13 Janvier 2022
LES LAMENTATIONS D'IPOU-OUR
Le chef-d’œuvre de la décadence égyptienne
Œuvre du scribe et vizir Ipou-Our, ce texte a été composé en écriture cursive durant la 19e dynastie (1292 à 1189 av. J.-C.) Il s'agit cependant d'une copie dont les premières compositions peuvent remonter vers 2000 à 1400 av. J.-C.
La source principale de ce texte est le Papyrus Leiden 334 (19e dynastie). L’égyptologue Alan Gardiner en fit la traduction, que nous reprenons ici.
Gravé sur des tablettes, le texte est très lacunaire vers la fin. Les textes entre crochets tentent de combler ces lacunes.Par ailleurs, nous avons ajouté les titres des parties 7, 8, 9, 11, 12 et 13.
Les gardiens se proposent de piller.
Les artisans [ne fabriquent plus d'objet de qualité.]
Les blanchisseurs refusent de porter leur linge.
Les braconniers sont aux affûts, les habitants du delta ont revêtu leur armure.
Les brasseurs [ne font plus la bière et les fêtes sont] tristes.
Les pères regardent leurs fils comme des ennemis.
La confusion règne. Les tribus du désert sont toutes devenues égyptiennes…
Regardez donc, appréciez la situation et jugez…
Les gens de biens pleurent de voir ce qu'est devenu le pays.
Les visages sont pâles, car ce qu'avaient prédit les ancêtres est advenu :
Le pays est aux mains des traîtres et l'on ne va plus au puits sans se protéger d'un bouclier.
Oui, les visages sont pâles, les archers sont prêts, le mal est partout,
On ne trouve plus aujourd'hui des hommes comme il en existait par le passé…
Partout on se livre au pillage et les serviteurs ramassent ce qu'ils trouvent.
Le Nil déborde, mais personne ne laboure plus les champs,
Chacun se demande ce qu'il va lui arriver.
Les femmes sont stériles et aucune ne conçoit plus,
Car à cause des conditions déplorables du pays,
Khnoum, le dieu potier, le gardien des eaux douces, ne façonne plus les hommes.
Les pauvres sont devenus détenteurs de richesses, et celui qui ne pouvait pas même se faire une sandale, est à présent le créditeur des riches.
Les esclaves sont tristes et les magistrats, quand ils se prononcent, ne fraternisent pas avec leur peuple.
Les esprits s’échauffent, la peste va à travers le pays, le sang aussi est partout.
La mort rôde. Les bandelettes des momies s'animent alors que personne ne s'en approche.
Nombreux sont les morts qui parsèment le lit du fleuve, dont les vagues sont une sépulture et les tourbillons une salle d'embaumement.
Les nobles sont en détresse, tandis que le pauvre est joyeux. Dans chaque cité, les villageois se proposent de supprimer les plus puissants d'entre eux.
Les hommes sont semblables aux hérons. La misère est partout dans le pays et il n'existe personne dont la toge soit demeurée blanche.
Comme sur le tour d'un potier, la terre a tourné, et le voleur possède à présent les richesses, et le riche en est réduit au vol.
Les serviteurs dignes de confiances [se font rares.] Les pauvres gens se plaignent : « Quelle misère ! Qu'allons-nous faire ? » se demandent-ils.
Dans les rivières coule du sang, que les hommes boivent. L'humanité s'éloigne de la condition humaine et elle a soif.
Les portes, les colonnes, les murs du palais sont en flamme, tandis que se tient fier et ferme le hall du palais.
Les frontières septentrionales sont percées, les cités sont détruites et la Haute Égypte n'est plus qu'une vaste zone en friche.
Les crocodiles se gavent de poissons, et les hommes se jettent volontairement dans leur gueule. C'est la dévastation. Il faut faire sans cesse attention, car il y a des pièges sous chacun des pas.
Les hommes vivent dans l'eau comme des poissons, ce que deviennent les plus fous d'entre eux.
Rares sont les hommes véritables, mais nombreux sont ceux qui mènent un frère en terre et quand commence à parler le sage, tout le monde s'enfuit au plus vite…
Celui qui est bien né a délaissé son épouse pour une autre et a fait du fils de sa femme le fils de sa servante.
Le désert ravage le pays, les frontières sont abandonnées, et les barbares venus de l'étranger entrent en Égypte.
Des hommes arrivent, [s'installent comme si le pays était à eux] et il ne se trouve plus nulle part de véritables Égyptiens.
Tandis que les coffres d'ébène sont fracturés, l'or, le lapis-lazuli, l'argent, le turquoise, la cornaline et l'améthyste, la pierre d'Ibhet, voilà ce que l'on trouve au cou des servantes et courtisanes.
Le pays est encore prospère, mais les mères de famille ne cessent de répéter qu'elles n'ont rien à manger.
Les corps des femmes de la noblesse sont tristes d'être revêtus de haillons et quand elles se saluent, elles ploient sous la honte.
Ceux qui construisaient des pyramides sont devenus des paysans, et ceux qui jadis transportaient la barque divine, à présent en sont les rameurs.
L'or, ainsi que tous les matériaux nécessaires à la création et à l'artisanat, manque.
Personne ne s'en va plus commercer au nord vers Byblos [Liban], et nous n'arrivons plus à trouver le bois de cedar qui convient aux momies.
Nous ne trouvons plus ce dont les prêtres ont besoin pour leurs libations, pas plus que nous ne pouvons, depuis l'île de Crête [Keftiu], leur faire parvenir les huiles nécessaires aux embaumements de nos chefs.
[Les portes] du palais sont sans cesse violées. Si souvent même, que s'y introduisent à présent des vendeurs d'épices, de dattes, de cuir, d'herbes et de musc d'oiseau…
Éléphantines [Assouan] et Thinis [Tjenu], en Haute Égypte [...] ne paient pas d’impôt, à cause des troubles civiles qui y sévissent.
Les grains manquent, le charbon, [les bûches] et les brindilles aussi. Les artisans ne travaillent plus qu'au profit du palais.
À quoi sert un trésor si l'on ne peut en jouir ?
Heureux sera le roi qui verra les choses telles qu'elles sont. Voici notre destin et notre lot.
Que pouvons-nous donc y faire ? Tout est en ruine.
Le rire est mort, il ne jaillit plus, seuls les gémissements et les plaintes se font entendre à travers le pays.
Les morts se font passer pour des gens bien nés. Ceux qui étaient égyptiens sont devenus des étrangers et sont rejetés de leur propre patrie.
Chacun perd ses cheveux, et l'homme de valeur ne se distingue plus de l'homme du commun [le noble ne se distingue plus de celui qui n'est rien.]
[Plus personne ne dort plus] à cause du bruit, car depuis des années retentit un vacarme sans fin.
Les puissants comme les petits, tous avouent espérer la mort, et les enfants en bas âge les maudissent de leur avoir donné la vie.
On jette les héritiers des princes contre les murs, et l'on installe au plus haut de l'état des bâtards.
Ceux qui jadis méritaient les honneurs de l'embaumement, à présent leur cadavre sont laissés dans la poussière. Par conséquent, les secrets des embaumeurs se perdent.
Ce que l'on apercevait hier encore, aujourd'hui à péri. Le pays est laissé à l'abandon et à sa faiblesse.
De nos jours, les habitants du désert exercent l'artisanat dans le delta, tandis que des citoyens en sont réduits à travailler dans les champs. Quant à ceux qui tissaient les toiles les plus fines, on les frappe à présent de leur propre fil.
Celles que l'on n’apercevait jamais de jour, à présent ne se cachent plus. Les épouses leur ont laissé la place dans le lit de leur mari.
« C'est trop lourd pour moi » se plaignent ceux qui refusent de porter les bouquets sacrés de myrrhe.
[Maîtres comme] serviteurs, tous sont ruinés. Il n'y a aucun remède à tout cela : les aristocrates souffrent comme leurs domestiques, et les ménestrels ne jouent plus que du métier à tisser, tandis que les chants qu'ils adressent à leur déesse ne sont plus que des complaintes endeuillées.
[Celui qui n'a reçu ni éducation ni initiation gère les affaires du pays, tandis que] ceux qui parlent bien sont courbés dans les champs.
Les jeunes filles esclaves sont impertinentes, et quand parle leur maîtresse, elles ne se gênent pas pour lui faire comprendre qu'elle les dérange.
Les arbres sont abattus et leurs branches sont arrachées.
[...] Les puissants ont faim et périssent, ceux qui habituellement suivent, sont suivis, et tous se plaignent de leur condition.
Pourtant, même celui qui est en colère se dit en lui-même : « si seulement je savais où est Dieu, je le servirais ! »
Le Bien résonne partout comme un mot, mais ce que font les hommes, c'est le Mal.
Les lâches se disputent le trésor des voleurs, ainsi que tout ce que possède l'honnête homme, puis s'en vont.
Les animaux pleurent, les bovins meuglent de désespoir à cause du mauvais état du pays.
On jette les héritiers des princes contre les murs, et l'on installe au plus haut de l'état des bâtards.
Khnoum, le dieu du Nil, grogne de reproches.
La terreur tue, celui qui a peur s'oppose à ce qui lui est fait. Certains se satisfont de la situation, [d'autres ne cessent de se rebeller, en vain].
Comment les hommes calmeront-ils la colère des dieux ? Est-ce en chassant le crocodile, puis en le taillant en morceaux ? Est-ce en tuant le lion et en le rôtissant au temple ? Est-ce en offrant des libations à Ptah ?
Pourquoi même honorons-nous les divinités ? Nous ne pourrons jamais les rejoindre et nos cadeaux sont vraiment trop misérables.
Les esclaves [qui jadis vivaient dans la crainte] pullulent, mais ce sont les hommes forts que l’on envoie battre la campagne et voyager en tout lieu.
Un frère frappe son frère maternel. Que s'est-il passé ?
Je ne rencontre et ne devise qu'avec des gens ruinés !
Les chemins sont [dangereux]. Les routes sont gardées, mais cela n’empêche pas les brigands de se tapir dans l'ombre et d'attendre que passe le voyageur aveugle, afin de le dépouiller de tous ses biens, ainsi que de tout ce qu'il porte, puis enfin le rouer à coups de bâtons et le laisser pour mort.
Ce que l'on apercevait hier encore, aujourd'hui n'est plus.
Le pays est laissé à l'abandon et à sa faiblesse.
Les roturiers font et défont les situations.
Si au moins tout cela signifiait la fin de l'espèce humaine, que plus jamais l'on ne conçoive ni ne naisse, alors enfin le pays redeviendrait calme, libéré du tumulte des hommes.
[Après avoir traversé la famine], personne n'a plus le teint frais ni le visage ravissant.
Les hommes mangent du fourrage largement arrosé, et il ne se trouve plus nul fruit ni pâturage pour les oiseaux, [ni le bétail]. On retire même la nourriture de la bouche des cochons.
Partout l'orge a péri et l’on a dessaisi les hommes de leurs vêtements, de leurs épices et de leurs huiles. « Il n'y a plus rien » s'écrient-ils alors !
Les greniers sont vides et leurs gardiens sont endormis devant, allongés.
Quelle misérable situation !
Si seulement j'avais dit quelque chose à ce moment-là, peut-être que ma peine serait moins grande aujourd'hui !
À la suite du Conseil des ministres, les écrits sont soustraits et seuls les mystères sont dévoilés au public.
Les sorts sont démystifiés, les tours de magie expliqués, et les sortilèges n'aboutissent pas car les hommes s'en méfient.
Les administrations sont pillées et les inventaires volés. Le serf devient celui qui possède d'autres serfs.
Les scribes sont tués et leurs écrits confisqués.
Malheur à moi d'être la cause de tant de misère !
Les papyrus faisant mention des cadastres sont détruits, et les céréales d’Égypte sont la propriété de chacun.
Les lois du conseil sont jetées au caniveau et sont foulées du pied. Les pauvres les violent dans les rues.
Le pauvre a été initié aux neuf dieux et le secret de la maison de La Trinité lui a été divulgué.
Le conseil est occupé par des hommes du peuple, et les pauvres vont et viennent au Grand Palais.
Les enfants des puissants sont jetés à la rue, sous l'approbation des sages.
Seul le fou proteste contre l'injustice, laquelle semble aux yeux de l'ignorant un bienfait.
Ceux qui jadis méritaient les honneurs de l'embaumement, à présent leurs cadavres sont laissés dans la poussière. En conséquence, les secrets des embaumeurs se perdent.
Les dieux, le roi et les institutions ne sont plus respectés
L'incendie grimpe jusqu'au plus haut, mais il s’éteint quand il approche de nos ennemis.
Des choses se sont produites que l'on ne voyait pas avant : le roi a été déposé par la populace.
Celui qui fut enterré comme un faucon est privé de bières, et ce que les pyramides renfermaient n'y est plus.
La terre est privée de roi par la volonté de pouvoir de quelques roitelets sans scrupule.
Le peuple s'est rebellé contre Uræus, le cobra qui protégeait le pharaon contre le mauvais sort. Pourtant, Uræus n'est-elle pas aussi la pourvoyeuse des deux pays ?
Les secrets des mystérieux mondes sans limite furent divulgués et le palais fut aussitôt violé.
L’Égypte n’inonde plus ses cultures, et celui qui arrose ses terres entraîne la soif d'un autre, qu'il entraîne avec lui dans la misère.
Le serpent a été extirpé de son trou et les secrets des rois de la Haute et de la Basse Égypte sont divulgués.
Le palais est effrayé de la volonté populaire, et les hommes ne cachent plus leurs ressentis et leur envie d'en découdre.
Le pays est morcelé par la division, les lâches se sont emparés de ce que possèdent les braves. [...]
Vois tout ce qui est arrivé aux hommes : celui qui ne pouvait pas même s'offrir un sarcophage possède à présent une tombe.
Ceux qui étaient dans les tombes sont repoussés dont la fausse commune, tandis que ceux qui ne pouvaient pas même avoir un cercueil, possèdent à présent un trésor.
Enfin, celui qui n'avait pas même de chambre est à présent possesseur de murs.
Les magistrats sont traînés hors des terres dont ils ont la juridiction et sont chassés à travers le pays.
Les femmes de la noblesse, [enlevées comme esclaves], sont au loin sur des bateaux et les puissants d'hier travaillent de leurs mains, tandis que celui que l'on ne laissait pas même dormir sous les murailles, à présent possède un lit.
Le riche passe ses nuits à souffrir de la soif, tandis que celui qui hier encore mendiait sa lie, possède aujourd'hui des vases qui débordent.
Celui qui était jadis revêtu de toge porte à présent des guenilles, tandis que celui qui ne pouvait pas même se couper lui-même les cheveux, porte des habits fins.
Celui qui ne pouvait pas se construire une barque, à présent est à la tête d'une flotte entière, que les anciens propriétaires des navires regardent passer avec tristesse.
Celui qui n'avait pas d'abri en possède un et celui qui était à l'abri subit à présent de plein fouet la tempête.
Celui qui ne savait pas jouer de la lyre possède à présent une harpe, tandis que celui qui n'a jamais chanté, chante à présent les hymnes à la déesse du chant.
Mais pour autant, ceux qui possédaient des portes jarres en cuivre, à présent utilisent des amphores en terre cuite qui ne sont pas décorées.
Les pauvres sont devenus riches
Celui qui n'avait pas épousé de femme à cause de sa misère, trouve soudain des trésors [à offrir en gage.]
Celui qui n’avait rien, possède des richesses et les puissants l'honorent.
Dans les campagnes, les plus pauvres sont devenus riches, et ceux qui possédaient jadis n'ont plus rien.
Les serviteurs sont devenus les maîtres d'autres laquais et celui qui était messager, envoie à présent un autre à sa place.
Celui qui n'avait pas même un pain, à présent possède une grange, qu'il remplit du bien des autres.
Ceux dont les cheveux tombaient et qui ne se mettaient pas d'huile sur la tête, à présent possèdent de nombreuses jarres remplies d'huile de myrrhe.
Celui qui n'avait pas même un bœuf, à présent possède un coffre, et celle qui devait se regarder dans l'eau, possède un miroir. […]
Celui qui ignorait son propre dieu, brûle à présent de l'encens pour un autre dieu qu'il ne connaît pas.
[...] Des femmes jadis glorieuses et riches, à présent couchent elles-mêmes leurs enfants. [...]
Les enfants des dignitaires sont [dépossédés de leurs héritages] tandis que les nouveau-nés du bétail sont offerts aux pilleurs.
Celui qui ne pouvait pas plumer son propre poulet à présent fait abattre des taureaux.
Les prêtres soustraient le bétail des pauvres et au lieu de taureaux, ils offrent aux dieux des oies. […]
Les femmes de la noblesse s'enfuient, pourchassées, leurs enfants se mutent dans la peur.
Les chefs ne servent à rien, manquent de volonté et s'enfuient. Le seigneur [refuse son devoir.]
Le chaos dans les campagnes
Ceux qui dormaient dans un lit sont jetés au sol, et ceux qui dormaient dans les caniveaux s'endorment sur des matelas de cuir pour eux seuls.
Les femmes de la noblesse ont faim, alors que les prêtres se régalent de ce qui leur est destiné.
Les institutions vont à vau-l’eau, comme un troupeau sans berger.
Le bétail s’agrée et il n'y a personne pour le regrouper, tandis que chacun ne s'occupe que de l'animal qui porte sans nom.
Un homme est assassiné devant son frère, mais celui-ci s'enfuit et l'abandonne pour sauver sa propre peau.
Celui qui n'avait pas même une charrue à présent possède un cheptel, et celui qui ne pouvait pas même employer un laboureur se trouve à la tête d'un troupeau de bétail.
Celui qui n'avait pas de graines, à présent possède des greniers et celui qui récoltait les céréales est à présent celui qui les vend.
Celui qui n'avait personne à sa charge, à présent possède des serfs et celui qui possédait, à présent fait ses propres courses au marché.
La triste condition du peuple et ses complaintes ne parviennent pas jusqu'aux oreilles des hommes forts. Tout va à la ruine !
Ruinés par les ennemis étrangers, nos artisans ne travaillent plus.
Celui qui récoltait, à présent ne connaît plus les saisons et celui qui n'avait jamais récolté pour lui-même, possède des champs entiers. Les récoltes se font, mais elles ne sont pas déclarées. Le scribe est assis à son bureau, mais ses mains sont oisives.
[L'anxiété règne] en ces temps, un homme en regarde un autre comme s'il s'agissait pour lui d'un adversaire. [C'est de tout cela dont] souffre la Terre.
[Quant au peuple] par la force et la terreur, il se fait extorquer son pain.
L'homme du commun se plaint, mais ses requêtes n'arrivent jamais à temps.
[Le criminel vit en liberté, mais] on saisit les biens et les propriétés de l'honnête homme.
[Un homme se fait rouer de coup chez lui ?] Les gens passeront rapidement devant sa porte, [feignant de ne rien voir.]
[Ceux qui vivaient jadis dans des palais] dorment sous des tentes comme les gens du désert.
Ce que les serviteurs reçoivent comme ordre de leurs maîtres, se voit systématiquement empêchés. [...]
La Basse Égypte pleure, l'entrepôt royal est ouvert à tous, et depuis qu'il a été pillé, le palais est laissé sans ressource.
Dedans il y avait du blé, de l'orge, de la volaille et du poisson. Il y avait aussi des draps fins, des objets en cuivre, des huiles, des tapis et des matelas [...] des fleurs, du foin, et toute sorte de richesses.
[Si les récoltes ont du retard, le royaume souffrira de famine.]
[Les insupportables ennemis du palais pullulent pourtant dans ce lieu de toutes les décisions.]
Conseils
Souviens-toi d'aller au temple, d'y allumer l'encens et d'honorer les divinités en leur offrant de l'eau tôt le matin.
Souviens-toi d'offrir des grasses oies, des canards et d'autres offrandes aux dieux.
Mâche le natron avec du pain blanc, particulièrement le jour où tu te mouilles les cheveux.
Souviens-toi d'ériger des mâts de drapeaux et de faire graver des statuettes comme offrande. Que les murs du temple soit blanc comme le lait et qu'une douce odeur règne et que le pain soit offert.
Souviens-toi de suivre les règles, d'enregistrer correctement les rendez-vous et les événements, veille à ce que n'entre pas au temple celui dont le corps est impur, parce que si son corps est sale, son cœur sera corrompu. [...]
Le jour qui précéda l'éternité, les mois [les saisons] et les années sont connus.
Souviens-toi d'offrir un bœuf [...]
[Garde-toi de céder à la peur, car] celui qui a peur ne se distingue pas de celui qui violente.
Le berger des hommes
Celui qui apporte la fraîcheur en période de chaleur, les gens disent : « il est le berger des hommes, le mal n'habite pas son cœur ! » Même si son troupeau est petit, il passe la journée à le rassembler, tant ses animaux sont énervés.
S'il avait su à leur naissance quelle était leur véritable nature, il aurait pris des mesures, et aurait même levé son propre bras sur eux. Il aurait détruit leurs troupeaux et leurs possessions.
Les hommes veulent donner naissance, mais la tristesse prévaut, et les nécessiteux sont partout légion. Voilà comment sont les choses, et elles ne s'arrangeront pas tant qu'existent les dieux qui les régissent.
La semence passe à travers les femmes, mais aucune d'entre elles n'est enceinte.
Les combats font rage, et ceux qui devaient redresser les torts les commettent.
De même, ceux qui devraient être en service ont déserté leur poste. Ou sont-ils ? Sont-ils endormis ? En tout cas on ne trouve nul témoin de leur puissance.
Si nous avions eu à manger, je ne serais pas venu vous chercher, je ne vous implorerais pas. [...] Les statues sont brûlées et les tombes profanées. […]
Celui qui ne peut s'assurer pour lui-même [...] est effrayé de tout ce qui vit entre le ciel et la terre. […]
L'autorité, le savoir et la vérité sont de votre côté, cependant par votre faute règne partout la confusion tandis que retentit le tumulte dans les campagnes.
Pour se conforter à vos ordres, un homme en blesse un autre.
Sur trois hommes qui prendront la route, seuls deux arriveront à leur destination, tant sont nombreux les tueurs.
Ce qui est bon
Est-ce qu'un berger désire la mort de son troupeau ?
Je vous conjure de me répondre, que vous enthousiasmez certains et fâchez d'autres, mais prenez vos responsabilités pour que cesse cette catastrophe.
Vous avez menti et à présent, la terre n'est plus qu'un poison pour les hommes.
Personne ne peut se considérer en sécurité.
Depuis des années grondent les combats, et celui qui surveillait sa porte meurt à présent assassiné sur sa terrasse.
Est-il courageux et se défend-il ? Alors il vivra.
Quand on charge son domestique d'une mission dans le pays, la tempête croise sa route, nettoie le chemin et le laisse apeuré et anxieux.
C'est alors qu'on le dépouille et qu'on le roue de coups de bâton jusqu'à ce qu'il en meurt. Oh ! Si vous pouviez goûter vous-même de cette misère-là ! [...]
Il est bon que les navires naviguent en amont du fleuve, mais on les vole.
[Il est bon que l'on tire les filets et que l'on attrape des oiseaux.
Il est bon que les routes soient praticables et qu'elles soient pourvues de toutes sortes de facilités].
Il est bon aussi que les hommes unissent leurs mains pour construire des pyramides, pour creuser des réservoirs et planter des vergers en l'honneur des dieux.
Il est bon aussi que les hommes soient ivres, qu'ils boivent du vin et qu'ils soient heureux.
Il est aussi bon que les hommes crient et que les puissants les regardent depuis leur maison, bien habillés et pourvus de tout.
Il est bon que les magistrats vivent en lieu sûr et qu'on leur donne des chambres sécurisées.
Ce dont a besoin un homme, c'est d'une paillasse à l'ombre, alors qu'à présent une porte se referme sur celui qui jadis dormait dans les bois.
Il est bon de sortir le linge de cérémonie pour la nouvelle année, et d’étaler au sol les tissus rituels.
Les gens sont à bout, mais personne ne peut se rebeller ou se protéger.
Tout le monde se bat pour sa sœur et pour sauver sa peau.
Est-ce les Nubiens qui attaquent ? Nous nous en protégeons, et nombreux sont les guerriers qui les repousseront, tels les étrangers qu'ils sont.
Est-ce au contraire les Libyens qui attaquent ? Alors nous fuyons ! En conséquence, les Medjay se plaisent en Égypte !
Comment se fait-il que chaque homme tue son frère ?
Les troupes que nous avions créées pour nous défendre, nous sont devenues étrangères, et les voilà qui rodent et pillent nos campagnes.
Ce qu'il s'est passé, c'est que les Asiatiques furent informés de l'état du pays. C'était ce que craignaient le plus les peuples du désert.]
Voici encore ce que dit Ipou-Our à Sa Majesté le maître de toute chose :
[...] Cela veut dire que l'ignorance plaît au cœur.
Vous avez fait ce qui plaisait à leur cœur et vous avez nourri de cette façon votre peuple.
Ils couvrent à présent leur visage par peur du lendemain.
Ainsi vieillit un homme, et quand il est au seuil de sa mort, son fils, un garçon compréhensif qui ne vous fut jamais impertinent, vous l'arrêtez et abrégez son destin par la mort].
[...] Pleurer ceux qui violent les tombes et brûlent les statues et les cadavres des nobles. [...]
What Happens at the End of Kaliyuga | Q&A with Swami Mukundananda
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