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Arya-Dharma, l'héritage des spiritualités premières

L'Indo-européen n'est pas un mythe, par Thomas Pellard, Laurent Sagart et Guillaume Jacques

L'Indo-européen n'est pas un mythe, par Thomas Pellard, Laurent Sagart et Guillaume Jacques

Extrait de l'article "L'Indo-européen n'est pas un mythe", publié par Thomas Pellard, Laurent Sagart et Guillaume Jacques dans le Bulletin de la Société de Linguistique de Paris (Peeters Publishers, 2018, pp.79−102). Il s'agit d'une réponse au livre polémique de Jean-Paul Demoule, Mais où sont passés les Indo-Européens ?

*


« En dépit d’une vaste bibliographie, l’ouvrage de Demoule (2014) est mal informé. Cela est vrai pour la linguistique, puisque la majorité des travaux contemporains de renommée internationale n’y sont même pas mentionnés, les références de l’auteur semblant largement ignorer les travaux majeurs postérieurs à Meillet et Benveniste. L’hypertrophie manifeste des références aux travaux du XIXe et de la première moitié du XXe donne une image complètement déformée de la discipline, ce qu’aggravent les erreurs flagrantes de compréhension des principes élémentaires de la linguistique et leur présentation biaisée. L’histoire de la discipline et des idées, bien qu’elle occupe une bonne partie de l’ouvrage, est également présentée de manière orientée et inexacte. Même concernant l’archéologie, les résultats des recherches sur la domestication du cheval publiés après 2000 sont mal maîtrisés.

Il est clair que la tentative de Demoule de remettre en question la réalité de l’indo-européen et des Indo-Européens est un échec grevé d’innombrables erreurs dans les données comme dans leur interprétation et de méprises conceptuelles. L’existence d’une famille de langues indo-européennes ayant divergé d’un ancêtre commun parlé par un peuple vers le IVe millénaire avant notre ère dans les steppes pontiques reste à ce jour [2018] le seul modèle plausible permettant d’expliquer l’ensemble des faits.

La récupération et le détournement idéologiques des études indo-européennes ont déjà été abondamment traitées dans la littérature historiographique, y compris sur la linguistique (Hutton 1999), et leur dénonciation dans l’ouvrage de Demoule reste certes louable dans son intention. On regrette néanmoins, outre les erreurs qui pourraient rendre cette tentative contre-productive, que cette dénonciation passe par la volonté de minimiser, voire de discréditer, les nombreuses contributions scientifiques des indo-européanistes. Demoule rappelle à juste titre dans son ouvrage le devoir de prudence et de vigilance des scientifiques, il aurait donc été appréciable qu’il appliquât consciencieusement lui-même ces principes afin de prévenir les amalgames pouvant jeter l’opprobre sur toute un domaine de recherches. Le devoir du scientifique est aussi un devoir de vérité.

Si ces attaques resteront sans doute sans effet dans le développement des recherches à l’international, leur réception enthousiaste en France par de nombreux non-spécialistes et par le grand public laisse malheureusement présager des dommages regrettables aux études indo-européennes, voire à la linguistique historique et comparative toute entière en France. L’entreprise de déconstruction de Demoule va non seulement à rebours dans le temps en avançant des conceptions qui sont obsolètes depuis longtemps déjà, mais également à contre-courant des collaborations très fructueuses entre linguistes, archéologues et paléogénéticiens, qui fleurissent récemment un peu partout. »

L'Indo-européen n'est pas un mythe, par Thomas Pellard, Laurent Sagart et Guillaume Jacques
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