25 Novembre 2023
Extrait de : A. Cotterell, Le Premier empereur (trad. S. et G. Trope), Chêne / Hachette, 1981
« Confucius eut une enfance pauvre. Son père mourut alors qu'il n'avait que trois ans et sa mère, de condition fort modeste, fut obligée de l'élever seule. Ses études n'en furent pas moins brillantes. Grâce au patronage d'une famille noble de l'État de Lu, il put fréquenter l'une des écoles privées qui étaient alors réservées à l'éducation des jeunes nobles. Comme il descendait, selon la tradition, de l'ancienne dynastie des Shang, il n'est pas impossible que ses origines aient compté pour beaucoup dans son admission dans cet établissement.
Par la suite, ses protecteurs ne réussirent pas cependant à assurer son avancement au service du gouvernement. Sa carrière administrative fut peu spectaculaire et de courte durée. Il remplit successivement les modestes fonctions d'intendant des greniers d'État et de surveillant des pâturages d'État. Son inaptitude à s'élever dans la hiérarchie s'explique sans doute par son manque de disposition à la flatterie et aux intrigues. De tempérament, c'était un enseignant plus qu'un homme politique. Il pensait qu'il lui serait plus facile d'étendre son influence sur les cours féodales grâce à des disciples bien placés auprès de princes qui sauraient choisir leurs dignitaires en fonction de leurs qualités morales et non de leur caste.
Les étudiants de Confucius n'étaient pas sélectionnés selon des critères de naissance. Pour être admis dans son école, il suffisait de mener une vie vertueuse, de faire preuve d'intelligence et de manifester une ferme volonté de s'instruire. Son enseignement reposait essentiellement sur l'héritage spirituel des grands souverains antiques, ces rois et ces princes qui, par leur bienveillance (jen) et leur droiture (li), avaient assuré une existence idéale à leurs sujets. Le fait que le signe graphique li exprimant la droiture puisse également désigner les « rites » est très significatif du sens profond que Confucius attribuait à ce terme. L'idéogramme représente en effet un vase sacrificiel contenant des objets précieux présentés en offrande aux esprits des ancêtres. Car ce culte des ancêtres, au cérémonial duquel la philosophie de Confucius confère la valeur d'un code moral, constituait le point de convergence de deux mondes, le spirituel et le temporel. C'est par sa seule pratique que le descendant dévoué, fidèle aux valeurs traditionnelles, pouvait attirer sur lui les bienfaits du Ciel.
L'attitude de Confucius à l'égard de la religion était essentiellement pragmatique. Je respecte les êtres spirituels, disait-il à ses étudiants, mais je m'en tiens à l'écart. » Ce n'était là ni l'opinion d'un rationaliste convaincu ni celle d'un sceptique, mais la simple constatation que le royaume des cieux dépassait de loin toute compréhension humaine. Il constituait un mystère dont la réponse ne se trouvait ni dans le port des vêtements sacerdotaux ni dans l'observation des étoiles ni même dans les gestes rituels. De même qu'il convenait de se montrer très prudent lorsque l'on interprétait les phénomènes naturels, tels que les tremblements de terre ou les inondations, comme l'expression de la volonté du Ciel. »
CONFUCIUS (551-479 av. J.C.) : l'instituteur de l'empire du milieu - Une vie, une œuvre [1994]
Confucius, l'instituteur de l'empire du milieu. Par Antoine Perraud et Isabelle Yhuel. Émission diffusée sur France Culture le 17.08.1994. Cette émission propose de découvrir la pensée de Conf...