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Arya-Dharma, l'héritage des spiritualités premières

La SPIRITUALITÉ GRÉCO-BOUDDHISTE

La SPIRITUALITÉ GRÉCO-BOUDDHISTE
La SPIRITUALITÉ GRÉCO-BOUDDHISTE
La SPIRITUALITÉ GRÉCO-BOUDDHISTE

La culture gréco-bouddhique

Suite au passage d'Alexandre le Grand, le Gandhara devient dès -327 un immense territoire dédié à la propagation des idées bouddhistes, dont la métaphysique était en parfaite adéquation avec la philosophie naissante des Grecs. Tout en se basant sur un panthéon commun, qui associait alternativement Héraclès ou Dionysos à Krishna, Indra ou Shiva, le bouddhisme et l'hellénisme, se développèrent conjointement.

Du reste, les preuves directes de pénétration mutuelle des deux religions ne manquent pas. Il fallait que la vénération des philosophes alexandrins envers la religion bouddhique fût bien profonde pour que, au milieu du 3e siècle, Plotin accompagnât l’armée de Gordien contre les Parthes, dans l’espoir, d’ailleurs déçu, d’aller trouver dans l’Orient sacré des frères en la foi. L’analogie surprenante de costumes et de rites que l’on constate entre le culte catholique romain et celui des bouddhistes du Tibet serait également tout à fait inexplicable si l’on n’admettait pas une origine commune à ces deux héritages dont les formes sont presque identiques.

É. Reclus, L’Homme et la Terre, tome 3.

L'inscription de Kinéas (v. -300), retrouvée dans le Gandhara, en actuel Afghanistan, nous présente une rhétorique à la fois emprunte des philosophies grecque et bouddhiste :

 

« Dans l'enfance, sois modeste.
Dans la jeunesse, sois robuste.
À l'âge mûr, sois juste.
Dans la vieillesse, sois judicieux.
À l'heure de la mort, sois sans affliction… »

 

Ou encore :

« Bénis tout le monde
Sois philosophe. »

 

Ces sentences se retrouvent 4 000 km plus à l'ouest, gravées cette fois-ci sur les murs du temple d’Apollon à Delphes (Sosiades, Sentences des Sept Sages légendaires). Les sept sages de la Grèce, dont la liste incluait Solon ou Thalès, trouvent un écho en pays aryen, avec les Saptarishis, les sept rishis gardiens et créateurs de la vie et des Vedas, et si souvent mentionnés dans la littérature sacrée.

Une maxime extraite des Sept Sages, propose la synthèse de l'esprit grec et indien :

« Obéis à la Divinité.
Obéis à la Loi.
Obéis à la légitimité.
Respecte tes parents
Acquiers les connaissances en étudiant.
Après avoir ouï, réfléchi.
Connais-toi toi-même
Entraîne ton esprit
Ayant l'intention de te marier, choisis le temps pour le faire.
Sois bienveillant avec les animaux.
Sois bienveillant envers tout le monde
Couronne tes ancêtres
Respecte ton aîné. »

 

Ces similitudes entre culture grecque et bouddhiste ne doivent pas nous étonner outre mesure. Au cours du premier millénaire avant notre ère, les habitants de l'Inde considéraient les Grecs comme un peuple voisin ; les Aryens de la vallée du Gange leur donnent alors le nom de Yonas, ou Yonakas, déformation locale de Ioniens, une des colonies grecques d'Asie mineure les plus rayonnantes et prospères. Si les Indiens étaient habitués à la présence des Grecs à leurs frontières, il ne s'agissait donc pas de Grecs de la péninsule éponyme, mais plutôt de Grecs vivant dans les colonies hellènes installées tout à travers l'Eurasie, du Pont Euxin à la Russie méridionale, soit tout au long de la frontière nord des territoires de l’empire perse et des royaumes aryens himalayens.

Strabon (v. -60) rapporte la rencontre entre un intellectuel hellène et un sadhu, lors du passage d'Alexandre en Inde. Cet échange fut plein de respect, de curiosité et de bienveillance. Celui qu'on appelle alors gymnosophiste, et qui est vraisemblablement un sadhu ou un ascète jaïn, avoue lui-même partager les idées des philosophes grecs (même s'il regrette qu’ils n’aillent pas au bout de leur raisonnement).

C'est l'émissaire Onésicrite (-360 à -260) qui va au-devant du sage indien Mandanis. Ce dernier jouit d'une telle sagesse que sa réputation était parvenue jusqu'au général macédonien.

L'Indien expose alors ses croyances, qui sont celles du jaïnisme ou du bouddhisme (végétarisme, transmigration, immortalités de l'âme). Onésicrite, élève de Diogène de Sinope, est alors un philosophe reconnu. Il fait partie de la cour du plus grand conquérant de son temps, il aurait donc pu se moquer ou prendre de haut son homologue indien, or, c'est bien lui qui va prendre une leçon lors de cette rencontre.

Son discours fini, Mandanis demanda à Onésicrite si l'on entendait en Grèce de semblables enseignements. Onésicrite lui répondit qu'il en avait recueilli de semblables de la bouche de Pythagore, qui enseignait même à s'abstenir de rien manger qui eût eu vie, de la bouche de Socrate également, voire de celle de Diogène. L'Indien déclara qu'en général les philosophes grecs lui paraissaient penser sagement, mais qu'ils avaient un tort, celui de faire passer la loi et la coutume avant la nature ; qu'autrement ils ne rougiraient pas de faire comme lui, d'aller nus et de vivre aussi simplement.

Strabon, 15, 1.

Après le passage d'Alexandre, et le maintien de son empire par ses successeurs, ces populations grecques s'installeront plus au sud, dans les régions indo-perses de la Bactriane et du Penjab, jusqu'au sud de la péninsule indienne en pays tamoul, une contrée que visitera l'émissaire grec Mégasthène (v. -350 à -290). Né en Bactriane, il travaillait pour un roi grec qui régnait sur une partie de l'Inde du Nord.

« Loin de leur pays natal, des Grecs vivent là, auprès de ces adeptes du bouddhisme. Alors que s'édifient en grand nombre autour d'eux les stupas, qui attirent les foules, ils sont forcément confrontés aux témoignages de piété suscités par ces monuments. Ils assistent d'autant mieux à l'essor du bouddhisme qu'ils semblent communiquer aisément avec les indigènes. Ils comprennent probablement le gandhari, indispensable dans la vie quotidienne, et ont également une assez bonne pratique de l'araméen […] Dans ces régions aux confins de l'Inde et de l'Iran, des Grecs, des Indiens et des Iraniens vivent apparemment en parfaite intelligence. Les Grecs bien intégrés dans ce milieu étranger, sans doute mariés à des indigènes, ont du bouddhisme une expérience vécue. » M.-P. Delaygue, Les Grecs connaissent-ils les religions de l'Inde à l'époque hellénistique ?

Philosophies grecques et bouddhistes naquirent au même moment (au milieu du premier millénaire av. J.-C.) et du même désir : dépasser la superstition du polythéisme panthéiste, pour développer une mystique de l'être, une introspection, qui réfute la vénération des idoles tout autant que la pratique obsessive des rituels.

Bouddha (v. -563 à -480) comme Socrate (v. -470 à -399), sont les fruits de civilisations ayant atteint leur maturité, leur zénith pourrait-on dire, et qui cherchent un moyen de dépasser les rudimentaires divinités pour ériger en modèle la raison. La justice n'est alors plus dictée par les dieux, mais par le libre arbitre que chacun exerce sur sa propre existence. De même, Socrate comme Bouddha étaient obsédés par la mort, tout en refusant de laisser aux divinités seules le pouvoir d'échapper à celle-ci. Tout comme Socrate exhortait ses disciples à se connaître eux-mêmes, Bouddha leur enjoignait de trouver en eux le salut à leur souffrance, et non en des divinités extérieures (elles-mêmes assujetties à la force des éléments, au destin, à l’existence, et donc à la mort).

En somme, philosophie grecque comme bouddhisme, ont pris racine dans le même terreau culturel indo-européen, tout en proposant les mêmes alternatives aux superstitions religieuses abrutissantes des polythéismes grecs et védiques, en plaçant la raison au départ de toute vérité.

Lors du sermon de Sarnath, fondateur de la doctrine bouddhiste, c'est à travers un véritable cheminement intellectuel proche de la maïeutique socratique, à base de questions suivies de réponses, que Siddhartha Gotama Shakya enseigna à ses disciples comment se libérer de l'emprise de leur souffrance. Dans le bouddhisme comme en philosophie, il n'existe pas de vérité, si ce n'est celle qui émerge du cheminement intellectuel d'un individu qui est soumis à la raison.

La généalogie des religions indo-européennes

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