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Arya-Dharma, l'héritage des spiritualités premières

Le CULTE d'ORPHÉE

 

 

Orphée et l'orphisme

Avant Pythagore, Solon, Socrate, Platon, que l'on sait avec certitude être des personnalités historiques, fut un certain Orphée. Comme Lycurgue ou Cadmos, Orphée fait partie de ces personnages semi-légendaires à propos desquels les Anciens Grecs racontèrent tant d'histoires extraordinaires, que de personnages illustres et influents, ils devinrent des mythes. On retrouve le même phénomène avec les rois d'Asie Mineure comme Midas ou Crésus.

L'orphisme apparaît dans la culture grecque vers le 6e siècle avant notre ère, mais on s'accorde à penser que si un maître spirituel nommé Orphée n’eut jamais existé, il dut avoir vécu quelques siècles avant que son courant de pensée ne devienne populaire dans les brillantes cités des civilisations méditerranéennes. Certains auteurs situent donc la vie d'Orphée vers -900, une date qui rejoint celle de la rédaction de l'Atharva-Veda, du Sama-Veda et du Yajur-Veda.

Présenté comme originaire de Thrace (actuelles Roumanie et Bulgarie), Orphée serait donc l'un des plus anciens prophètes ou artistes européens jamais enregistré par l'Histoire. Avant que ne rayonnent le bassin méditerranéen et les civilisations gréco-romaines et sémites (Phéniciens), le centre industrieux et artisanal de l'Europe ainsi que son cœur artistique et culturel étaient en effet situés plus au nord, dans une bande de terre qui longeait les versants nord des chaînes balkaniques et alpines, dans un arc de plaines reliant le Danemark à la forêt bavaroise et à l'embouchure du Danube, au nord de la Thrace.

« D'après les orphiques, leur doctrine et leur culte étaient d'origine thrace : c'est en Thrace qu'avait vécu Orphée, et c'est là qu'il avait institué ses mystères. Cette tradition s'accorde pleinement avec celle qui faisait venir de Thrace les mystères bachiques, que l'on identifiait souvent avec les mystères orphiques, et dont la fondation ou la transformation étaient attribuées également à Orphée. Une autre légende rattachait l'orphisme au culte des Cabires [divinités associées aux îles de Samothrace, Lemnos et Imbros]. Orphée lui-même avait été initié aux mystères de Samothrace. Au milieu d'une tempête, les Argonautes, sur le conseil de l'aède, firent vœu de relâcher dans cette île et de s'y faire initier. Aussitôt s'apaisa l'orage. Jason et ses compagnons tinrent leur promesse. Ils abordèrent à Samothrace ; conduits par Orphée, qui avait précédemment reçu l'initiation, ils se rendirent au sanctuaire des Cabires, et furent initiés à leur tour. D'après cet ensemble de faits et de légendes, on ne peut douter que la Thrace ait joué, comme l’Égypte, un rôle important dans la genèse de l'orphisme. D'autres traditions mettaient Orphée en rapports avec la Phrygie, notamment avec le roi Midas ; bien des gens pensaient que le culte de Zagreus était venu de Phrygie, et le grand dieu des Orphiques a été souvent confondu avec le Sabazios des Phrygiens. On cherchait aussi en Crète l'origine de l'omophagie et du mythe de Zagreus, que l'on identifiait avec le Zeus de l'Ida. Ajoutons que l'orphisme s'est développé en partie sous l'influence de Pythagore et de son école, puisque bien des ouvrages orphiques étaient l’œuvre de Pythagoriciens. Enfin, s'il fallait en croire les chrétiens des premiers siècles, Orphée lui-même aurait fait beaucoup d'emprunts aux livres de Moïse. » Article Orphée, Ch. Daremberg et E. Saglio, Dictionnaire des Antiquités grecques et romaines.

 

Dressons à présent un portrait du poète et prêtre thrace en compilant les témoignages des auteurs antiques, pour qui la réalité historique d’Orphée ne faisait aucun doute.

On remarque que celui-ci possède plus d'une corde à sa lyre. Orphée est en effet grand prêtre, médecin (la médecine étant associée à Apollon), spécialiste des herbes médicinales, diététicien, apôtre du végétarisme, pionnier de l'agriculture, devin des augures, magicien, musicien, inventeur de l'écriture et enfin astrologue.

C'est surtout pour ses qualités de musiciens et de chanteur que nous le connaissons. On dit que grâce à son art, il charmait les animaux sauvages, les poissons, les oiseaux, animait les arbres et les pierres, et pouvait même faire dériver le cours des rivières. Disciple d'Apollon et de Dionysos, il aurait fondé de nombreuses congrégations mystiques dévouées à leurs mystères.

Orphée aurait reçu ses dons du dieu solaire Apollon. Le dieu lui aurait aussi offert une lyre. Créée par Hermès avec sept cordes, Orphée ajouta deux nouvelles cordes à cet instrument.

Il serait tentant de rapprocher Orphée du mythe indien de Narada : Narada est le messager des dieux, l'être le plus sage de la création, l'un des fils préférés de Brahma, mais aussi l'une des premières incarnations de Vishnou. Il est le maître absolu du logos, et cette qualité le rend capable de gagner n'importe quel débat (tout comme Orphée réussit l'exploit de persuader Hadès et Perséphone de le laisser repartir des enfers avec sa femme). Enfin, tout comme Orphée est l'inventeur d'une lyre sophistiquée, Narada est l'inventeur de la vina, une sorte de sitar.

Selon son mythe, Orphée est le fils de Œagre, roi de Thrace et de Calliope, muse de la poésie épique. Son mythe est avant tout initiatique :

« Orphée commença par s’instruire de lui-même des progrès de la civilisation chez les peuples étrangers qui passaient à cet égard pour l’avoir portée le plus loin. L’Égyptien, qui se croyait né du sol qu’il habitait, l’appela le premier dans son sein. Il vit, en abordant au Delta, un peuple triplement abâtardi par l’inertie de son ciel, par le despotisme de ses rois et par l’abjection de ses dieux : cependant il sentit que, pour juger une monarchie entière, il ne fallait pas s’arrêter à une pareille écorce. Il était fils de roi, et à ce titre aucune porte ne lui était fermée. Il obtint des Pharaons la permission de visiter l’intérieur des pyramides ; et là, il s’instruisit en silence des éléments des connaissances humaines qu’Hermès y avait gravés dans la langue mystérieuse des hiéroglyphes. » J.-B.-C. de Lisle de Sales. Vie d'Orphée.

Une fois son initiation égyptienne accomplie, Orphée rejoint l'expédition des Argonautes menée par Jason. Avec eux il rejoint les rives orientales de la mer Noire et la Colchide. L'épopée des Argonautes à la recherche de la Toison d'or est un des récits les plus populaires de l'Antiquité. On recense une dizaine de versions différentes, dont l'une d'elles est attribuée à Orphée lui-même. Dans ce voyage, Orphée fait figure de grand prêtre : il initie les argonautes aux mystères de Samothrace et chante les louanges à Artémis, protectrice des navires. Son rôle est limité, bien qu'indispensable. Alors que Jason, Héraclès et les autres Argonautes sont embarqués en mer, une violente tempête éclate, qui aurait pu tous les faire périr, mais Orphée joua de la lyre et chanta une prière pour calmer la mer.

De retour de son voyage en Colchide, Orphée rencontre celle qui sera son grand amour, la nymphe Eurydice. Malheureusement, le jour de leurs noces, Eurydice se fait mordre par un serpent et en meurt. Orphée entame alors une série de chants en vue de retrouver sa femme, afin de la ressusciter.

C'est d'abord pour les dieux de l'Olympe qu'il chante, pour obtenir leurs bénédictions. Sur leur conseil, il se dirige vers l'enfer pour y chercher sa femme. L'entrée est barrée par Cerbère, le monstrueux chien à trois têtes. Cela n'est rien : Orphée endort le molosse en jouant de sa lyre. En disciple fidèle, le Thrace entre en enfer en suivant l’exemple de son dieu Dionysos, ne doutant pas un seul instant qu'il en reviendrait sain et sauf.

Arrivé devant Hadès et Perséphone, il chante encore, et si bien, que l'émotion submerge ces ténébreux maîtres du monde souterrain, qui sans plus de difficultés acceptèrent sa requête. Eurydice, qui lui avait été prise avant l'heure, lui fut donc rendue et tous les deux s'en allèrent rejoindre la vie. Une condition avait cependant été imposée par Hadès à Orphée et Eurydice : celle de ne pas regarder derrière eux alors qu'ils s'en retourneraient.

Eurydice étant à l'état de fantôme, Orphée joua de la lyre afin qu'elle le suive vers la sortie. Mais alors que la lumière du jour apparaissait, Orphée fut saisi d'un doute fatal : et si Hadès lui avait menti, et si Eurydice ne l’avait pas suivi ? Il s’arrêta un instant, cessa de jouer et tendit l'oreille. Aucun bruit. Il se retourna et irrémédiablement perdit à jamais Eurydice.

Avec Dionysos et Héraclès, Orphée est une des rares figures de la mythologie grecque à avoir pu ressortir des enfers. L'exploit d'Orphée est encore augmenté par le fait que le Thrace n'est qu'un mortel, tandis qu'Héraclès, fils de Zeus, n'entra pas vraiment en enfer mais se contenta de capturer son gardien Cerbère. Quant au maître spirituel d'Orphée, Dionysos, il n'eut aucun effort à fournir pour renaître à la vie, étant lui-même un immortel ayant pleinement conscience de sa véritable nature.

Traumatisé par la seconde perte de sa femme, incapable de l'oublier, Orphée vécut ensuite dans le désespoir le plus total. Il se détourna des femmes et s'adonna à la pédérastie, ce qui eut pour effet de rendre jalouses celles qui subissaient toujours son charme.

Il meurt assassiné par des bacchantes outragées d'avoir été dédaignées. Sa tête coupée continue à chanter alors qu’elle est jetée dans la mer. Elle s'échoue enfin sur une plage d'Asie Mineure aux pieds de Dionysos, qui s'en revient juste de sa campagne indienne. Constatant que son plus fidèle disciple avait été massacré, Dionysos entre dans une colère folle et venge son disciple en transformant ses meurtrières en arbres.

Ce mythe de l'heureuse descente en enfer, puis de sa malheureuse remontée, est de nos jours le plus célèbre de la mythologie européenne. Mais ce que l'on pense être le mythe d’Orphée est en fait un mythe tout à fait universel, on le retrouve dans le tout premier ouvrage littéraire que l'Histoire enregistra : l’Épopée de Gilgamesh, composée par écrit vers 1800 avant notre ère mais dont la composition orale est bien plus ancienne. Plusieurs millénaires plus tard, George Dumézil retrouva la trace de ce mythe dans le folklore ossète (dans le conte de Soslan au Pays des Morts).

Au moment où, franchissant l’extrême limite de la mer, ils parvinrent aux eaux de la mort, le passeur fit à Gilgamesh cette recommandation : « Prends garde surtout de ne point toucher avec ta main les eaux de la mort. Accomplis, cependant, la cérémonie accoutumée, conformément au rite prescrit... » Ce dont le héros s’acquitta ponctuellement, suivant les indications du pilote.

Gilgamesh, trad. Sauveplane.

La mythologie et la cosmogonie orphique demeurent très mystérieuses. Dans Les théogonies orphiques et le papyrus de Derveni, un article publié dans la Revue de l'histoire des religions (tome 202, n°4, 1985), Luc Brisson propose un résumé des Discours sacrés en 24 rhapsodies, l'œuvre perdue de la cosmogonie orphique (attribuée à Orphée lui-même) :

« Étant toutes choses et possédant les deux sexes, c'est avec la partie féminine de lui-même que Phanès [l'Être primordial] se trouve en relation de toutes les façons possibles. Or, c'est à la Nuit, sa fille-épouse, qui est aussi sa mère, que Phanès transmet le sceptre de la souveraineté, pour le second règne. Le troisième règne appartient à Ouranos couplé avec Gaïa, qu'enfante la Nuit. Puis vient l'histoire de Kronos, couplé avec Rhéa, et qui châtre son père, Ouranos, pour les mêmes raisons et de la même façon que dans la théogonie d'Hésiode. Mais, avec Zeus, la théogonie orphique s'écarte de celle d'Hésiode et prend un nouveau départ. En effet, Zeus avale Phanès. Ainsi devenu principe primordial, il reconstitue les dieux et constitue le monde. Et, puisque maintenant, il s'identifie à Phanès, cet être bisexué entretient avec Déméter les mêmes rapports que Phanès avec la Nuit. Comme mère de Zeus, Déméter s'appelle Rhéa, et comme son épouse-fille, elle s'appelle Korè. C'est en effet à Korè que s'unit Zeus pour engendrer Dionysos, à qui, alors qu'il n'est encore qu'un enfant, il transmet la souveraineté. Mais, jaloux, les Titans, avec des jouets, attirent Dionysos dans un guet-apens. Ils le tuent, le découpent en morceaux et, après avoir mis en œuvre une cuisine qui inverse celle du sacrifice traditionnel en Grèce ancienne, le mangent. Pour les punir, Zeus les frappe de sa foudre qui les brûle. Et, de la suie que dépose la fumée dégagée par cette combustion, naissent les hommes dont la constitution est double. Une part de leur être vient de Dionysos, et une autre des Titans qui ont ingurgité l'enfant. Dans cette perspective, les hommes doivent avoir pour but de s'identifier le plus possible à Dionysos, en se débarrassant de la part des Titans qui est en eux. Et, comme Dionysos est aussi appelé Zeus, Eriképaios, Métis, Protogonos, Éros et Phanès, tout peut recommencer. »

Insistons sur la différence de nature qui existe le culte dionysiaque classique (gréco-mycénien) et le culte dionysiaque orphique (thraço-oriental) :

« C’est surtout de la nature de l’âme et de sa destinée après la mort que s’inquiétaient les poètes théologiens réunis sous l’invocation d’Orphée, et c’est d’ordinaire au culte de Bacchus qu’ils se consacraient. Mais leur Bacchus n’était point le Dionysos populaire, le dieu du corsos et du dithyrambe. C’était une divinité d’un ordre plus sévère, et en qui se personnifiaient à la fois les joies et les chagrins de la vie. Dionysos Zagreus, comme ils le nommaient, le chasseur des âmes, suivant le sens de son surnom, participait, selon eux, de la puissance de Hadès ou du roi des enfers. C’était lui qui présidait à la purification de notre âme dans cette vie, et qui assurait à nos mérites l’immortalité avec ses châtiments ou ses récompensés. Le culte particulier qu’ils rendaient à ce dieu n’avait rien du caractère enthousiaste et désordonné qui signalait les fêtes lénéennes et dionysiaques. Les orphiques mettaient la décence extérieure au nombre des devoirs ; ils visaient à une sorte d’ascétisme, et leurs habits de lin blanc étaient des symboles de cette pureté morale où aspirait leur âme. » A. Pierron, Histoire de la littérature grecque.

Nous avons qualifié l'orphisme de culte thraço-oriental, car des correspondances peuvent être établies entre l'orphisme et les traditions mystiques orientales ; en particulier avec le mazdéisme. Mentionnons :

- La très forte dualité entre le Bien et le Mal : l'âme est prisonnière de la matière. Le mythe de la souillure originelle est très présent dans le mazdéisme et dans l'orphisme. L'orphisme propose alors de purifier l'homme pour ne conserver en lui que la part divine de Dionysos.

- La présence du mythe de l’œuf primordial, mais à des moments différents des cosmogonies respectives. L’œuf est initial dans l'orphisme : il donne naissance à Phanès, le premier être. Dans le mazdéisme, l’œuf est une création de la seconde génération céleste, celle d'Ahura-Mazda et Ahriman. C'est Ahura-Mazda qui créa l’œuf, et non Zurvan.

- Zurvan et Phanès sont les premières divinités à émerger du chaos de leur cosmogonie respective. Ces deux figures sont alors associées à une déesse de la nuit (ou du chaos), avec laquelle ils donneront naissance à des dieux créateurs. Il s'agit de Khvashizagh, la déesse mazdéenne de l’éther et de Nyx, la déesse orphique du chaos et de la nuit.

 

Il existe aussi de nombreuses correspondances avec l'hindouisme :

Dans le shivaïsme, Shiva est l'Ishvara, c’est-à-dire la toile sur laquelle prend forme l'Univers ; le Dionysos orphique est lui aussi le support de la création.

Un mythe de démembrement est présent dans les cosmogonies orphique et indienne. Dans le védisme c'est Brahma-Purusha qui est sacrifié par les dévas. Dans l'orphisme c'est Dionysos qui est massacré par des titans. Marcel Detienne nous renseigne très justement sur le sens de ce célèbre épisode mythologique : « Dans le sacrifice ordinaire, l'usage est de mener paisiblement la victime, un animal domestique, jusqu'à l'emplacement choisi pour le sacrifice, et, là, de chercher à obtenir son consentement, soit en l'aspergeant au cours de la libation, soit en lui versant dans l'oreille des grains d'orge et de blé. L'animal est ainsi persuadé de secouer la tête d'une certaine manière où les Grecs reconnaissent une forme d'assentiment. C'est le même but que visent les Titans en offrant à Dionysos de merveilleux jouets : poupées articulées, pommes d'or, rhombe, toupie et, enfin, le miroir où l'enfant découvre son image et se perd à le contempler. Autant de ruses pour frapper la victime sans qu'elle s'en aperçoive, sans qu'elle se débatte ou lance un cri de mauvais augure » Dionysos mis à mort.

Observons aussi :

- La présence au début des deux cosm« Au moment où, franchissant l’extrême limite de la mer, ils parvinrent aux eaux de la mort, le passeur fit à Gilgamesh cette recommandation : « Prends garde surtout de ne point toucher avec ta main les eaux de la mort. Accomplis, cependant, la cérémonie accoutumée, conformément au rite prescrit... » Ce dont le héros s’acquitta ponctuellement, suivant les indications du pilote. » Trad. Sauveplane.ogonies d'un être androgyne doté des deux sexes. Le Phanès orphique et hermaphrodite est alors comparable au Shiva Ardhanarishvara, composé d'un côté par Shiva, et d'un autre côté par sa compagne la déesse-mère Parvati.

- La présence du mythe de l’œuf primordial.

- Le rôle central du soleil lors des rituels orphiques et védiques. L'orphisme est en effet un culte apollinien de tradition hyperboréenne.

Enfin, l'orphisme et l'hindouisme partagent un régime strictement végétarien, et pour les deux doctrines, les rites d'initiation sont essentiels.

 

L'orphisme peut aussi être rapproché du jaïnisme, comme en témoignent ces quelques points communs concernant :

- La transmigration des âmes.

- La responsabilité et la liberté individuelle, le choix de l'initiation pour trouver le salut plutôt que par l’accomplissement des rituels de castes.

- La possibilité de délivrance. Le salut est possible.

- L'exigence de pureté (d'où le port du vêtement blanc).

- Le respect de toute forme de vie (ahimsa, non-violence, végétarisme).

- Le refus de l'exploitation des animaux. Apulée (v. 125 - 170), dans son Apologie, nous apprend que l'orphisme défendait l'utilisation de la laine. Par ailleurs, de nombreuses traditions indiennes interdisent l'usage d'objets en cuir ou le port de vêtement dans cette matière, afin de ne pas faire de la vache, ni de ses souffrances, un objet de commerce. Il est donc possible que l'interdiction de porter la laine trouve sa justification dans le refus de tondre les moutons.

- Le régime végétarien et la conception des aliments « vivants » ou « morts ».

- La conception atomiste de la matière.

- L'ascétisme, qui est un mode de vie hautement valorisé par les deux doctrines.

- La maîtrise de soi. Indispensable, elle est la condition du salut, c'est-à-dire de la purification de l'âme. Les doctrines orphiques et jaïnes enseignent la maîtrise des désirs et du sommeil.

 

Mentionnons encore quelques correspondances entre la tradition orphique et pythagoricienne, qui elle-même se déclarait héritière de l'orphisme :

- L'importance des rites de purification.

- Le rôle essentiel d'une initiation de type ésotérique, hermétique et secrète.

- Une même filiation apollinienne hyperboréenne. L'arrivée de l'orphisme en Grèce correspond à la vague des sorciers et sages scythes et hyperboréens, qui tels Abaris ou Aristéas, s'en vinrent du Caucase et du Pont pour s'établir en Grèce et dans ses colonies de la Méditerranée pour y fonder des sectes apolliniennes. L'orphisme est donc associé au culte d'Apollon Hyperboréen, c’est-à-dire au culte du soleil source des arts, des sciences, de la sagesse et de la beauté.

 

Quelle que soit son origine, l'orphisme est donc une doctrine et une mythologie étrangère à la Grèce. Qu'elle soit venue d’Égypte, de Perse, de Thrace ou même d'Hyperborée, elle fut perçue par les Grecs comme exotique et séduisante, mais aussi potentiellement dangereuse. En conséquence, sa place ne fut jamais que marginale, et ce culte fut réservé à une élite d'initiés, que l'on pourrait appeler des « convertis ».

L’influence de l’orphisme se fit pourtant sentir en Europe occidentale jusqu'au milieu du premier millénaire, avec un fort regain d’intérêt à la Renaissance. Orphée fut ensuite le mythe favori des poètes du 19e et 20e siècle, en particulier à travers la récupération de son mythe sombre et romantique par le courant symboliste puis surréaliste. Sa descente en enfer fut maintes fois réécrite et représentée au théâtre comme au cinéma. C'est ainsi qu'au fil des millénaires, de maître spirituel inventeur d'une doctrine mystique, Orphée est devenu un mythe simplement littéraire. Le mythe d'Orphée s'est d'ailleurs cristallisé autour de sa descente aux enfers, même si, à l'origine, ce passage évocateur ne devait être qu'un des nombreux mythes associés à cette tradition.

Le CULTE d'ORPHÉE
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