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Arya-Dharma, l'héritage des spiritualités premières

La RELIGION ROMAINE

Janus, dans un manuscrit du 15e siècle

Janus, dans un manuscrit du 15e siècle

Par Jules Toutain

Religions de la Grèce et de Rome, Annuaires de l'École pratique des hautes études, 1931.

 

Le fait qui caractérise l'histoire religieuse de l'Italie, c'est la survivance de nombreux cultes grecs ; c'est aussi l'empreinte hellénique conservée, dans maintes légendes, régionales et locales, non seulement par les villes de la côte, mais même par quelques cités de l'intérieur, comme Luceria. Les principales divinités de cette série sont Hera, Poséidon, Demeter et son cycle, Artémis et Apollon, Athéna, les Dioscures; les légendes de Diomède et d'Oreste ont laissé des traces à Rhegium et en Apulie. [...]

Les cultes d'origine proprement romaine et italique étaient surtout abondants, en dehors des villes fondées par les Grecs, le long des principales voies qui parcouraient le pays : Via Appia, Via Popilia, Via Herculia et voies secondaires. Ces cultes s'adressaient principalement à Jupiter Optimus Maximus, Mars, Vesta, Mercure, Vertumnus, Hercule, Silvain; on a également rencontré des dévotions à Bona Dea, Liber pater, Diane, les Lares, à la déesse Mefitis.

Les cultes de l'Orient hellénistique sont apparus soit sur la côte d'Apulie, soit le long des grandes voies romaines de l'intérieur, beaucoup plus rarement dans les anciennes colonies grecques. Deux centres urbains jouent ici le principal rôle, Blindes et Venouse. Dans cette dernière ville, des traces curieuses de judaïsme ont été constatées.

Ainsi l'on reconnaît, en Italie méridionale, la superposition dans le temps et la juxtaposition dans l'espace de trois groupes de cultes : les cultes grecs, apportés par la colonisation ; les cultes romains et italiques, apportés par la conquête et l'autorité politique; les cultes orientaux, introduits grâce aux multiples relations de l'Italie avec l'Asie antérieure et l’Égypte.

 

 

 

Ritualisme et superstition des Gréco-Romains

Par Numa Denis Fustel de Coulange

La Cité antique, étude sur le culte, le droit, les institutions de la Grèce et de Rome, 1872.

 

Par ses dogmes et par ses pratiques [la religion] donna au Romain et au Grec une certaine manière de penser et d'agir et de certaines habitudes dont ils ne purent de longtemps se défaire. Elle montrait à l'homme des dieux partout, dieux petits, dieux facilement irritables et malveillants. Elle écrasait l'homme sous la crainte d'avoir toujours des dieux contre soi et ne lui laissait aucune liberté dans ses actes.

Il faut voir quelle place la religion occupe dans la vie d'un Romain. Sa maison est pour lui ce qu'est pour nous un temple ; il y trouve son culte et ses dieux. C'est un dieu que son foyer ; les murs, les portes, le seuil sont des dieux ; les bornes qui entourent son champ sont encore des dieux. Le tombeau est un autel, et ses ancêtres sont des êtres divins.

Chacune de ses actions de chaque jour est un rite ; toute sa journée appartient à sa religion. Le matin et le soir il invoque son foyer, ses pénates, ses ancêtres ; en sortant de sa maison, en y rentrant, il leur adresse une prière. Chaque repas est un acte religieux qu'il partage avec ses divinités domestiques. La naissance, l'initiation, la prise de la toge, le mariage et les anniversaires de tous ces événements sont les actes solennels de son culte.

Il sort de chez lui et ne peut presque faire un pas sans rencontrer un objet sacré ; ou c'est une chapelle, ou c'est un lieu jadis frappé de la foudre, ou c'est un tombeau ; tantôt il faut qu'il se recueille et prononce une prière, tantôt il doit détourner les yeux et se couvrir le visage pour éviter la vue d'un objet funeste.
Chaque jour il sacrifie dans sa maison, chaque mois dans sa curie, plusieurs fois par an dans sa gens ou dans sa tribu. Par-dessus tous ces dieux, il doit encore un culte à ceux de la cité. Il y a dans Rome plus de dieux que de citoyens.

Il fait des sacrifices pour remercier les dieux ; il en fait d'autres, et en plus grand nombre, pour apaiser leur colère. Un jour il figure dans une procession en dansant suivant un rythme ancien au son de la flûte sacrée. Un autre jour il conduit des chars dans lesquels sont couchées les statues des divinités. Une autre fois c'est un lectisternium ; une table est dressée dans une rue et chargée de mets ; sur des lits sont couchées les statues des dieux, et chaque Romain passe en s'inclinant, une couronne sur la tête et une branche de laurier à la main.

Il a une fête pour les semailles, une pour la moisson, une pour la taille de la vigne. Avant que le blé soit venu en épi, il a fait plus de dix sacrifices et invoqué une dizaine de divinités particulières pour le succès de sa récolte. Il a surtout un grand nombre de fêtes pour les morts, parce qu'il a peur d'eux.

Il ne sort jamais de chez lui sans regarder s'il ne paraît pas quelque oiseau de mauvais augure. IL y a des mots qu'il n'ose prononcer de sa vie. Forme-t-il quelque désir, il inscrit son vœu sur une tablette qu'il dépose aux pieds de la statue d'un dieu.

A tout moment il consulte les dieux et veut savoir leur volonté. Il trouve toutes ses résolutions dans les entrailles des victimes, dans le vol des oiseaux, dans les avis de la foudre. L'annonce d'une pluie de sang ou d'un bœuf qui a parlé, le trouble et le fait trembler ; il ne sera tranquille que lorsqu'une cérémonie expiatoire l'aura mis en paix avec les dieux.

Il ne sort de sa maison que du pied droit. Il ne se fait couper les cheveux que pendant la pleine lune. Il porte sur lui des amulettes. Il couvre les murs de sa maison d'inscriptions magiques contre l'incendie. Il sait des formules pour éviter la maladie, et d'autres pour la guérir ; mais il faut les répéter vingt-sept fois et cracher à chaque fois d'une certaine façon.

Il ne délibère pas au Sénat si les victimes n'ont pas donné les signes favorables. II quitte l'assemblée du peuple s'il a entendu le cri d'une souris. Il renonce aux desseins les mieux arrêtés s'il a aperçu un mauvais présage ou si une parole funeste a frappé son oreille. II est brave au combat, mais à condition que les auspices lui assurent la victoire.

Ce Romain que nous présentons ici n'est pas l'homme du peuple, l'homme à l'esprit faible que la misère et l'ignorance retiennent dans la superstition. Nous parlons du patricien, de l'homme noble, puissant et riche. Ce patricien est tour à tour guerrier, magistrat, consul, agriculteur, commerçant ; mais partout et toujours il est prêtre et sa pensée est fixée sur les dieux. Patriotisme, amour de la gloire, amour de l'or, si puissants que soient ces sentiments sur son âme, la crainte des dieux domine tout. Horace a dit le mot le plus vrai sur le Romain :

Dis te minorem quod geris, imperas.

« C'est agir par soumission aux dieux qui assure ton empire »

La RELIGION ROMAINE
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