28 Avril 2025
Si des mythes ou des points de doctrine sont communs à l'Inde, à la Mésopotamie et à l’Égypte contemporaines, trois hypothèses se présentent alors :
1. Ces ressemblances s'expliqueraient par une influence directe entre les groupes humains, permise par le commerce, l'invasion militaire, la colonisation administrative, le dialogue religieux ou toutes autres échanges culturelles.
La relativement faible intensité des échanges commerciaux antiques ne permet pas d'accréditer la possibilité de rapports culturels et religieux directs, continus et diffus, entre l'Inde et la Mésopotamie, et à plus forte raison entre l'Inde et l’Égypte, deux régions trop éloignées pour qu'une liaison maritime directe puisse les avoir reliées. En revanche, un lien directe peut être envisagé entre la zone indusienne originelle (Merhgarh) et les zones iraniennes, élamites et mésopotamiennes. Porté par le commerce plutôt que par la colonisation démographique ou l'acculturation religieuse, ces rapports furent cependant très limités et ne se remarquent que sur un corpus de mythes très restreint.
2. La possibilité d'une généalogie culturelle.
Les nombreuses similitudes égypto-suméro-indiennes relèveraient du bagage culturel et mythologique paléolithique afro-asiatique, plutôt que des échanges directs et contemporains entre ces trois ères civilisationnelles. En somme, ce ne serait pas en vertu du commerce indusien ou des invasions aryennes, que les panthéons tamoul et égyptien se ressemblent autant, mais plutôt en raison de leur généalogie commune. Les migrations démographiques du Paléolithique supérieur, post-africaines, expliqueraient en effet que des populations éloignées les unes des autres de plusieurs milliers de kilomètres, suivent une tradition orale qui repose sur les mêmes bases mythologiques. Une partie des similitudes doctrinales et mythologiques ne s’expliqueraient donc pas par des échanges ou des influences directs, mais par une généalogie réunissant Proto-Indiens, Proto-Mésopotamiens et Proto-Égyptiens dans une même ancestralité : celle du Paléolithique moyen, qui débute vers -300 000 ans avec l'émergence de l'espèce Sapiens, pour se finir avec l'éparpillement à travers le monde des nombreuses tribus sapiens extra-africaines, dont témoigne l'explosion des haplogroupes entre -70 000 et -30 000 ans. La spiritualité du Paléolithique est avant tout statique, immanente, conservatrice par essence. Si un mythe, un conte ou une superstition sont rarement créés, ils sont par contre allégrement hérités et transmis. Un mythe indien, égyptien, chinois ou amérindien peut donc tout à fait avoir été transmis pendant des centaines de générations et témoigner, à travers ses multiples variations, de l'évolution des ethnies qui le colportent. Les études en mythologie comparée font d'ailleurs état de mythes colportés à travers le monde depuis les premières vagues migratoires africaines, vers -120 000 ans, ou même avant. 1Il faut lire à propos le spécialiste français Jean-Loïc Le Quellec (La caverne originelle, et Avant nous le déluge) ainsi que Julien d'Huy (Cosmogonies).
3. La possibilité d'une apparition en deux endroits du monde, à des périodes relativement similaires, de concepts identiques.
Ces similitudes relèvent alors des archétypes de la pensée, dont le cerveau humain sapiens serait doté. Ce dernier cas de figure est le moins fréquent et ne présente pas le même degré de ressemblance mythologique.
Les mythes ou les coutumes se diffusent donc de trois manières : la transmission horizontale (acculturation, passation), la transmission verticale (héritage) et enfin la « naissance spontanée », en plusieurs lieux sans lien entre eux, d'un mythe équivalent. Nous allons utiliser ces trois directions pour éclairer le paysage religieux de l'Inde indusienne.
À tout seigneur tout honneur, commençons notre mythographie par la divinité afro-asiatique probablement la plus populaire et que les savants ont associés à Osiris, Enki et Shiva.
Shiva et le sumérien Enki sont présentés ithyphallique ou sous la forme d'une pierre phallique, le lingam (monticule naturel ou artificiel en forme de verge.). Leur énergie sexuelle est en effet légendaire. C'est elle qui pousse Enki à violer sa propre fille, Désir. Dans un autre de ses mythes, Enki plante littéralement son pénis dans le sol pour en faire jaillir une source et sa végétation. En Égypte, un mythe très différent narre les mésaventures du sexe coupé d'Osiris, retrouvé par sa compagne Isis, qui reconstruit alors la verge sous la forme d'un totem, ce qui permettra de continuer l’œuvre créatrice et civilisationnelle de son amant. La substance de ces mythes demeure la même : le sexe du dieu viril permet la création agricole (Shiva et Osiris sont les maîtres des infra-mondes, où croissent les racines des plantes). Le sexe divin permet que se perpétue l'acte cosmogonique et civilisationnel initial (Shiva, Osiris et Enki sont aussi des divinités héroïques et civilisatrices).
Le « Maître des animaux », « Maître de la nature », père et gardien des animaux, garant de l'abondance des troupeaux et plus tard de la fertilité des champs, est une figure paléolithique puis néolithique, liée d'abord au chamanisme et plus tard à la fertilité des champs. Impassible, c'est le maître et créateur de l'Univers, dont les divinités sumériennes Enki, indusienne Pashupatinath, et indienne Shiva seront les héritières. Il maintient le monde en méditant, les yeux clos, en position du lotus. Dans l'iconographie proto-historique, cette divinité, dont l'avatar est un roi légendaire, sépare les fauves, dompte les animaux dangereux et vit entouré d'animaux sauvages.
Les maîtres de la nature
À gauche : Sceau cylindre de Mesannepada, roi de Kish, Ur, -2600, Mésopotamie,
Musée archéologique et anthropologique de l'Université de Pennsylvanie.
En haut : Maître des animaux élamite, Iran.
En bas : Manche de poignard de Gobel el Arak, Nagada 2, Haute-Égypte, v. -3250, Musée du Louvre.
À droite : Seau cylindre indusien, Harappa, Pakistan.
La déesse au lion
La spiritualité indusienne demeure un mystère, mais le peu que nous en savons évoque des ressemblances avec d'autres spiritualités antiques classiques.
En Inde puranique, Durga monte un lion, plus rarement un tigre. Kali, incarnation ultime de Durga, se bat comme une lionne, n'hésitant pas à mordre son ennemi à pleines dents et à boire son sang.
En Asie mineure, chez les Hourrites, Shaushka la « Grande Reine du ciel » est représentée avec un lion à ses pieds. Réputée généreuse avec ses dévots, c'est sa statue que Pharaon fit venir depuis Mitanni afin de favoriser les récoltes égyptiennes.
En Mésopotamie, Inana (Sumer) et Ishtar (Assyrie) sont représentées tenant des fauves en laisse.
La furie - déesse ambivalente
Shaushka (Anatolie, Levant), Ishtar (Sémites), Alat (Ougarit), Inana (Sumer), Lilith (Hébreux), Sekhmet (Égypte), Durga (Sogdiane), Kali (Inde), Athéna (Grèce), Artémis (Scythie), Anahita (Perse), Bellone (Gaule), Xiwangmu (Chine), Atahensic (Iroquois) : innombrables sont les déesses sanguinaires et ambivalentes : à la fois protectrices de leur peuple et de leurs adorateurs, elles sont impitoyables envers les démons qu'elles se donnent pour ennemis. Comme le veut la tradition hindoue : « Kali est effrayante aux yeux des démons, et généreuse aux yeux des justes. »
Ambivalentes, ces divinités ont donc deux visages. En Égypte, dans le cycle mythologique de Rê, la déesse chatte Bastet et la déesse vache Hathor sont les incarnations paisibles de la déesse lionne Sekhmet. En Inde, Kali connaît un pendant plus lumineux avec une version antagoniste d'elle-même : c'est l'éclatante Durga.
Un mythe présent en Inde comme en Égypte raconte un récit similaire : durant leurs combats contre les démons, qui fut aussi une transe, les déesses s’enivrèrent. Dans la version indienne, Kali but le sang de ses victimes, tandis que dans la version égyptienne Sekhmet but du vin. Ivres de colères, les divinités furibondes engendrèrent malheureusement un déluge. C'est alors à Shiva (parèdre de Kali) ou à Rê (père de Sekhmet) de régler le problème en pacifiant les déesses.
« Hathor, avide de goûter encore et encore sur ses lèvres ce sang épais et chaud, ne pouvait s'arrêter : devenue Sekhmet, la Puissante, elle échappait désormais au contrôle du grand Rê. Il plaida, implora, voulut lui offrir des présents, mais rien n'y fit. Le sang coulait à flots, détrempait la terre, et le sable se teintait de rouge. Les hommes se faisaient rares. Il ne resterait bientôt personne. Enfin, après avoir cherché longtemps, Rê imagina un subterfuge pour la faire cesser et sauver les hommes qui étaient encore en vie : il concocta une boisson de bière colorée en rouge avec de l'hématite nubienne afin d'imiter la couleur du sang, et offrit ce mélange à Sekhmet. Buvant jusqu'à satiété ce breuvage au dosage savant qu'elle prenait pour du sang, elle s'enivra, se radoucit, en oublia les massacres et s'endormit. C'est ainsi que Rê, après les avoir punis, sauva les hommes. Et c'est ainsi que, depuis lors, on plante pour Hathor, la Charmante, des vignobles à Imaou, dans le Delta, et qu'on célèbre pour elle une fête au cours de laquelle tous s'enivrent, en souvenir de ce jour. » (Guilhou, Peyré, La mythologie égyptienne).
Dans le Devi Mahatmya (« La Gloire des déesses », Markandeya Purana), le récit du combat de Kali est similaire :
« Du front de Durga naquit Kali, dotée d'un corps noir comme une nuit sans lune, avec un visage effrayant, des sourcils froncés, des yeux révulsés, des cheveux emmêlés. La nouvelle déesse était nue, elle avait l'air d'une folle et dansait frénétiquement, en transe, semblable à un volcan en éruption. Armée d'une simple épée et d'un lasso qu'elle brandissait au dessus de son visage grimaçant, elle laissait s'échapper des hurlements plaintifs et stridents, tandis que ses yeux étaient d'un rouge flamboyant et que sur l'univers s’étendaient les hurlements infernaux que dégageait chacun de ses mouvements. Tout autour d'elle, disparurent alors les autres déesses, dont l'éclat avait faibli face à la noirceur de la terrifiante Kali, qui ne portait autour de sa taille qu'un collier de crânes et un pagne de bras décharnés, dont les os étaient percés d'une liane qui maintenait cette macabre jupe à ses hanches. […] À chacun de ses pas de danse, son corps se penchait pour recevoir dans sa bouche les démons qu'elle attrapait avec son lasso puis qu'elle avalait. Quant à ceux qu'elle tranchait de son épée, avant qu'ils ne touchassent le sol, Kali léchait chaque goutte de leur sang, de sa longue langue frénétique, lavant ainsi chaque parcelle du cosmos de la moindre trace du liquide infernal.
Bientôt les troupes asuras durent se considérer comme défaits et Raktabija lui-même fut dévoré par Kali qui, de sa langue rouge et chaude et de ses mains griffues, se barbouilla le visage de son sang en pratiquant sur son cadavre la danse de la mort, laquelle consiste à danser sur la victime, puis à manger son cœur pour en récupérer ses qualités et sa puissance. Cependant, dans la bataille, Durga avait été blessée d'avoir été tenue en obstacle et d'avoir laissé entrevoir sa toute puissance destructrice. Sous les traits de Kali, sa frénésie ne retombait pas. Ainsi, ce qu'il restait de l'univers qui n'avait pas été ravagé par le combat contre l'asura , fut foulé du pied par Kali qui ne cessait pas de danser, détruisant les galaxies et se roulant sur les montagnes. Les dévas apeurés se rapprochèrent de Shiva, l'être cosmique dont jamais rien, si ce n'est sa compagne Parvati, ne troublait la méditation. «Grand Dieu! lui dirent-ils, après avoir si vaillamment mis à mort notre ennemi, voici que Kali détruit cette vie pour laquelle elle a tant combattu ! Toi qui est son compagnon, interviens ! Raisonne celle pour qui plus rien ne semble compter à présent. » Leurs prières eurent du mal à rejoindre les oreilles de Shiva, car l'univers tout entier raisonnait des rires atroces de Kali la démente. Pourtant, Shiva ne semblait pas dérangée par la situation. « Laissez-la savourer sa victoire! » dit-il aussitôt aux rishis et aux dévas qui avaient demandé sa clémence, puis il se replongea dans les intenses méditations qu'il menait au sommet du mont Kailash. La danse macabre de Kali continua donc, sans que rien dans l'univers ne pût jamais être un obstacle pour elle. Après avoir ravagé la Terre et les enfers, Kali s'approcha du mont Kailash qu'elle ne reconnut pas comme sa demeure, tant sa furie était totale et la rendait aveugle à sa propre nature. Comme un ouragan, elle passa près de la couche d'herbes odoriférantes sur laquelle Shiva méditait assis en tailleur. La bourrasque engendrée par le passage de Kali dérangea Shiva qui fut jeté de sa couche et roula en bas des pentes du Kailash. Shiva résolut alors de mettre un terme à sa méditation et ouvrit enfin les yeux. Ce qu'il avait devant lui le désola : les forêts du Kailash étaient en feu et la Terre était balayée d'un vent fétide. Il constata avec une immense tristesse que les hommes ainsi que les dévas étaient devenus moins nombreux que les rats. Il était impossible à Shiva de lever la main sur sa femme, néanmoins il était obligé d'agir au plus vite pour la calmer et lui faire reprendre ses esprits. Alors, afin que cessât sa folie destructrice, Shiva plongea sous les pieds de Kali. Quelques instants encore, celle-ci dansa frénétiquement sur le corps de Shiva puis, saisie de stupeur, elle réalisa enfin qu'elle était entrain de piétiner son mari. Elle cessa aussitôt toute violence et honteuse, elle s'arracha la langue, puis redevint en un instant Durga, puis Parvati, et enfin Sati, la première femme qui jamais ne fut aimée de Shiva. Ainsi, grâce à la fertilité de leur amour, la vie s'établit à nouveau sur Terre et les dieux furent à nouveaux les maîtres du mont Mérou ainsi que de l'univers tout entier. » Récit inspiré du Devi Mahatmya (Markandeya Purana).
Si aucune statue ou totem religieux d'envergure n'ont été découverts dans les ruines des cités de l'Indus, cela laisse à penser que le culte urbain n'était pas de nature idolâtre ou panthéiste, mais cela ne veut en aucun cas dire que la population indigène de l'Indus ne possédait pas une mythologie complexe. Étant donné que la tradition néolithique des statuettes obèses ou reptiliennes est comparable en Inde et au Moyen-Orient, et que les déesses de l'hindouisme classique sont elles aussi comparables avec leurs homologues égyptiennes, anatoliennes ou moyen-orientales, nous pouvons légitimement concevoir que le panthéon de la civilisation de l'Indus, ou tout du moins sa mythologie populaire, devait aussi connaître une déesse créatrice et faste, mais représentée sous la forme d'une furie.
Le couple divin
Cette déesse furibonde mais attachante et généreuse, est associée à un dieu, chthonien ou céleste, selon ce qu'il incarne. Ce sont les couples Perséphone-Hadès en Grèce, Ereshkigal-Kur à Sumer, Isis-Osiris en Égypte, Parvati-Shiva en Inde. Le principe de vie s'unit alors au principe de mort, sous la forme d'un couple mythologique qui symbolise le cycle des saisons.
Le couple divin, c'est aussi le noyau d'une famille nucléaire céleste, bienveillante et dont le rapport explique la création de la vie. Shiva-Parvati partagent ainsi le même trône au sommet du mont Kailash.
Sur le modèle du shivaïsme-shaktisme, le panthéon populaire indusien serait donc dominé par un couple divin, sur le modèle sumérien ou dravidien. C'est la double figure célébrée lors des festivals agricoles et mystiques. Ce couple est représenté par l'alliance de la verge (lingam) et du réceptacle (Yoni). Il compose une famille nucléaire (Osiris / Isis, An / Ki, Enki / Ninhursag, Shiva / Parvati) qui forme alors une triade sacrée avec le fils unique (Horus, Dionysos-Zagreus, Skanda-Murugan).
La princesse des montagnes
En Mésopotamie, Enki est le maître des eaux et des vastes étendues désertiques, qu'elles soient terrestres (déserts) ou aquatiques (mer et espace, car les Anciens se représentaient la Terre entourée d'eau, même « après le ciel »). Il est associé à Ninhursag, la « Dame de la montagne » : leur union associe les éléments aquatiques et terrestres.
Parvati est elle aussi surnommée la « Fille des montagnes ». Dans la mythologie shivaïte, elle est présentée comme la fille du roi Himalaya. Les pics des montagnes himalayennes ont par ailleurs souvent des noms féminins, comme le fameux Nanda Devi ou Annapurna, que la mythologie présente comme la sœur de Parvati.
La famille divine
La triade sacrée est composée du dieu père sacrifié, de la mère gardienne et protectrice et du fils héritier, belliqueux et vengeur. En Inde, ce sont Shiva, Parvati et Skanda (ou Ganesh). En Égypte ce sont Osiris, Isis et Horus.
Horus est le fils orphelin d'Osiris, qui grandit sans son père. Krishna est quant à lui l'avatar de Vishnou, mais il grandit sans le savoir et ne connaît pas ses véritables parents. Dionysos-Zagreus grandit aussi dans l'ignorance de son père. Zeus grandit à l’écart de son père Cronos le roi du ciel. Il vit réfugié sur Terre et protégé par des nymphes. Hercule grandit sur Terre lui aussi, loin de son père Zeus.
Ce fils divin grandit donc sans son père, dont il sera le vengeur ou l'opposant. Il livrera un combat à mort sera contre les forces du mal et leur chef (Seth, Ahriman, les serpents Apophis, Vritra, Vasuki, le démon Surapadman), ou contre son père lui-même (les pères indignes et émasculés Saturne, Cronos, Anu).
Shiva, inconsistant, mauvais mari de Parvati, est lui aussi un père indigne. Il refuse, comme Chronos ou Saturne, la génération qui vient après lui. Il la combat, en particulier dans le mythe de la naissance de Ganesh, dans lequel il tue son fils adoptif. Dans le mythe de Skanda, il refuse de lâcher son sperme pour créer le dieu de la guerre.
Dans des contextes certes différents, les personnages de Chronos, Saturne, Kumarbi et Shiva sont mêlés : ils sont rétenteurs d'une génération divine à venir. Refusant de donner leur sperme, ils finiront émasculés ou « secoués » par un dieu mineur, afin que la génération divine naisse tout de même. C'est Agni, le Feu, qui forcera Shiva à sortir de sa transe tantrique et à lâcher enfin son sperme, involontairement.
Un dieu qui se comporte en ascète et met en pratique les règles de l'abstinence, fut très probablement en vogue sur les rives de l'Indus.
Selon sa mythologie, Shiva vit en solitaire, au sommet d'une montagne, accompagné d'une femme qui est aussi son disciple. Il refuse de créer, pour ne cesser de méditer. Dans un conte védique, on apprend que Brahma demanda son aide pour créer la vie, mais sachant les conséquences d'un tel acte, Shiva refusa pour se réfugier au plus profond des océans. Un tel dieu, pratiquant un tel ascétisme, ne peut qu'entrer en résonance avec l'ascétisme doctrinal de l'Indus.
Le sacrifice du fils
Le mythe du roi qui sacrifie son fils à la demande d'un dieu qui lui a jadis accordé une faveur, est commun aux peuples sémites et indiens.
Chez les Hébreux, il s'agit du sacrifice à Yahvé d’Isaac par Abraham. Chez les Indiens, c'est le sacrifice à Varuna de Rohita par Harishchandra. L’histoire d'un père qui tue son fils unique et inespéré est une tragédie idéale, dans laquelle la fidélité d'un monarque à son dieu tutélaire côtoie la démence et la cruauté de ce même monarque et de ce même dieu.
Abraham obéit à Dieu, Harishchandra à Varuna, mais leurs motivations sont différentes. Harishchandra veut être père, pour connaître la joie de la paternité, Abraham souhaite quant à lui une descendance pour guider les Hébreux. Le déroulement des mythes n'est alors pas le même : si Abraham est prêt à obéir au dieu à qui il a juré une fidélité absolue, Harishchandra ne veut pas tuer son fils unique et ne cesse de reporter cette cruelle tâche. Varuna, magnanime, accepte alors de reporter le sacrifice du fils en rendant le père gravement malade. Ce sont finalement les hymnes rig-védiques chantés à l'attention de Varuna qui charmeront le démiurge, qui acceptera de faire une entorse à son propre règlement, en sauvant le père et le fils. Quant au dieu des Hébreux, sa clémence épargnera elle aussi, au dernier moment, le prince des Hébreux.
Quelques mythes krishnaïtes présent à l'ouest
Intéressons-nous à d'autres mythes communs aux Indiens et aux Sémites. Sargon (v. -2300, Assyrien), Moïse (v. -1200, Égypto-Hébreux), Karna et Krishna (protagonistes du Mahabharata et possibles hauts dignitaires de l'Indus, donc v. -2500 à -1500), seraient nés séparés de leurs parents, survivant à la mort, déposés dans un panier confié au flot d'un fleuve par un adjuvant bienveillant.
Sargon est le roi qui se vantait d'avoir fait accoster les bateaux indiens sur les quais d'Assur. Aurait-il été indophile ou baigné de culture et de traditions indiennes au point de se revendiquer d'une légende indienne ? On sait par ailleurs la très haute estime dans laquelle les Mésopotamiens considéraient les rivages de « Meluhha », parfois même considéré comme un paradis d'outre-mer (Épopée de Gilgamesh). Ce mythe du bébé déposé dans un couffin aurait alors été importé depuis l'est indien vers l'ouest assyrien, puis vers l’Égypte, à la suite du développement des relations commerciales entre la vallée de l'Indus, Akkad et Assur, et le delta du Nil.
Le mouvement inverse est également possible : né dans un contexte égyptien (émigration hyksos et hébraïque dans le delta du Nil) puis transféré en Mésopotamie à travers les échanges entre peuples sémitiques, le mythe aurait alors été transmis en Inde par le réseau de commerçants assyriens, akkadiens et babyloniens.
Autres mythes en commun : Krishna, Horus et Héraclès étranglent des serpents dans leur couffin, alors qu'ils sont encore bébés.
Le divin vacher
Éloigné de ses parents pour échapper à la mort, Krishna grandit dans une famille de métayer, d'où son appellation de vacher. Radha, la fille du roi des vachers d'une tribu yadave (une caste manuelle parmi des plus basse) sera sa première compagne, d'où son titre de roi des vachers. Il s'agit d'une expression typique et consacrée, que l'on retrouve sous de nombreuses variations. En Égypte, Anubis est aussi qualifié de vacher.
Anubis comme Krishna mènent leurs adorateurs vers la sagesse. Cependant, la signification véritable de l'expression mythologique est tout à fait différente en Égypte ou en Inde : Anubis est le guide des âmes, il mène les défunts vers leur jugement, face au juge suprême Osiris. Quant à Krishna, il n'est pas psychopompe, mais il est semblable au gardien du bétail, dévoué et généreux, attentionné envers ses adorateurs.
En Mésopotamie, Enkidu, avatar d'Enki, est berger. Jésus est un pasteur, ses apôtres des pêcheurs. Mohamed exerça la profession de berger.
Un mythe biblico-jaïn
Les deux femmes qui réclament la maternité et la garde du même enfant, est un autre mythe commun à l'Indus et à la Mésopotamie. Deux femmes se déchirent sur la maternité d'un enfant. L'une d'elles est prête à tuer l'enfant pour ne pas le laisser élever par une autre. Dans la tradition jaïne, il s'agit du jugement de la reine Mangala, chez les Hébreux il s'agit de celui de Salomon.
Ce mythe est partagé par les mêmes sources bibliques, jaïnes et mésopotamiennes qui partagent le mythe du sacrifice du prince. Ces deux mythes forment donc un corpus cohérent qui témoigne d'une mythologie urbaine commune aux habitants de Babylone et Mohenjo-daro.
Le vin, nectar sacré
Un des principaux apport indusien à la mystique védique, est l'usage, et même l'amour du vin.
Le Rig-Véda ne mentionne d'ailleurs pas le vin, mais l'eau-de-vie, et si l'identité exacte du fameux Soma, le nectar des dieux des anciens Aryens, demeure inconnue, les hypothèses concernant sa recette mentionnent l'éphédra, le psilocybe, l'amanite tue-mouche et même le harmal (Peganum harmala, aussi appelé rue de Syrie), mais jamais le vin. Ce dernier était pourtant commun dans le bassin méditerranéen, où les Grecs et surtout les Étrusques et les Égyptiens lui vouaient un immense respect (boisson de Pharaon) et même un culte (Bacchus).
Pourtant, dans le Ramayana (rédigé par Valmiki vers -300, donc tardivement) le vin est célébré comme la « boisson des Aryens » tandis que les barbares et les rakshasas (démons) boivent l'alcool de palme, dont le goût est moins raffiné et l'effet plus violent. Si le vin est absent du Rig-Véda et présent dans les épopées, c'est donc que les Aryens ont adopté sa consommation et l'ont fortement appréciée.
La culture du raisin pour en faire du vin aurait commencé dans le Caucase, au plus tôt vers -6000 ans. On retrouve des traces de sa consommation récréative mais aussi mystique en Égypte, en Mésopotamie, en Europe, en Bactriane et dans le Tarim (en Égypte, on consommait occasionnellement le vin avec une macération narcotique à base de lotus bleu). Les chroniqueurs antiques gréco-romains dont Strabon, mentionnent effectivement l'Inde comme une terre fertile, propice à la culture de la vigne et dont les nombreux vins sont excellents. En outre, les récits du mythe de la campagne indienne de Dionysos s'accompagnent invariablement de louanges au vin des contreforts du Caucase et de l’Himalaya. Ajoutons à cela que les climats et la géographie ensoleillée et semi-montagneuse voire semi-désertique des vallées indiennes se prêtent volontiers à la culture de la vigne ; en témoigne encore de nos jours la forte production de vin dans la région de Bombay.
En haut à gauche : Tombe de Nakht (Thèbes) astronome et haut fonctionnaire.
À gauche au milieu : Stèle de Kéti (1ere période intermédiaire), Musée égyptien du Caire.
Au centre au milieu : Trouvaille scythe, Koul-Oba.
À droite au milieu : Dionysos Nagarjunakonda, Inde.
En bas : Un cabaret sumérien, sceau en verre, v. -2600, Ur, Irak, British Museum.
Le lotus cosmogonique et psychédélique
L'entrée d'un mythème dans le corpus védique nous indique l'indubitable présence d'un mythe indusien cosmogonique. C'est le cas du lotus primordial.
Le lotus est un enthéogène ; le breuvage qui contient ses pétales mélangés à du vin est narcotique et sédatif. Ses effets pourraient être rapprochés de ceux du pavot (opium), avec lequel il est associé dans les recettes enthéogéniques égyptiennes et sumériennes. Avec la mandragore, la jusquiame, le cannabis et le pavot, le lotus figure parmi les plantes les plus utilisées par les prêtres égyptiens, qui le faisaient peindre sur les parois des tombes. Lié à ses doux effets hypnotiques, mais aussi à son lieu de culture aquatique, le lotus est la plante des démiurges, que ce soit Brahma ou Ptah (nés tous les deux d'un lotus croissant d'un océan primordial).
Proche du nénuphar, mais bien plus élégant, le lotus croît à la surface des étendues d'eau stagnante. Du marais, lieu dangereux et pathogène, domaine des serpents et associé à l'océan primordial, naît donc une plante qui se passe de terre et qui offre une fleur aux pétales complexes et à la beauté inégalée. Pour toutes ces raisons, le lotus est un symbole universel de sagesse et surtout, de pureté.
Le dieu né d'un lotus (en l’occurrence Brahma en Inde) est un mythe présent dans la littérature védique moyenne (brahmanique) et tardive ainsi que dans les puranas, mais il ne s'agit pas d'un mythe védique, ni aryen. On ne le trouve ni dans l'Avesta, ni dans le Rig-Véda, le plus ancien des quatre védas, ni dans aucune des mythologies indo-européennes. En outre, le lotus ne pousse pas à des températures trop basses, comme c'est le cas au nord de l'Eurasie et en Sibérie (qui sont les aires d'origine à partie desquelles les tribus proto indo-européennes ont commencé leurs successives et nombreuses migrations vers le sud).
Si le mythe du lotus cosmogonique est omniprésent d’Égypte jusqu'en Inde brahmanique, vishnouite ou dravidienne, mais qu'il est absent du corpus indo-européen eurasiatique, et comme aucun rapport direct entre l'Inde et l’Égypte n'est envisageable, il convient donc de penser que le mythe du lotus cosmogonique était diffus durant la Protohistoire, à travers un vaste espace correspondant à un écosystème propice, chaud et humide, entre l’Égypte et l'Indochine.
La mythologie indo-égyptienne présente le lotus comme le siège et l'ombilic du démiurge ; en Égypte, Horus enfant naît d'un lotus, avant de créer le monde par la parole. Ptah et Horus-enfant (Harpocrate) sont dépeints émergeant d'un lotus premier, lui-même issu d'un tertre primordial. En Inde, Brahma naît d'un lotus jaillit du nombril de Vishnou. De son verbe naquit l'Univers.
Le mythème du lotus se retrouve aussi en Inde non aryenne, comme chez les Adivasis Maria Birhors du Jharkhand (Indigènes de la forêt, Nord-est de l'Inde). Il paraît cependant peu vraisemblable que le mythe du lotus, repris dans l'hindouisme brahmanique, ait été importé depuis une culture forestière, nomade et soumise au statut de shoudras (caste manuelle et laborieuse) ; les Aryens ont renforcé le système des castes pour se prémunir du contact avec les peuples barbares, indigènes des montagnes et des forêts, ce qui ne témoigne que les cultures de type préhistoriques pré-agraires des indigènes aborigènes, munda, ruraux ou forestiers, ne représentèrent jamais aucun attrait pour la culture védique.
En revanche, comme en témoignent largement la littérature théologique et l'étymologie du sanskrit, les Aryens ont beaucoup été influencés par la culture et la langue dravidiennes ainsi que par le jaïnisme et son ascétisme nihiliste.
En somme, si le mythème du lotus primordial est entré dans la mythologie védique, ce n'est pas en raison d'une influence directe des indigènes Birhors ou des anciens Égyptiens, mais plutôt parce que ce mythème cosmogonique était déjà populaire parmi les élites indusiennes et qu'il faisait partie du corpus mythologique de la vallée de l'Indus. C'est cette tradition, même décadente, qui véhiculait encore à l'époque védique une doctrine ascétique et métaphysique inédite et séduisante.
En haut à gauche: Mésoamérique
En haut au centre: Bouddha
En haut à droite: Horus enfant, Harpocrate
En bas: la Trimurti et leur parèdre
L’importance de l'élément aquatique
Au centre des villes et villages indusiens, on remarque la présence systématique d'un bassin de rétention d'eau, entouré de marches afin que l'on puisse s'y baigner et y faire sans difficulté des ablutions, des rituels mais aussi y laver le linge. La présence de ces bassins nous indique l'importance que les habitants de l'Indus portaient à leur hygiène ainsi que le rôle fédérateur, mystique et politique de l’élément aquatique.
L'eau est encore aujourd'hui le produit indispensable aux rituels de purification d'un hindou. Dans la plupart des villages du sous-continent, se trouve en effet en leur centre une sorte de piscine carrée, profonde et large de plusieurs mètres, qui doit être considérée comme le lien le plus tenace entre la société néolithique de l'Indus et celle de l'Inde moderne.
Ces bassins devaient jadis servir à la culture du lotus sacré et narcotique, ou encore à figurer les décors de scènes mythologiques fondatrices et cosmogoniques, liés par exemple à la mer primordiale ou au mythe du sage protégé par un serpent lors du Déluge (une scène présente dans la statuaire jaïne mais aussi au milieu du lac artificiel du temple Mahabodhi de Bodhgaya, ainsi que dans de nombreux jardins sacrés du bouddhisme).
L'eau a toujours été au centre de la vie mystique des Indiens ; aux temps les plus reculés du védisme, les dieux principaux que furent Apam Napat, puis Varuna, étaient consacrés dieux des eaux et des espaces infinis de l'océan, alors même que les autres panthéons indo-européens ne connaissent souvent pas de dieux de la mer. Dans l'hindouisme classique, Vishnou est nommé Narayana, ce qui signifie littéralement « le gardien et le protecteur des eaux », le « Seigneur des eaux » ; Il est représenté flottant au-dessus des eaux primordiales.
L'océan primordial, chaotique et créateur
L'océan primordial, dont le thème dévie de celui de la toute-puissance aquatique, est un mythe universel très probablement en vogue sur les bords de l'Indus antique. Cet océan d'où provient toute création, est aussi un océan des possibles, qui existe dans une dimension parallèle à la nôtre et qui assurerait à toute existence une origine et une fin en lui-même, dans un concept qui rappelle celui du Dreamtime aborigène (Alcheringa). Nous pouvons aussi relier ce mythe au mythe sibérien de la rivière sacrée bidimensionnelle.
En Égypte, c'est le Noun, d'où sortent les dieux. À Sumer, c'est l'Océan Céleste qui entoure la Terre. En Inde puranique, c'est l'océan de lait, qui entoure l'Univers.
Chez les Indo-Européens, c'est du chaos (Ginnungagap scandinave, Chaos grec, Éther romain), d'où émerge et où revient la vie incarnée et temporelle. Chez les mazdéens, l'entité asexuelle et primordiale, Zurvan, est seule dans un univers chaotique peuplé de monstres. En Inde védique, l'océan primordial et chaotique est Garbhodaka, mais selon les traditions et les lectures, ce terme peut signifier l'« Océan en expansion », mais aussi l'« Océan des possibles », et pas nécessairement l'océan chaotique primordial.
On peut donc définir deux mythèmes primordiaux successifs qui témoignent d'une évolution du mythe cosmogonique védique. La version la plus ancienne, la plus indo-européenne du mythe concerne une mer du chaos, peuplée seulement par un être premier androgyne (Prajapati) d'où naîtront les dieux et les démons (dévas) comme autant de fils qui se combattront pour la maîtrise du ciel. Dans une version plus récente, proposée par le brahmanisme et l'hindouisme classique, et influencé par la cosmogonie indusienne, l'océan initial n'est pas nécessairement chaotique, il est surtout une source infinie et inépuisable de matière physique et spirituelle. C'est en elle que puise le grand dieu Vishnou-Narayana, Seigneur des eaux, représenté allongé sur les vagues de l'océan des possibles, endormi, œuvrant au processus créatif en rêvant. De son nombril sort un lotus éclos, qui contient lui-même Brahma, le créateur de la Terre et de ses règles inhérentes (dont les védas).
« Brahma, le créateur de tous les êtres, est accompagné partout et en toute chose de Vishnou, le maître des eaux primordiales. Vishnou trône au dessus de l'océan initial d'où proviennent toutes les existences incarnées ou spirituelles. Il s'agit d'un océan de lait, dans lequel nage un serpent cosmique nommé Sesha. Sesha est le gardien de l'univers qu'il délimite en l'entourant de son long corps écailleux. C'est sur son dos que Vishnou est allongé, relié à Brahma par son ombilic. De Vishnou, l'agent spontané de l'univers, sont sorties les diverses classes de créatures. C'est de lui que provient la création éternelle, l'énergie qui se renouvelle à chaque instant et permet à l'univers de demeurer l'univers. Bien qu'allongé sur Sesha, Vishnou réside en même temps en plusieurs autres sanctuaires. Au même instant, il est debout, assis et allongé, tout en se déplaçant autour de toute chose et en s'incarnant en de très nombreux avatars. Depuis l'intérieur des choses, il est celui qui contrôle ces choses. Si jamais, ne serait-ce qu'un instant, les univers étaient privés de sa protection, ils s'effondreraient aussitôt. De même, quand l'univers se dissoudra à nouveau dans l'océan primordial, Vishnou fera une fois encore surgir les créatures du chaos originel, afin que leurs âmes ne soient pas piégées dans l'immensité. » Harivamsa, trad. A. Langlois.
Le seigneur des eaux
Le titre de « Seigneur des eaux » qualifie à la fois Vishnou, Shiva, Enki et Rê.
Rê est célébré par le Livre des morts (v. -1700 à -200) : « Gloire au maître des eaux primordiales » (Livre égyptien des Morts, 64. Trad. Pierret.)
Le grand spécialiste de la Mésopotamie S. N. Kramer dit d'Enki lui qu'il est :
le dieu de l'eau mais aussi celui de la sagesse, et c'est surtout lui qui s'occupait des activités de la terre [...], esprit fertile, à la fois hardi et sage
Vishnou, en tant que Narayana « refuge des eaux », est représenté allongé sur les vagues de la mer primordiale. Dans le Harivamsa (v. -200, attribué à Vyasa, trad. A. Langlois):
Vishnou, voulant créer les différents êtres, forma d’abord les eaux dans lesquelles il déposa un germe vivifiant. Ainsi Vishnou est nommé Narayana ce qui veut dire " le refuge du seigneur des eaux " car c'est en Vishnou que, premiers dans l'ordre de la création, les eaux trouvèrent leur repos et leur maître.
Mais encore : dans le Bhagavatam Puranam (v. 800), un rishi est saisi de vision et il aperçoit Krishna sous une forme enfantine, flotté dans une feuille au milieu de l'océan primordial.
Enfin, Shiva en sa qualité de Seigneur de la Lune, est aussi le seigneur de l'élément aquatique, lié aux marées et à la fertilité des champs (pluie) et des femmes (sperme).
La vénération du fleuve Indus
En raison du caractère de l'élément aquatique et du développement agraire de la civilisation de l'Indus, son fleuve éponyme était très certainement vénéré, à la manière du Nil, du Danube, du Don, du Rhin ou de la Seine en d'autres lieux mais en des époques contemporaines. Preuve du caractère prépondérant de l'Indus, dans le corpus védique, ce fleuve est cité parmi les plus sacrés du sous-continent indien (avec par exemple le Gange, la Yamuna, ou le Brahmapoutre).
Dans les récits alexandrins racontant en syrien ou en grec l'avancée du Macédonien en Inde, tout comme dans les récits de la campagne de Dionysos (Dionysiaques de Nonnos), l'Indus est divinisé sous les traits d'un farouche dieu de la guerre. C'est, avec la Bellone indienne, l'une des rares divinités autochtones précisément identifiées.
Le Déluge
Le mythe du déluge, un des plus anciens de l'humanité, trouve son origine dans l'établissement des premières populations préhistoriques le long des côtes, des littoraux et des principaux fleuves afro-asiatiques. Ce mythe persista pour être encore populaire parmi les populations urbaines néolithiques, qui craignaient les crues ravageuses. Un continuum mythologique autour de ce mythe réunit même l'Europe, l'Afrique du nord, la Mésopotamie, l'Inde pré et post-védique, et enfin la Chine.
Comme sur les bords du Nil ou de l'Euphrate, la fin du monde était sur les bords de l'Indus, de la Sarasvati, de la Yamuna et du Gange, la fin d'un cycle et le début d'un nouveau, sur le modèle du passage annuel des saisons. Ce cataclysme était marqué par une inondation plutôt que par un feu ravageur (comme c'est plutôt le cas dans la tradition indo-européenne) et par le sauvetage d'un couple comprenant un roi ou un saint.
Insistons sur l'origine extra-védique du mythe du déluge. Si le mythe du déluge et du miraculé sauvés des eaux dans une « boîte » fut repris par les Aryens pour en faire un ancêtre ethnique (Manu) et lui attribuer un livre de bonne conduite (Lois de Manu, v. -200), il n'en demeure pas moins un mythe local. Le mythe de Manu, sous ses grandes lignes, se retrouve effectivement dans les mythologies des ethnies indigènes pré-aryennes, tels que les Marias (Dravidiens, Chhattisgarh), les Konds (Dravidiens) et les Saora (Mundas, Orissa) :
Un premier monde créé a été détruit par une pluie diluvienne. Un frère et une sœur sont épargnés par le désastre, car ils ont trouvé refuge dans une calebasse. Lorsque les eaux se retirent, ils en sortent.
Le Sauveur de la fin des temps
Le héros de la fin des temps, qui rétablit l'ordre dans l'Univers et la volonté de dieu sur Terre, est incarné chez les Hébreux par l'attente du Messie. Chez les Perses, il s'agit de Saoshyant (le Sauveur), le descendant de Zarathoustra, l'ultime champion de la cause mazdéenne. Ce mythe messianique est aussi présent, avec moins d'importance cependant, en Bretagne (le mythique retour du roi Arthur), en Scandinavie (Balder) et en Amérique (Quetzalcóatl, Viracocha, Wovoka).
C'est un mythe typique des périodes de décadence, qui témoigne d'un mal-être lié à des injustices et à des cataclysmes sociaux. En Inde, il s'agit de Krishna, au Tibet de Maitreya, le bouddha du futur. Selon la tradition vishnouïte lié aux yugas, le cavalier de la fin des temps, justicier ultime, est Kalki. Ce mythe, absent du corpus védique originel, est présent dans les corpus puraniques, abrahamiques et même amérindiens, ce qui prouve son ancienneté et sa très probable présence sur les bords de l'Indus.
Le plongeon cosmogonique
Le plongeon cosmogonique est un paléo-mythe commun. Pour en savoir plus sur ce mythe, il faut lire les mythographes et spécialistes français Jean-Loïc Le Quellec et J. d'Huy.
Le scénario peut grandement varier dans les détails mais peu dans le fond : un animal pêche du limon pour faire émerger une terre habitable. En Égypte, le mythe du plongeon cosmogonique s'incarne dans la légende de la naissance de la ville de Saïs, qui raconte comment la déesse tutélaire Neith s'incarna en poisson (perche) pour sortir le limon du Nil et créer le support de la vie.
Bien qu’ils soient rédigés en sanskrit, les puranas témoignent largement d'une l'influence indigène extra-védique. Les puranas, dans leur forme comme dans leur fond, ressemblent parfois plus aux agamas qu'au corpus védique classique et qui plus est archaïque. En somme, on peut dire que la source d'inspiration des puranas n'est pas uniquement védique, mais bien plus indusienne, gangétique, munda et dravidienne que simplement aryenne. Ce sujet est complexe et nécessiterait plusieurs volumes de réflexion... Bornons-nous à indiquer que l'immense majorité des contes et mythes puraniques ne sont pas d'influence védique (citons à propos le mythe du barattage de la mer de lait, du sanglier sauveur de la Terre Varaha, du poisson du déluge Matsya, etc.)
Dans la littérature puranique vishnouïte, Varaha le sanglier cosmique plonge au fond des mers pour en sortir la Terre, qui y est retenue prisonnière par le démon du lucre et de la vanité. Il s'agirait d'un mythe qui comprenait originellement un oiseau mais qui aurait été remplacé par un sanglier par les Mundas, un peuple pour qui cet animal est à la fois sacré mais aussi cosmogonique (les Mundas sont un peuple originaire d’Extrême-Orient, où le cochon céleste est populaire, en Chine particulièrement).
Plus au nord du sous-continent et vers l'Indus, une version plus classique du mythe a pu être en vogue, sur le modèle des mythologies eurasiatique, sibérienne, mésopotamienne et égyptienne, qui présentent un oiseau, qu'il soit corbeau, cygne, grue ou canard, à la place du sanglier. Dans la mythologique brahmanique, c'est un cygne qui dépose dans les eaux primordiales l’œuf depuis lequel émergera Brahma.
Le tertre primordial
Ur (Chaldée), Eridu (Sumer) et Héliopolis (Delta du Nil, Mythe de la pierre de benben) sont des cités primordiales que leur mythe de fondation présente comme sortie du néant, sur une colline primordiale. En Perse, Nippur est le lieu de rencontre du ciel et de la terre. De la même manière, selon un conte shivaïte gangétique, Varanasi (Bénarès) fut érigé sur le lieu à partir duquel Vishnou, sous la forme du faucon Garuda et Brahma, sous la forme du sanglier Varaha, se sont chacun dirigés respectivement vers le sommet du ciel et vers le centre de la terre (Shiva plaça la ville au centre des deux trajets). Des mythes similaires devaient concerner les mythes de fondations des cités de l'Indus.
On sait que de nombreuses villes antiques furent construites ex nihilo, parfois même sur des marécages : ce fut le cas de Mexico, de Pétra, de Persépolis, d'Alexandrie, des cités du Caucase, ... Le mythe de l'émergence correspond donc assez bien à l'érection raisonnée et organisée des premières cités, et il est vraisemblable qu'il était aussi présent sur les rives de l'Indus, dont on sait que les cités immenses de Harappa et Mohenjo-daro furent planifiées. Quant à Mehrgarh, fondée vers -7000, on sait qu'elle connut un réaménagement quelques siècles après sa fondation, avec l'érection d'une sorte de « Nouvelle-Mehrgarh » à quelques dizaines de mètres du premier site.
Ce qu'il faut retenir de ces arguments, c'est que les villes néolithiques sont des créations urbaines ex nihilo et que leur mythe de fondation en est forcément influencé.
La tortue cosmique
Une tortue gigantesque porte le monde sur sa carapace. Ce mythe, d'origine munda et extrême-oriental, est populaire dans les campagnes et la région gangétique. Si ce n'est une tortue, ce sont des éléphants qui portent le monde (puranas). Ce dernier mythe est aussi présent en Extrême-Orient (Chine), en Eurasie paléolithique (grotte de Rouffignac) ainsi que dans les mythologies arctiques sibériennes et amérindiennes ; il peut alors s'agir de mammouths et non d'éléphants.
L'ordre dans la création
En Haute Égypte, la création se fait par démultiplication successive et régulière. Il en va de même selon la mythologie japonaise du Kojiki, mais aussi en Inde, où l'unité donna naissance à la dualité, portant à trois le total des divinités primordiales.
Chez Tirumular et la tradition shivaïte agamique tamoule, il s'agit de Shiva puis Vishnou et Brahma. En Égypte, Atoum la « Totalité », donna naissance aux jumeaux Geb (Terre) et Nout (Ciel). À Sumer, du Ciel primordial, apparus An (Ciel) et Ki (terre). Les dieux élémentaires du polythéisme classique naîtront de ce couple Ciel / Terre.
On peut donc avancer que la cosmogonie indusienne s'est déroulée en trois étapes : 0 (chaos), puis 1 (dieu suprême, asexué primordial, Bhagavata), puis 2 (la dualité complémentaire est engendrée par le principe d'unité : création et destruction) et enfin 3 (union des deux principes précédents plus l’initiateur : pérennité de l'univers).
La création solitaire par la semence
Atoum, le démiurge d'Héliopolis (delta du Nil), crée seul, avec son sperme ou sa salive, l'Univers et les premiers dieux. En Inde brahmanique, dans deux de ses mythes tout du moins, Brahma crée par sa transpiration et (ou) son sperme. Il s'agit du mythe de création solitaire de l'univers, incluant le dieu Amour (Kamadéva) et de la naissance du Gange, né d'une goutte de la transpiration des pieds de Brahma, recueillie par Vishnou et accueillie sur terre par Shiva. Le Harivamsa (v. -200) narre comment, en se masturbant, le rishi céleste Atri créa la Lune, qui est aussi le Soma, le nectar d'immortalité offert aux Aryens pour célébrer leurs rituels. Shiva donne naissance à Skanda avec son sperme, sans le concours de la matrice féminine.
Mentionnons par ailleurs le mythe de la lune crée par Seth avec le sperme d'Horus, qui nous rapproche, dans le champ sémantique tout du moins, des thèmes abordés dans ce paragraphe.
La divinité absente
Le mythe du « dieu absent » explique l’enchaînement des saisons en racontant l'absence hivernale d'une divinité fondamentale, garante de la fertilité des femmes, de la faune et de la flore, et qui entraîne la dévastation, la famine et la sécheresse. Son retour printanier rétablit en revanche la balance cosmique.
Ce mythe se retrouve presque à l'identique d'Anatolie jusqu'en Himalaya. Il s'agit des légendes de Telipinu en Anatolie, de Dumuzi (Tammuz) en Mésopotamie, de Perséphone (Proserpine) en Europe et enfin d'Annapurna dans la vallée du Gange.
Dans un mythe égyptien différent mais associable, le Soleil s'absente de la Terre durant le jour pour voyager dans la nuit et y livrer un combat quotidien et nocturne contre Apophis, le serpent maléfique, maître des ombres.
Amon-Atoum-Vishnou, divinité afro-asiatique
Nous avons souvent rapproché Shiva d'Enki, il est temps de mettre en avant les similitudes qui rapprochent Vishnou et les dieux égyptiens Amon et Atoum.
Tout d'abord, ce sont des dieux solaires, représentés auréolés d'un disque solaire. Shiva et Enki ne sont en revanche jamais présentés comme des divinités solaires, bien au contraire, ce sont des divinités chthoniennes.
Vishnou, Amon et Atoum sont associés à la couleur bleue dans leur symbologie respective. Amon est le dieu tutélaire et primordial de Thèbes (Haute Égypte). Son culte connut un essor avec la domination théologique de la Ville sainte sur toute l’Égypte, entre -2000 et -1000 environ, mais son origine est bien plus ancienne. Amon est un dieu africain, typique de la Haute Égypte. Il s'agit du démiurge monolâtre panafricain que les Dogons nomment Amma et qui fut peut-être le tout premier modèle de dieu unique, primordial, hermaphrodite et punisseur.
Quant au dieu héliopolitain Atoum (Basse Égypte), sa personnalité l'associe à Vishnou. Lisons d'abord un extrait des Textes des sarcophages (v.- 2200 à -1700) :
Tu es destiné à vivre des millions de millions d'années. Pourtant, je détruirai tout ce que j'ai créé ; ce pays reviendra à l'état de Noun, à l'état de flot, à son premier état. Je suis ce qui restera, avec Osiris, quand je serai redevenu serpent. Et ce que je serai, les hommes ne peuvent pas le connaître, les dieux ne peuvent pas le voir. Car je suis la totalité de ce qui est et ce qui n'est pas. Tout ce que j'ai fait, je l'ai fait étant seul, avant que personne d'autre ne se manifestât à l'existence. Seul j'ai pensé toute la création.
Les égyptologues et universitaires Nadine Guilhou et Janice Peyré résument ainsi :
Présent au début, Atoum restera seul, avec Osiris, en cet avenir lointain, aux limites extrêmes du temps, quand le monde sera revenu à l'état de Noun, de chaos liquide, lorsque les hommes eux-mêmes ne pourront plus voir.
Chez les égyptologues allemands Fahmuller et Eggebrecht :
Atoum, " le seigneur au nom mystérieux " qui est à l'origine de toute la création, occupe une place privilégiée. Contrairement aux autres dieux, lui le non créé ne succombera pas à la mort qui, à la fin de la création que le dieu détermine lui-même, éteindra toute existence.
Je suis celui qui va détruire tout ce que j'ai créé. Ce monde retournera dans l'océan primordial, dans le flot originel, comme à ses débuts. Je suis celui qui subsistera avec Osiris après m'être transformé de nouveau en d'autres serpents que les hommes ne connaissent pas et que les dieux ne voient pas.
Dans la Bhagavad Gita, 6, trad. E.-L. Burnouf.
« Vishnou a de nombreuses têtes, tournées dans toutes les directions, et d'innombrables yeux, qui scrutent tout ce qui peut être scruté dans l'univers. […] Au-dedans du corps du dieu des dieux, vit l'univers tout entier dans son unité comme dans sa diversité. En lui, il y a l'ensemble des dieux, dont Brahma qui est assis sur son trône de lotus, relié à lui par son ombilic, ainsi que la multitude des êtres vivants, comprenant les rishis célestes et Sesha, le Serpent Cosmique. Ses bras n'ont pas de fin, et de son corps jaillissent une multitude de torses, de visages, de bouches dont émane le feu sacré, ainsi que des yeux innombrables, qui sont comme le Soleil et la Lune... Innombrables aussi sont ses jambes, ses pieds, ses dents acérées... Vishnou est sans fin, sans milieu, sans commencement, car il est la forme universelle. Il est l’Indivisible, la connaissance suprême, le trésor tout autant que le roi de l'univers. Il est immortel et c'est lui qui maintient le Dharma, la loi immuable qui soutient l'univers. »5
D'Amon, il est bien connu qu'« aucun dieu ne connaît ses traits réels. »
En Inde, dans le Harivamsa :
Mais quelle est la forme, quelle est l’apparence, de ce dieu si puissant ? Les caractéristiques de Vishnou sont infinies car ce dieu mystérieux ne possède pas qu'une couleur ni qu'un aspect !
De même à propos de Shiva dans les agamas shivaïtes tamouls :
Même pour ceux pour qui la mort est devenue futile, la gloire de Shiva ne sera jamais totalement révélée ni comprise.
L'effroi face au divin
L'apparition de Vishnou ou Amon provoque la peur. Sur une inscription du temple égyptien de Karnak, à propos des rituels quotidiens dans les temples d'Amon, on peut lire un dévot qui s'adresse à son dieu.
La peur de toi est dans mon cœur ; quand je suis devant toi, des frissons parcourent tous mes membres.
Dans la Bible, Yahvé et ses anges terrorisent les témoins de leurs apparitions. En Inde, Kali et Krishna sont qualifiés de « sombres » et Rudra de « colérique. »
Krishna déclare à Arjuna, dans le chapitre six de la Bhagavad Gita, à la suite de l'extrait déjà cité :
Je suis celui qui dévore les générations, les âmes se jettent dans sa gueule tels des papillons dans la flamme d'une bougie.
Krishna conseille Arjuna, avant de se transformer en Vishnou et de révéler sa véritable nature inquiétante
Les divinités zoomorphes
L'animisme est présent dans les cultes totémiques du serpent cosmique et primordial (Sesha), du serpent chthonien et ambivalent (Vasuki), de l'éléphant soutient du monde (Ganesh, Airvata), du roi des singes (Hanuman) ou du cochon cosmogonique (Varaha). Certains de ces mythes sont probablement d'inspiration munda, donc extrême-orientale, d'autres sont présents en Inde depuis l'arrivée des premières populations sapiens de type aborigène-australoïde.
La vache, le singe, le rat, le paon, sont encore vénérés en certaines villes et par certaines populations indiennes actuelles. Le même phénomène, avec des animaux différents, s'observait jadis sur les bords du Nil : citons la ville du crocodile (Crocodilopolis), la ville des loups (Lycopolis, Assiout), la ville du chien (Cynopolis), la ville de l'oxyrhynque (poisson)...
Si ce n'est Oanès l'Homme-Poisson sumérien, le Chérub assyrien et le Simorgh perse, le zoomorphisme demeure rare en Mésopotamie. En revanche, les divinités à têtes ou à corps d'animaux sont légion en Inde ou en Égypte. Citons :
- Le sphinx
- Le taureau : Apis est l’incarnation du démiurge Ptah en son temple. En Inde, Nandi est le taureau de Shiva, son véhicule, son fidèle ami, mais aussi un de ses avatars les plus anciens.
- La vache céleste : Hathor et Parvati sont représentées en vache.
- Le mythe de la déesse furibonde et transformiste comprend en Inde comme en Égypte une déesse animale. Lors du mythe de la vache céleste et de la colère de la fille de Rê, Hathor (vache) devient Sekhmet (lionne). En outre, Sekhmet connaît une incarnation paisible avec Bastet, la déesse chatte. En Inde, Dévi devient Durga chevauchant un lion ou un tigre.
- le serpent ami de Dieu Vasuki est le roi des cobras géants nagas, il règne sur un des mondes souterrains et infernaux. Il est l'ami de Shiva et est représenté sur son épaule et enroulé autour de son cou. En Égypte, le cobra Uræus orne les couronnes et diadèmes des pharaons. En outre, Vishnou est l'ami d'un serpent : Sesha, le serpent monde, dont le corps délimite la frontière entre l'univers perceptible (et périssable) et le domaine imperceptible et impérissable. En Égypte, Rê se transforme en « ichneumon », sorte de musaraigne destructrice de reptiles et prédatrice de leurs œufs. C'est sous la forme de l'ichneumon que Rê lutte contre Apophis.
- le faucon Garuda est le véhicule de Vishnou, avec lequel il chasse les serpents nagas. Horus est le dieu faucon, dont le regard perspicace voit tout, capable lui aussi de plonger sur ses proies rampantes. Animaux aériens, les oiseaux sont les attributs des dieux, leurs messagers. Les oiseaux migrateurs annoncent en tout lieu le retour du printemps. Ce sont donc des animaux de bon augure.
La lune
La lune, maîtresse des saisons et des marées, joue sans aucun doute un rôle important dans la civilisation agraire et maritime de l'Indus. Indication du lien qui a pu être plus étroit qu'on ne le pense entre astrologues mésopotamiens et indiens, notons que Sîn est le dieu lunaire mésopotamien, tandis que Sîni est une des lunes du calendrier védique. Ces homonymies pourraient cependant n'être dues qu'au hasard, tout comme celles qui rapprochent Rama (Ram' sans la déclinaison) de Ramsès, Manu (premier roi du monde) de Manès (premier pharaon) ou encore Brahma d'Abraham...
Nature commune des rituels indo-égyptiens
Outre des points de mythologie et de théogonie, il existe aussi des pratiques et des coutumes religieuses communes à l’Égypte et à l'Inde. Mentionnons par exemple l'usage rituel de l'encens, du lait et du miel (ces deux derniers produits sont aussi utilisés par les Indo-Européens). Mentionnons aussi l'usage du vin, l'omniprésence du lotus, ainsi que le rituel quotidien d'habillage et de déshabillage des idoles.
Quant à la tonalité générale des religions polythéistes indienne et égyptienne, elle est d'abord initiatique, symbolique et surtout tolérante. À propos des différentes versions d'un même mythe cosmogonique, l'égyptologue allemand E. Fahmuller avance qu'elles « présentaient de nombreuses variantes qui, de façon non dogmatique, étaient admises comme évidentes et étaient considérées comme l'expression de la multiplicité infinie de la force créatrice divine » (La Civilisation égyptienne, 1987).
Le même phénomène s'observe en Inde, pour lequel de nombreuses études ont mis en avant le caractère tolérant bien que protéiforme et hétérogène du polythéiste.
Coutumes funéraires
Les coutumes funéraires sont similaires elles aussi. Dans les trois aires civilisationnelles que nous étudions, les corps sont brûlés ou enterrés. En Égypte et en Inde, le cortège funèbre traverse la cité jusqu'à son fleuve. En Inde (vallée gangétique) les corps sont brûlés sur cette rive, puis jetés dans les flots. En Égypte ils sont emmenés en pirogue sur l'autre rive devenue un cimetière. Dans les deux régions les cadavres sont enveloppés d'un drap spécial (lin en Égypte) blanc (couleur du deuil).
Pour les trois civilisations, le lapis-lazuli est une pierre précieuse associée au contexte funéraire et placée dans les tombes. Les tombes royales mésopotamiennes, les bijoux funéraires égyptiens et les artefacts néolithiques de Merhgarh en témoignent.
Les couleurs bleues et noires
La couleur bleue (foncée) est en Inde (Vishnou, Shiva) comme en Égypte (Amon) le signe d'appartenance à une classe de dieux particulièrement supérieurs. Le bleu est une couleur rare parmi la faune et la flore, c'est donc un symbole de ce qui est exceptionnel. Le bleu est aussi associé au ciel et à la mer, deux étendues infinies et insondables ; deux attributs du dieu monolâtre et suprême.
Évoquant l'océan maritime, infini, mouvant, tout-puissant, mais aussi l'espace céleste insondable et incompréhensible, c'est la couleur des mahadeva, les « super-dieux », ceux qui constituent le cœur monothéiste de l'hindouisme moderne ; Shiva (et sa compagne Kali) et Vishnou (et donc ses avatars Parashurama, Rama et Krishna) sont représentés la peau bleue. Le bleu est par ailleurs considéré dans la symbolique hindoue comme une alternative au noir, jugé parfois inapproprié, ou au violet, difficile à obtenir, et dont les significations mystiques se rapprochent du bleu.
Dans le jaïnisme, les idoles tirthankaras sont noires. Dans le vishnouisme indigène, on vénère aussi Krishna et Vishnou-Jaganath sous la forme d'idoles noires. Le noir, ainsi que le bleu nuit, sont les couleurs de l'espace, du sommeil, de la mort. Le lingam de Shiva est lui aussi souvent noir. Shiva lui-même a la peau bleu foncée, mais nombreuses sont les représentations, en particulier les Tibétaines, qui le représentent la peau noire.
Magie et mantras
Sans aucun doute, les habitants de l'Indus au troisième et deuxième millénaire croyaient en la magie et en la force des sortilèges (mantras). Comme en Égypte, au Levant, en Mésopotamie, le mot et le signe sont dotés d'une force intrinsèque. Le dire, l'écrire correctement, associé aux bons rituels, assure un pouvoir envié et redouté. En Inde comme ailleurs, on croit à la puissance magique des mots écrits et surtout, dits : ces mantras, on les apprend par cœur, on les récite lors de prière intérieure ou encore on les fait réciter lors des cérémonies publiques par des prêtres rémunérés.
La justice
La morale égyptienne est incarnée par le Maat (« Incarnation même de l'ordre du monde », in A. Eggebrecht La Civilisation égyptienne) ; un concept qui évoque la balance et la justice. En Inde, une telle notion est présente avec les concepts du Rta et du Dharma, les règles de l'Univers, que dieux, hommes et démons doivent suivre pour perpétuer la vie. Le dharma indique donc une conduite à chacun, en fonction de sa propre place dans l'Univers.
Tout comme le Maat, le Dharma n'a pas de temple attitré. Rta, Dharma et Maat sont avant tout des concepts signifiant le juste chemin, la doctrine vraie, la règle à suivre sous peine de déchoir et d'entrer en décadence.
Après la mort
En Égypte comme en Inde, on croit à la vie après la mort. Les pharaons connaissent la vie éternelle, comme en témoignent les Textes des Pyramides (chapitre 412) :
« Le temps de vie du roi est l'éternité, sa limite est l'infinité, en cette sienne dignité selon laquelle on fait ce que l'on aime et on ne fait pas ce qu'on déteste, lui qui réside entre les limites de l'horizon, éternellement et à jamais. »
Cette vie après la mort est une réincarnation, dans une condition identique ou différente. Devenir Osiris, vivre auprès de Vishnou à Vaïkuntha, ou auprès de Brahma à Brahmaloka, c'est un objectif que se donnent les plus sages. Il n'y a là rien d'inédit : les Aztèques désiraient vivre au Pays de la Pluie avec Tlaloc, le dieu de l'eau. Les Grecs morts au combat espéraient rejoindre les Champs Élysée de Zeus et les guerriers aryens Indraloka, le palais d'Indra.
L’orphisme, le pythagorisme, le culte de Zalmoxis, parmi de nombreuses autres doctrines antiques, admettaient la vie après la mort, à travers un système de purification de l'âme. Il s'agit d'un concept présent au Tibet, comme en témoigne le Bardo Thodol (Livre tibétain des morts), mais aussi dans certaines mythologies amérindiennes. Ainsi les Andins pensaient que la vie se poursuivait dans une autre dimension.
Le temps de vie du roi est l'éternité, sa limite est l'infinité, en cette sienne dignité selon laquelle on fait ce que l'on aime et on ne fait pas ce qu'on déteste, lui qui réside entre les limites de l'horizon, éternellement et à jamais.
Cette vie après la mort est une réincarnation, dans une condition identique ou différente. Devenir Osiris, vivre auprès de Vishnou à Vaïkuntha, ou auprès de Brahma à Brahmaloka, c'est un objectif que se donnent les plus sages. Il n'y a là rien d'inédit : les Aztèques désiraient vivre au Pays de la Pluie avec Tlaloc, le dieu de l'eau. Les Grecs morts au combat espéraient rejoindre les Champs Élysée de Zeus et les guerriers aryens Indraloka, le palais d'Indra.
L’orphisme, le pythagorisme, le culte de Zalmoxis, parmi de nombreuses autres doctrines antiques, admettaient la vie après la mort, à travers un système de purification de l'âme. Il s'agit d'un concept présent au Tibet, comme en témoigne le Bardo Thodol (Livre tibétain des morts), mais aussi dans certaines mythologies amérindiennes. Ainsi les Andins pensaient que la vie se poursuivait dans une autre dimension.
Ces sauvages croyaient en l’immortalité de l’âme. Ils pensaient qu’après la mort l’âme était transportée, vers le Sud, dans une région inconnue, mais fort agréable ; qu’elle y était heureuse pour toujours ; que ce bonheur consistait en la jouissance non-interrompue de toutes sortes d’amusements, comme la chasse, la pêche, la danse et autres choses semblables. Ils croyaient que les méchants étaient envoyés dans une région, très-éloignée, où ils étaient malheureux pour toujours.
Chez les Aryens, ce qui pourrait s'apparenter à un paradis se nomme Brahmaloka, « Le domaine de Brahma » et donc du Brahman, le concept théologique associé à « l'âme du monde », sans passé sans présent sans futur. S'il est souvent mentionné par la littérature brahmanique, il est par contre totalement absent du védisme ancestral. Dans le corpus védique il est plutôt fait mention d'Indraloka, le domaine d'Indra (le dieu de la guerre de la pluie, maître de l'éclair, que l'on honore pour attirer à soi la victoire). Indraloka est un lieu similaire au Valhalla des Scandinaves ou aux Champs-Élysées gréco-romains : situé au sommet de l'Axis mundi, il est réservé aux héros morts aux combats. Ce n'est donc pas un paradis éthéré ou les sages vivraient auprès d'un démiurge salvateur.
Brahmaloka, refuge des bons et justes, ouvert à ceux qui feraient l'effort de plaire à un dieu de paix et d’amour et non plus à un dieu belliqueux et destructeur, serait donc une influence de la religion de l'Indus sur le védisme. Indra et son paradis réservé aux héros morts en combattant, auraient alors cédé la place au sommet des cieux à un démiurge (Brahma, Vishnou ou Shiva) qui offrait le salut et la vie post-mortem éternelle (nirvana) aux sages les plus méritants dans leurs pénitences (ascétisme), les plus généreux dans leurs offrandes et les plus appliqués dans leur dévotion.
Dans les védas proprement dits, peu ou point de traces de croyance en des renaissances indéfinies, non plus que de tendances pessimistes. Les chantres des hymnes n’ont pas, du reste, de conceptions aussi transcendantes : pour eux, le culte des morts n’en est qu’à ses premiers développements, et s’ils ne sont pas indifférents au redoutable problème de la fin des êtres, ils n’ont pas encore, à ce qu’il semble, assez de puissance d’abstraction pour donner un corps aux spéculations que leur suggère le souci des choses d’outre-tombe. »
Théorie centrale de l'hindouisme, la réincarnation n'est pas mentionnée dans le corpus des quatre védas initiaux (-1500 à -800), alors qu'elle est omniprésente dans la couche plus tardive des védas, qui est celle des Upanishads et des commentaires (v. -500). L'idée que la mort n'est pas une fin en soi, est prégnante dans le dialogue philosophique de la Bhagavad Gita (v. -200 à 200) :
« Les sages ne pleurent ni les vivants ni les morts ; car jamais n’a manqué l’existence, ni à moi, ni à toi non plus, ni à ces princes ; et jamais nous ne cesserons d’être, nous tous, dans l’avenir. Comme dans ce corps mortel sont tour à tour l’enfance, la jeunesse et la vieillesse ; de même, après, l’âme acquiert un autre corps. Tout cela le sage le sait et ne s'en trouble pas. [...] Les corps qui finissent procèdent d’une Âme éternelle, indestructible, immuable. [...] Elle ne naît, ne meurt jamais. N'étant jamais née, elle ne renaîtra jamais ; sans naissance, sans fin, éternelle, antique, elle ne naît pas quand on tue le corps. Comment celui qui la sait impérissable, éternelle, sans naissance et sans fin, pourrait-il tuer quelqu’un ou le faire tuer ? Comme l’on quitte des vêtements usés pour en prendre de nouveaux, ainsi l’Âme quitte les corps usés pour revêtir de nouveaux corps. [...] Quand bien même tu la croirais éternellement soumise à la naissance et à la mort, tu ne devrais même pas pleurer sur elle : car ce qui est né doit sûrement mourir, et ce qui est mort doit renaître ; ainsi ne pleure pas sur une chose qu’on ne peut empêcher. Le commencement des êtres vivants est insaisissable ; on saisit le milieu ; mais leur destruction aussi est insaisissable : y a-t-il là un sujet de pleurs ? » (Bhagavad Gita, 2. Trad. Burnouf).
L'ascétisme, un régime alimentaire végétalien drastique, la philosophie de l'Ahimsa (non-violence absolue), l'observation stricte de ses propres faits (karma) et gestes, permettrait d'espérer une réincarnation dans un état clément de l'existence. Une vie, ou une fin de vie pénitente, serait donc un gage d'accéder, après la mort, à une dimension agréable de l'existence.
Une fois purifiée après un séjour dans un domaine post-mortem, infernal ou céleste, selon que la vie passée sur Terre ait été bonne ou mauvaise, et qu'elle ait donc plus ou moins besoin d'être purifiée, l'âme est réincarnée dans la dimension physique de l'existence.
Passé d'un état à l'autre est un cycle ascendant et descendant, composé d'un moment de salissure et d'un autre de purification. Une vie vertueuse entraîne une nouvelle incarnation bénéfique, qui entraîne fatalement une salissure, qui entraîne alors un besoin de purification, ce qui entraîne un nouveau cycle vertueux... et le cycle s'enchaîne ainsi sans fin. C'est le Samsara, le cycle sans commencement ni fin de la vie et de la mort.
Il existe un jugement des morts pour peser l'âme des défunts. Dans la littérature puranique, il est présidé par Yama, le premier homme à mourir. En Égypte, c'est Osiris et Anubis qui le président. Les âmes des bons se rendent au domaine divin, en attendant de se réincarner dans l'existence matérielle. Les mauvaises vont en enfer et après s'être purifiées, se réincarnent dans l'existence.
L'enfer indien est constitué des Patalas et des Narakas, des mythes puraniques absents du corpus védique. À Sumer, c'est Kur. En Égypte, c'est le Douat, la « Nuit », le « monde inversé ».
L'île paradisiaque
Une île mystique et paradisiaque existerait en marge du monde ; les âmes des justes s'y reposeraient dans la volupté. En Mésopotamie c'est l'île semi-légendaire de Dilmun (Bahreïn), dans la mythologie hindoue shaktiste et tamoule, c'est Sripura, le repère que la déesse-mère s'est construit pour elle-même et son repos, à l’écart de l'univers. Un tel endroit ne serait pas dissous lors de sa destruction cyclique.
Dans la tradition krishnaïte, il s'agit de Goloka, la « Planète des vaches », où vit Krishna avec sa compagne préférée Radha, accompagnés de Surabi la vache céleste et primordial. Goloka n'est accessible qu'aux plus fervents dévots de la bhakti krishnaïte.
En Égypte, l'île mystique est l' « Île du Ka », dont le récit populaire sera repris dans les Contes des mille et une nuits. En Haute Égypte, mentionnons l'île du lac sacré du temple d'Isis à Philae. Chez les Celtes, c'est l'île d'Avalon et les terres fertiles de Summerland. Chez les Sibériens, c'est le lieu que rejoignent les oiseaux migrateurs, en particulier les grues (sacrées en Gaule et en Sibérie) et les cygnes (oiseau véhicule de Brahma).
***
Recenser de manière exhaustive les mythes communs aux trois aires civilisationnelles que nous avons étudiées serait l’œuvre d'une vie. Gageons qu'à travers ces quelques exemples, nous avons montré qu'il était tout à fait possible de concevoir une même aire culturelle préhistorique, qui expliquerait, en grande partie, les si nombreuses similitudes mythologiques entre le Croissant fertile et la zone indo-himalayenne.
Plus encore, nous venons d'esquisser les bases doctrinales et mythologiques d'une spiritualité paléo-afro-asiatique. Nous savons la mystique dogone proche de celle de la Haute-Égypte antique, de même que nous savons les Berbères, et leur ultime rameau occidental les Guanches des Canaries, liés génétiquement et culturellement aux peuplades égyptiennes, levantines et nubiennes. Nous savons aussi le rayonnement immense des civilisations sumérienne et mésopotamiennes, dont l'influence se remarque jusque dans le Caucase et l'Anatolie. Enfin, il n'est plus besoin de présenter le sous-continent indien comme la plaque tournante du commerce et des idées en Asie ; depuis l'Iran jusqu'en Chine, au Japon, et même jusque dans l'archipel indonésien, la culture indienne, qu'elle soit de type védique, tamoule, hindoue ou bouddhiste, s'est largement diffusée.
En somme, relier avec rigueur les mythologies indienne, mésopotamienne et égyptienne, c'est reconstruire les bases d'une spiritualité intercontinentale, méridionale, océanique, afro-indienne, jadis en vogue des îles atlantiques jusqu'à celles du Pacifique.
Deux aires mythologiques et doctrinales se dessinent alors.
L'une d'entre elle est une aire eurasiatique, mais aussi américano-arctique, qui présente de très nombreuses similitudes mythologiques (zones celtique, scandinave, lapone, ouralique, caucasienne, turcique, mongole, chinoise, japonaise, sibérienne, inuite et américaine).
L'autre méga-structure mythologique et doctrinale est celle d'un écosystème plus chaud, où l'océan et la jungle possèdent l'importance de la steppe, de la montagne et de la banquise ailleurs. Au polythéisme foisonnant et au panthéisme exacerbé qui semblent typiques de la tradition nordique, se substitue au sud un panthéon resserré autour d'un couple, d'une famille nucléaire, voire d'un démiurge solitaire.
C'est en Inde que se confrontèrent de la plus belle manière les deux inspirations. Les Aryens apportèrent la tradition eurasiatique septentrionale, les Dravidiens conservèrent la tradition indigène, et cette cohabitation donna naissance à l'hindouisme tel que nous l'entendons en Occident.
BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE
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