possible après la fonte des glaces et la hausse du niveau des mers.
Les premiers occupants Sapiens des régions nordiques (haplogroupe Y-C, Y-D) sont contraints de s'effacer devant ces mouvements démographiques post-glaciaires. Ils vont donc occuper les espaces les moins hospitaliers, tout juste libérés du dégel et de la fonte de la calotte continentales, situés au long du cercle polaire, de l'Islande jusqu'au nord du Canada (Eskimos-Inuits).
LES PROTO-INDO-EUROPÉENS
Vers -20 000, l'avancée de la calotte glaciaire a atteint son maximum. Le climat est plus rigoureux que jamais au nord de l'Eurasie. Les groupes porteurs de l'haplogroupe Y-R entreprennent une migration vers le sud et s'établissent au nord du sous-continent indien.
Une scission s'effectue très vite : Y-R1 continue à migrer vers l'ouest pour rejoindre les rives de la mer Caspienne (v. -10 000), tandis que Y-R2 (apparut vers -25 000 en Asie centrale) s'établit dans le Pamir (v. -12 700) et dans la péninsule indienne (v. -10 000).
Le groupe porteur de l'haplogroupe Y-R1 est concentré entre les rives orientales de la mer Caspienne et les montagnes de l’Altaï. La Caspienne, la mer d'Azov et le lac Baïkal sont alors deux fois plus grands qu'aujourd'hui. Les rivages de la Caspienne ne sont qu'à quelques centaines de kilomètres des sommets de l'Oural. Leurs bassins sont alimentés par les eaux du dégel des glaciers himalayens (Pamir et Kunlun), caucasiens et ouraliens. Aujourd'hui désertique et ensablé, Le Karakoram est alors une plaine verdoyante. Il en va de même pour la vallée du Tarim.
Ces vastes espaces qui comprennent des mers intérieures font de l'Asie centrale une terre propice à la chasse, à la pêche, mais aussi aux échanges (troc de pierres taillées ou brutes, ainsi que de petits objets manufacturés en os et en coquillage).
Cependant, à la fin de l'ère glaciaire, les voyages pour suivre les bêtes (dont le mammouth) sont de plus en plus longs et de plus en plus périlleux. En conséquence, il devient très difficile d'entretenir des communications et des échanges entre tribus. Les rares communautés sont plus isolées que jamais, ce qui favorise l'éclosion rapide de nouveau haplogroupes. En quelques millénaires seulement (entre -25 000 à -19 000), les haplogroupes Y-R1a (originaire de la steppe caspienne) et Y-R1b (originaire du sud de l'Oural) se distinguent.
À la fin du Paléolithique, les membres de l'haplogroupe Y-R1a sont établis depuis les rives orientales de la Caspienne jusqu'en Sibérie. Les steppes sont leur écosystème. Ce sont des chasseurs nomades et leur religion est le chamanisme. Ils sont locuteurs du proto-aryen (dont seront originaires les langues indo-iraniennes, dardiques et balto-slaves).
À la fin de la dernière glaciation, des membres de l'haplogroupe Y-R1b sont établis, mais en petit nombre, depuis les rives occidentales de la Caspienne jusqu'au sud de l'Europe (dans l'aire Égée et vers -12 000, au nord de l'Italie).
Vers -8500, les Proto-Européens sont en Anatolie. Le proto-arménien est alors un dialecte du proto-européen. Un peuple proto-arménien s'installe sur le versant sud du Caucase.
L'haplogroupe Y-R1b va alors se diversifier : on retrouve sa dans les codes génétiques mésopotamiens, anatoliens mais aussi africains.
Une sous-classe de Y-R1b (Y-R1b1a2 ou R-V88) migre en effet vers l’Égypte puis remonte le Nil pour s'établir autour du Soudan et du Tchad actuel. Vers -7000, ils sont en Syrie, puis vers -6000 passent en Égypte et demeurent dans le Sahara de longs siècles. Le Sahara est alors une savane riche en gibier. La présence de l'haplogroupe Y-R1b en Égypte pourrait en outre expliquer les nombreuses similitudes entre mythologies égyptienne et védique, mais aussi la présence linguistique de l'indo-européen dans l'égyptien le plus archaïque. La présence constante de la culture indo-aryenne dans la civilisation égyptienne, tant au niveau de la mythologie que de la langue demeure en effet un mystère, sauf si l'on considère une présence « indo-européenne » proto-historique en Égypte, qui prédaterait de plusieurs millénaires les premiers pharaons.
Quelques théories de généalogie linguistique
L'épisode glaciaire terminé, le climat se réchauffe. Les grands mammifères (dont le mammouth) ne sont plus adaptés à leur nouvel écosystème et disparaissent rapidement. La chasse au gros gibier se faisant plus difficile, c'est la chasse, puis la domestication du petit bétail qui la remplace. À un mouvement migratoire du nord vers le sud, qui a mené les Proto-Indo-Européens porteurs de l'haplotype Y-R1b vers l'Anatolie, la Mésopotamie et l'Afrique, succède un mouvement inverse vers l'Eurasie.
La néolithisation du Proche et du Moyen-Orient a entraîné un boum démographique qui ne peut qu'encourager le départ de communautés vers le nord. Après -7000, des Anatoliens, parfois porteurs de l'haplogroupe Y-R1b, entrent en Europe par le Bosphore ou la Steppe pontique. Des populations porteuses de l'haplogroupe Y-R1b s'installent dans une Europe encore peuplée majoritairement par les porteurs des haplogroupes Y-G (géorgien-caucasien), Y-E (Ibéro-Berbère) et Y-I (autochtone est-nordique). Elles introduisent l'agriculture jusqu'au rivage de la mer du Nord.
Il ne s'agit cependant pas d'une colonisation humaine, mais plutôt d'une libre diffusion d'un modèle économique séduisant. La maîtrise des chariots, de la roue et de l'équitation, facilitent les déplacements à travers l'Eurasie. Grâce au chariot tiré par des bœufs, les familles se déplacent en emportant leurs animaux et leurs biens. La domestication du cheval semble trouver son origine vers -6000 aux alentours de l’actuelle Ljubljana (Europe centrale, Slovénie). D'autres foyers de domestication du cheval se trouvent par ailleurs dans les hautes plaines caspiennes (v. -4600).
Vers -6300, dans les steppes sibériennes et aux alentours des montagnes de l'Oural et de l’Altaï, débute la civilisation des kourganes, du nom local que l'on donne aux tumulus et autres chambres funéraires recouvertes de pierres et de terre (pouvant mesurer jusqu'à 200 mètres de diamètre).
Cette culture, qui peut être attribuée aux Indo-Européens porteurs de l'haplogroupe Y-R1a, perdurera jusqu'à l'époque scythe, soit plus de 5000 ans.
La coutume funéraire de l'ensevelissement des chefs se diffuse donc vers le sud-ouest. Très vite, elle est adoptée par les cultures steppiques porteuses de l'haplogroupe Y-R1b, comme celle de Sredny Stog, Samara et Yamna (héritière des premiers agriculteurs des rives de la mer Noire). On retrouve la coutume en Scandinavie, où les chefs étaient incinérés avec leur armes et parfois même avec leur bateau. L'armature de celui-ci servait alors de voûte au tumulus.
Les porteurs de l'haplogroupe Y-R1b se concentrent surtout dans la vallée de la Volga (Samara, -5200 à -4800) et dans celle du Dniepr (Sredny Stog, -4500 à -3500). Ces tribus agricoles installées dans les steppes et sur les rivages nord de la mer Noire fondent la culture de Yamna, très florissante de -3600 à -2300. Il s'agit des ancêtres des peuples Balkaniques proto-historiques (Thraces, Daces, Illyriens) et des Celto-Germains.
Dans ce vaste espace, qui s’étend depuis les Alpes jusqu'en Sibérie, se dessine une culture qui annonce les nombreuses civilisations qui en seront les héritières. Les offrandes de fruits et de viandes (gibiers, bovins, ovipares) sont accompagnés de sacrifices humains. Le cheval et la guerre (sous la forme de razzias de bétails) occupent une place importante. Outre l'agriculture et le pastoralisme, l’économie des steppes repose aussi sur l'artisanat (poterie) et plus tard sur la métallurgie (mines de l'Oural et du Caucase, exportations de pierres précieuses de Sintashta vers la Bactriane, production européenne à grand échelle de haches de combat, joaillerie scythe et gauloise, ...)
Ces peuplades adorent le feu et le Soleil, et leurs rituels nécessitent peu de moyens. À la manière des Aryens védiques d'Andronovo, ils gravent sur des menhirs des figures anthropomorphiques et pratiquent un polythéisme panthéiste.
Le réchauffement climatique qui marque la fin de l'ère glaciaire entraîne une lente mais irrémédiable désertification de la région. Vers -2000, se forment le désert du Tarim et du Karakoram. Mais bien avant, les ravages se font sentir. La mer caspienne a perdu beaucoup de sa surface et les mers environnantes ne sont plus que des lacs (Baïkal, Balkhach).
De -4800 à -3800, une variation de Y-R1a apparaît : Y-R1a1a1. Une communauté quitte les hauts plateaux iraniens et les bords de la Caspienne pour s'installer sur les versants occidentaux de l’Oural. Il s'agit des Proto-Balto-Slaves. Ils joueront un rôle capital dans les migrations de masse liées à la culture de la Céramique cordée en Europe (ils seront la cause du remplacement ethnique des membres originels Y-R1b par des nouveaux arrivants orientaux Y-R1a). Ils importeront en Europe leurs pratiques spirituelles proto-védiques et les transmettront aux porteurs de l'haplotype Y-R1b (Proto-Celto-Germains).
Détachés très tôt des autres peuples nomades des steppes d'Asie centrale pour s'installer sur les pourtours de la Baltique, les Lituaniens et les Lettons sont parmi les premiers Indo-Européens à s'implanter durablement en Europe. Contrairement aux Celtes et aux Germains, qui très vite se mélangèrent aux sociétés européennes autochtones, le modèle civilisationnel des Baltes ne fut que tardivement acculturé au modèle continental (germanique) ou méditerranéen (chrétien). Malgré plus de mille ans de suprématie catholique et presque un siècle de domination soviétique, la tradition ancestrale de la Baltique se perpétue même encore de nos jours sous la forme du néo-paganisme (mouvement Romuva).
Jadis occupant un espace immense allant des rives de la Baltique jusqu'à la ville actuelle de Moscou, et présents en Europe depuis le troisième millénaire avant notre ère, les Baltes subirent la pression germanique à l'ouest (Prussiens, Teutons) et slave à l'est (Ruthènes), pour ne plus occuper depuis le Moyen-âge qu'un petit territoire sur le littoral de la mer Baltique (Lettons, Lituaniens).
TOKHARIENS ET PERSES
Suite à la croissance démographique engendrée par le développement de l'agriculture et de l'économie minière dans la région steppique, un mouvement migratoire vers l'est amène des porteurs de Y-R1b vers la Sibérie orientale et méridionale. S'établit alors la culture d'Afanasievo (-3300 à -2400), d'où sont originaires les ancêtres des Yuezhis, des Tokhariens et des Kouchanes.
Durant tout le Néolithique, les porteurs de l'haplotype Y-R1a (Proto-Indo-Iraniens) qui vivaient au nord-est de la Caspienne se mêlent aux colons occidentaux (Y-R1b) de la culture d'Afanasievo, de sorte que les civilisations tokhariennes du Tarim sont porteuses des deux haplogroupes (avec même une majorité de Y-R1a dans les relevés génétiques effectués sur les momies du Tarim). Le Taklamakan et le désert de Gobi apparaissant vers -4000, ces groupes indo-européens proto-tokhariens détenteurs des haplogroupes Y-R1a et Y-R1b reprennent donc leur migration pour s’installer encore plus à l'est, dans les vallées du Gansu, du Qinkai (Chine) et sur le plateau de l'Ordos (en Mongolie intérieure, vallée septentrionale du fleuve jaune).
Ce n'est qu'à la fin de l'Antiquité que les Yuezhis et autres Tokhariens refluèrent massivement de Chine continentale (probablement chassés par les tribus chinoises hans), pour s'établir autour du Taklamakan, dans les oasis du Tarim (Kashgar, Turpan, Khotan), et plus tard en Perse et en Inde (dynastie kouchane).
Au nord de la Mésopotamie, des tribus proto-iraniennes se sédentarisent au sud de la Caspienne et sur les hauts plateaux iraniens. Ce sont les tribus mèdes, scythes, et parthes, qui montent en puissance ; tant au niveau militaire (chars de guerre) que démographique (migrations vers la Perse). Peu après l'an 1000 avant notre ère, les ethnies mèdes et perses se constituent en royaumes. D'abord soumis aux Assyriens, ils s'en libèrent puis dominent à leur tour la Mésopotamie et la Grande Perse.
Toutes ces tribus n'adoptent pas l'agriculture et la vie sédentaire. Comme en témoignent les auteurs antiques, une partie du peuple scythe est urbain et agricole, quand l'autre est nomade et chasseur-cueilleur. Quant aux Aryens indiens, ils sont encore nomades à leur entrée dans le sous-continent indien (v. -1500) tandis que les Aryens iraniens étaient déjà puissants dans la ville de Bactres, et sédentarisés depuis des millénaires.
Vers -1700, dans le Khorassan puis en Bactriane, le prédicateur Zarathoustra prêche un dieu inspiré du panthéon mésopotamien : Ahura-Mazda, « le Seigneur Juste ». Il est le Grand Ahura, c'est-à-dire le Grand Esprit créateur de la vie. S'oppose à lui son jumeau maudit : Ahriman, l'Esprit du Mal.
Le roi Garshasp accueille Zoroastre à sa cour, puis devient son disciple. C'est le premier âge d'or du Zoroastrisme, qui devient religion royale en Bactriane. Quelques mille années plus tard, il sera la religion principale de l'Empire achéménide (-550 à -329). À cette époque, le perse le plus archaïque (l'avestan) n'est cependant plus qu'une langue cérémonielle et liturgique. Encore un millénaire se passe et l'empire sassanide (224 à 651 apr. J.-C.) marque le renouveau de cette doctrine, en l'imposant de force dans tout l'Empire. Cependant, après l'islamisation de la Perse (v. 1000 apr. J.-C.), les partisans du mazdéisme-zoroastrisme subirent un génocide dans leur patrie et durent s’échapper vers l'Inde. Ce sont les Parsis.
LES ARYENS INDIENS
Vers -2100, dans la région steppique qui sépare l'actuel Kazakhstan de l'Ukraine et de la Russie, se développe la culture de Sintashta (-2100 à -1800), puis celle d'Andronovo (-2000 à -900).
Il s'agit d'un réseau de places fortes, en tous points semblables à des oppidums gaulois. Des villages fortifiés sont bâtis sur des promontoires et placés aux carrefours des routes les plus empruntées. Le site d'Arkhaïm et de Sintashta en sont emblématiques.
Au centre de ces cités circulaires se trouvait une sorte de cour de forme carrée, attribuée aux rituels et sacrifices. Ces formes circulaires périphériques, associées à une forme rectangulaire centrale, ne peuvent manquer de faire penser aux yantras védiques (dessins géométriques magiques).
À peine plus tardive, la culture d'Andronovo est un véritable Empire aryen. Des confins sibériens jusqu'en Perse, un peuple nomade et guerrier sillonne les steppes et rançonne certains villages. Le rapt de vaches est une sorte de passe-temps, mais aussi une manière de vivre.
Depuis les mines de l'Oural et de l’Altaï, les fabriques de Sintashta importent une matière première qui est ensuite travaillée puis exportée vers Bactres et les villes de Transoxiane et du Gandhara (v. -2000). La dérive migratoire des Aryens vers le sud-est était donc naturellement encouragée.
Certaines tribus des cultures de Sintashta et Andronovo vont effectivement migrer vers le sud, pour s’installer aux frontières des empires assyrien, babylonien (influençant la civilisation kassite), égyptien (Mittani), dans le Caucase (influençant les prémices de la civilisation hourrite), dans les montagnes de Zagros (zone probable d'origine de la tradition mazdéenne), et dans les montagnes himalayennes du Pamir puis de l'Hindu Kush.
Dans les centres de pèlerinage et les centres urbains de la culture d'Andronovo, se crée une caste de prêtres, qui sont les auteurs des hymnes sacrés du Rig-Véda.
La civilisation urbaine de l'Indus ayant disparue quelques siècles avant leur arrivée, les Aryens s'installent sans difficulté en Inde entre -1500 (haut plateau de l'Indus) et l'an -500 (vallée gangétique). Ils y dominèrent culturellement, socialement, religieusement et militairement les populations locales appartenant aux ethnies dravidiennes ou mundas. La cohabitation entre ces différentes ethnies renforça le système des castes indo-européennes (un tel système était alors partagé des cotes bretonnes à celles de l'océan Indien).
La patrie des Aryens indiens, le Brahmavarta (« pays de Brahma ») s'étendait alors de la région des sept rivières (sources de l'Indus), jusqu'à ce qui deviendra le Penjab. Plus tard, l'Aryavarta (« le pays des Aryens ») occupa toute la vallée du Gange jusqu'à la limite du monde antique, constitué par le delta partagé du Gange et du Brahmapoutre.
C'est en Aryavarta que sont situés certains des lieux les plus glorieux de la mythologie hindoue, telle Ayodhya, la première ville de l'humanité, capitale du mythique roi Rama, mais aussi les prairies de Vrindhavan, qui virent grandir Krishna, ainsi que les villes de Matura et Dwarka, depuis lesquelles régnait Balarama, le frère Krishna.
Unifié vers -1000 autour de la ville prospère de Taxila, stratégiquement située entre la Perse et l'Inde, sur les contreforts de l'Himalaya, le Gandhara s'étend du Baloutchistan à l’Afghanistan moderne. Depuis le Gandhara et la Bactriane, l'art gréco-bouddhique importe en Inde et en Chine l'art de la sculpture réaliste et raffinée. Pour la première fois, Bouddha trouve son visage et son iconographie et le tabou de la représentation divine est brisé.
Juste au nord du plateau du Deccan, encadrant le fleuve Narmada, les collines du Vindhya sont la frontière géographique historique entre l'Inde aryenne et l'Inde dravidienne.
L'île du Sri Lanka est pourtant conquise par un prince aryen, Vijaya, qui régna de -543 à -505. Il instaurera une dynastie qui perdurera plus de 600 ans.
LES EUROPÉENS
À la suite de l'expansion de la culture de Yamna en Europe balkanique (v. -2500 à -1500), se créent de nouveaux peuples, auxquels on peut associer des langues, qui émergent du proto-européen.
Nous distinguons à l'intérieur des langues européennes deux grandes familles : celle issue de la première vague de migrations intervenue au cours du troisième et du second millénaire avant J.-C. qui amena les Daces, les Thraces et les Hellènes, et celle, à peine plus tardive, issue de la seconde vague, et qui amena les Celtes puis les Germains.
Vers -2500, dans différentes vallées des Balkans, émergent les Proto-Daço-Thraces et les Proto-Illyriens. Après -2000, ces peuples sont établis dans la vallée du Danube et les Carpates (Daces), dans le Bosphore (les Thraces se séparent des Daces vers -1200) et sur le rivage Adriatique (Illyriens). Ces peuples forment un groupe linguistique hétérogène mais qui possèdent le point commun d'être dérivés d'un proto-européen qui prédate l'apparition du celto-germanique.
De -2000 à -500, d'autres tribus nomades porteuses de l'haplotype Y-R1b font le déplacement depuis les steppes orientales vers l'Europe. Il s’agit en particulier des Gètes (qui partageront le Danube avec les Daces) et des Cimmériens, dont le faciès culturel peut sembler similaire à celui des Thraces.
La puissance thraço-dace culmine avec le royaume des Odryses, fondé vers -400 par l'union de tribus daces et thraces, puis incorporé à l'Empire romain quelques siècles plus tard. Son territoire englobait l'actuelle Bulgarie (Thrace), les côtes de l'actuelle Roumanie (Dacie), le nord-est de la Grèce (Macédoine) et le Bosphore européen.
Vers -1800 à -1500, des peuples associés à la culture balkanique post-Yamna, vont suivre la voie maritime qui relie le Danube à la mer Noire. S'installant dans l'archipel grec, après un détour en Asie mineure, les Achéens rejoignent Mycènes entre -1900 et -1500. Avec les Illyriens et les Pélasges, ils sont parmi les « Peuples de la mer » qui ravagèrent les côtes méditerranéennes et particulièrement celles de l’Égypte. D'autres Achéens prennent la direction de l'est et longent les côtes de la mer Noire jusqu'en Colchide.
Dans le nord de l'Europe, la culture de Yamna influencera grandement la culture de la Céramique cordée (-3000 à -2200) tandis que des ethnies membres de l'haplogroupe Y-R1b remontent le Danube et le Rhin, franchissent les Alpes et s'établissent en Allemagne : ce sont les Proto-Celto-Germains. D'abord de nature génétique très hétéroclite, comprenant des individus appartenant aux haplogroupes Y-E (ibéro-berbère), Y-R1b, Y-R1a et Y-I, la culture de la céramique cordée est ensuite envahie par les Indo-Européens porteurs de l'haplotype Y-R1a (ce sont les Proto-Balto-Slaves qui ont quitté les rivages de la mer Caspienne presque un millénaire plus tôt, vers. -3800). Si les nouveaux arrivants balto-slaves remplacent la population de la culture de la céramique cordée, ils adoptent néanmoins la langue locale qui est le proto-germanique.
Les Indo-Européens continuent leur expansion vers le centre de l'Europe ; d'abord vers les îles atlantiques (Grande-Bretagne, Irlande et Islande), puis vers les péninsules espagnole et italienne. Ce sont les Proto-Celtes de la culture campaniforme (-2900 à -1900).
Leur constitution en tant qu'ethnie est marquée par l'apparition de l'haplogroupe Y-R-L151, largement majoritaire chez les peuples de la façade atlantique (de la Belgique au Portugal).
Favorisant le transport maritime, plus rapide et plus sûr, vers -2900 à -2500, les Proto-Celtes sont déjà sur les côtes portugaises, ce sont les Proto-Lusitaniens. Vers -2500 à -2200, ils sont en territoires ibères, en Andalousie : leur acclimatation à la culture locale donnera naissance à l'entité celte-ibère. Les Pyrénées demeurent cependant le territoire des Basques-Aquitains.
Dans le nord de l'Italie se distingue lentement une culture typique, qualifiée d'italo-celtique. Les Romains et les Latins seront les fruits tardifs de cette culture qui commença aux alentours de -2000.
Vers -2500, les Proto-Celtes ont fini leur tour d'Europe et les dernières tribus nomades se sédentarisent en Europe centrale. Vers -2400 à -2100, ils sont aussi en Europe de l'est. Quant à la civilisation celtique en tant que telle, il faudra attendre la culture de Hallstatt (-1200 à -450) puis celle de La Tène (-450 à -25) pour qu'elle s'exprime pleinement, avant qu'elle ne s'efface en conséquence de la colonisation romaine (commencée vers -100 et ayant entraîné l'éradication des druides et du druidisme) puis de la christianisation (commencée vers 300).
Mentionnons les Celtes d'Anatolie, les Galates. Parti du centre de l'Europe vers -300, un large mouvement migratoire et militaire celte traverse les Balkans pour ravager la Macédoine, la Grèce, mais aussi l'Anatolie. Certaines de ces tribus fondèrent Belgrade, d'autres pillèrent la ville sainte de Delphes, quand d'autres encore s'installèrent au cœur de l'Anatolie pour y fonder la Galatie (littéralement, « le pays des Gaulois »).
En conséquence de l'explosion démographique de la fin de l'Antiquité, les peuples se battent pour trouver leur territoire, et assurer à leur bétail du pâturage.
C'est une époque de grandes migrations : en Asie, les Cimmériens fuient les Scythes, qui eux-mêmes fuient les Touraniens. Les Alains, tribus aryennes gênées par l'expansion touranienne entre la mer Caspienne et le Karakoram, s'avancent en Europe pour y entrer au début de notre ère.
À partir de la fin du premier millénaire avant notre ère, sous les pressions hunnique et turco-mongole, mais aussi par volonté de conquête, les tribus germaniques déferlent successivement, sur les territoires gaulois (Francs), steppiques (Goths, Varègues), italiques (Lombards, Ostrogoths), ibériques (Wisigoths) et nord-africains (Vandales).
Elles sont en majorité porteuses de l'haplogroupe Y-R1b (héritiers de Yamna), mais comprennent aussi des membres de l'haplogroupe Y-R1a (Proto-Balto-Slaves) et Y-I (Scandinave autochtone). Ces tribus germaniques sont accompagnées dans leurs mouvements par des tribus alaines (iraniennes de type Y-R1a), avares (caucasiennes) ou tatares (turco-mongoles).
La seconde vague de migrations germaniques concerne les invasions vikings qui se déroulèrent à la fin du premier millénaire (vers 700 à 1000). Les Danois régnèrent alors sur les îles britanniques, les Norvégiens colonisèrent l'Islande et le Groenland, et les Suédois s'installèrent dans les plaines baltes et russes jusqu'à Byzance. Le territoire nord-américain découvert vers l'an mille par l'islandais Leif Erikson (v. 970 - 1120) est alors dénommé Vinland ; Il s'agit très probablement du site archéologique scandinave de l'Anse aux Meadows, situé à Terre-Neuve, au Canada.
Fervents d'un paganisme tout à fait semblable à celui des Celtes et des Slaves, les tribus germaniques se convertirent au catholicisme au cours du premier millénaire puis se firent les défenseurs de la foi romaine, notamment à travers le Saint Empire Germanique mais aussi grâce à des confréries militaires terriblement efficaces lors des croisades, tels les ordres teutoniques ou templiers.
Vers le milieu du premier millénaire de notre ère, les dernières vagues de nomades indo-européens à s'installer en Europe sont les Slaves. Après les vagues celtique, germanique, alaine, hunnique, il s'agit du dernier groupe ethnique à avoir massivement déferlé sur l’Europe. Originaires des steppes ouest-eurasiennes, les Slaves s'installèrent dès le début du premier millénaire de notre ère dans les vastes plaines germano-russes, colonisant ainsi la Bohême, la Thrace, les Balkans et toute la Russie blanche.
LA FIN D'UNE TRADITION
Depuis leur lointaine origine en Asie centrale, les peuples indo-européens ont connu un destin commun, même si celui-ci ne se décida pas au même moment. La plupart de ces peuples se sont en effet convertis au monothéisme, ce qui eut pour conséquence de mettre fin à leurs pratiques ancestrales chamaniques ou panthéistes.
Vers le milieu du second millénaire avant notre ère, ce furent d'abord les Aryens de Bactriane qui se convertirent les premiers à la doctrine monothéiste de Zarathoustra. Dès lors, ils combattirent les pratiques polythéistes des « adorateurs des dévas », ce qui eut pour conséquence de pousser à l'exil les tribus aryennes réticentes à l'hégémonie culturelle de ce qui allait devenir le mazdéisme et le zoroastrisme.
Quant aux peuples indo-européens du Moyen-Orient, d'Anatolie et de Perse, le zoroastrisme et la présence juive, puis chrétienne et manichéenne, les avaient déjà accoutumés au monothéisme, de sorte que lorsque commencèrent les conquêtes islamiques, ils adoptèrent sans difficulté la religion de leur envahisseur.
Dans le monde perse, l'islam a acculturé tous les cultes locaux panthéistes. Seules de très rares communautés, comme celles des yézidis ou des zoroastriens, perpétuèrent encore une tradition inspirée du socle polythéiste indo-européen.
L'Inde, qui fut pourtant sujette à la colonisation religieuse, culturelle et militaire musulmane plus de 800 ans durant, puis britannique 200 autres années, fait exception en n'ayant pas cédé au monothéisme (pas dans sa large majorité en tout cas). Il existe bien sûr en Inde des formes de monothéisme, en particulier concernant les adorations (bakhti) de Vishnou, Krishna ou Shiva, mais jamais ces croyances en un dieu unique et tout-puissant, n'ont revêtu le caractère exclusif du monothéisme abrahamique ou zoroastrien.
L'Inde imperméable à de telles doctrines, demeurent donc dans le sous-continent des traces persistantes de la tradition mystique initiale... Mais du culte des anciens Aryas, il ne reste cependant plus grand-chose au seuil du second millénaire, que ce soit en Inde, en Perse ou ailleurs. Si les rituels védiques sont encore à la base de tous les rituels hindous, dans leur immense majorité, les hindous ne maîtrisent pas plus le sanskrit que les catholiques le latin. Quant aux Indiens qui en sont locuteurs, ils appartiennent à la haute société indienne et ne maîtrisent que le sanskrit littéraire et classique, celui des épopées et de la Bhagavad Gita, et non la langue ancestrale des anciens Aryas, le sanskrit archaïque, aussi nommé sanskrit védique.
New insights into the origin of the Indo-European languages
Linguistics and genetics combine to suggest a new hybrid hypothesis for the origin of the Indo-European languages
https://www.mpg.de/20666229/0725-evan-origin-of-the-indo-european-languages-150495-x
L'article de l'Institut Max Planck qui corrobore nos propres recherches (datation haute, vagues successives, origine centrale-asiatique, ...)