28 Avril 2025
Quelques mythes krishnaïtes présent à l'ouest
Intéressons-nous à des mythes communs aux Indiens et aux Sémites.
Sargon (v. -2300, Assyrien), Moïse (v. -1200, Égypto-Hébreux), Karna et Krishna (protagonistes du Mahabharata et possibles hauts dignitaires de l'Indus, donc v. -2500 à -1500), seraient nés séparés de leurs parents, survivant à la mort, déposés dans un panier confié au flot d'un fleuve par un adjuvant bienveillant.
Sargon est le roi qui se vantait d'avoir fait accoster les bateaux indiens sur les quais d'Assur. Aurait-il été indophile ou baigné de culture et de traditions indiennes au point de se revendiquer d'une légende indienne ? On sait par ailleurs la très haute estime dans laquelle les Mésopotamiens considéraient les rivages de « Meluhha », parfois même considéré comme un paradis d'outre-mer (Épopée de Gilgamesh). Ce mythe du bébé déposé dans un couffin aurait alors été importé depuis l'est indien vers l'ouest assyrien, puis vers l’Égypte, à la suite du développement des relations commerciales entre la vallée de l'Indus, Akkad et Assur, et le delta du Nil.
Le mouvement inverse est également possible : né dans un contexte égyptien (émigration hyksos et hébraïque dans le delta du Nil) puis transféré en Mésopotamie à travers les échanges entre peuples sémitiques, le mythe aurait alors été transmis en Inde par le réseau de commerçants assyriens, akkadiens et babyloniens.
Autres mythes en commun : Krishna, Horus et Héraclès étranglent des serpents dans leur couffin, alors qu'ils sont encore bébés.
Le divin vacher
Éloigné de ses parents pour échapper à la mort, Krishna grandit dans une famille de métayer, d'où son appellation de vacher. Radha, la fille du roi des vachers d'une tribu yadave sera sa première compagne, d'où son titre de roi des vachers. Il s'agit d'une expression typique et consacrée, que l'on retrouve sous de nombreuses variations. En Égypte, Anubis est aussi qualifié de vacher.
Anubis comme Krishna mènent leurs adorateurs vers la sagesse. Cependant, la signification véritable de l'expression mythologique est tout à fait différente en Égypte ou en Inde : Anubis est le guide des âmes, il mène les défunts vers leur jugement, face au juge suprême Osiris. Quant à Krishna, il n'est pas psychopompe, mais il est semblable au gardien du bétail, dévoué et généreux, attentionné envers ses adorateurs.
En Mésopotamie, Enkidu, avatar d'Enki, est berger. Jésus est un pasteur, ses apôtres des pêcheurs. Mohamed exerça la profession de berger.
Le sacrifice du fils
Le mythe du roi qui sacrifie son fils à la demande d'un dieu qui lui a jadis accordé une faveur, est commun aux peuples sémites et indiens.
Chez les Hébreux, il s'agit du sacrifice à Yahvé d’Isaac par Abraham. Chez les Indiens, c'est le sacrifice à Varuna de Rohita par Harishchandra. L’histoire d'un père qui tue son fils unique et inespéré est une tragédie idéale, dans laquelle la fidélité d'un monarque à son dieu tutélaire côtoie la démence et la cruauté de ce même monarque et de ce même dieu.
Abraham obéit à Dieu, Harishchandra à Varuna, mais leurs motivations sont différentes. Harishchandra veut être père, pour connaître la joie de la paternité, Abraham souhaite quant à lui une descendance pour guider les Hébreux. Le déroulement des mythes n'est alors pas le même : si Abraham est prêt à obéir au dieu à qui il a juré une fidélité absolue, Harishchandra ne veut pas tuer son fils unique et ne cesse de reporter cette cruelle tâche. Varuna, magnanime, accepte alors de reporter le sacrifice du fils en rendant le père gravement malade. Ce sont finalement les hymnes rig-védiques chantés à l'attention de Varuna qui charmeront le démiurge, qui acceptera de faire une entorse à son propre règlement, en sauvant le père et le fils. Quant au dieu des Hébreux, sa clémence épargnera elle aussi, au dernier moment, le prince des Hébreux.
Un mythe biblico-jaïn
Les deux femmes qui réclament la maternité et la garde du même enfant, est un autre mythe commun à l'Indus et à la Mésopotamie. Deux femmes se déchirent sur la maternité d'un enfant. L'une d'elles est prête à tuer l'enfant pour ne pas le laisser élever par une autre. Dans la tradition jaïne, il s'agit du jugement de la reine Mangala, chez les Hébreux il s'agit de celui de Salomon.
Ce mythe est partagé par les mêmes sources bibliques, jaïnes et mésopotamiennes qui partagent le mythe du sacrifice du prince. Ces deux mythes forment donc un corpus cohérent qui témoigne d'une mythologie urbaine commune aux habitants de Babylone et Mohenjo-daro.
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