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Arya-Dharma, l'héritage des spiritualités premières

Les coutumes funéraires des HÉROS GRECS - les funérailles de Patrocle et Hector

« Pour les héros comme pour les morts, on choisit des animaux mâles et de pelage noir ; les dieux ont des exigences plus variées ; chacun a ses préférences. Sacrifier se dit « thuein » pour les dieux, « enagizein », c'est-à-dire consacrer, rendre tabou, pour les morts et les héros. On immole le matin aux dieux ; aux héros, primitivement la nuit ; plus tard, l'après-midi. L'animal offert aux dieux est mangé par les sacrifiants, après qu'ils aient brûlé symboliquement en hommage aux Immortels les os enveloppés d'un peu de graisse [...]. L'animal offert aux héros n'est pas mangé, car les morts boivent eux-mêmes le sang qui coule jusqu'à eux. De là des différences dans la manière de tuer la victime. Dans le sacrifice aux dieux, on lève la tête pour couper la gorge. Dans l'immolation aux puissances souterraines, on incline la tête vers le bas et l'on incise largement (entemnein), non seulement la trachée, mais la carotide, de façon que le sang coule dans la fosse de l'autel qui est bas, rond et creux. Après quoi le corps tout entier, non écorché, est brûlé sur cette eschara [autel]. L'autel des dieux, plus élevé, s'appelle bômos. Tout cela prouve que les Grecs s'imaginaient les héros résidant dans la terre et avides de sang, comme les autres morts. » M. Delcourt, Légendes et cultes de héros en Grèce.

Ces quelques lignes de l’helléniste belge Marie Delcourt (1891 - 1979) sont une introduction idéale, à laquelle il faut joindre les textes complets des deux funérailles les plus célèbres de la mythologie européenne: celles de l'achéen Patrocle et du troyen Hector. Étudiées par les écoliers de la Grèce antique et de Rome, puis par les universitaires européens, les funérailles de Patrocle, l'ami intime d'Achille, occupent tout l'avant-dernier chant de l'Iliade, tandis que l'épopée elle-même se clôt sur les pitoyables funérailles d'Hector, vainqueur de Patrocle et plus grand ennemi d'Achille.

Homère aborde ici clairement les principales étapes marquant le déroulement de funérailles modèles. Ces funérailles sont en effet modèles, car elles se déroulent sous l'égide d'un ami, Achille, ou d'un père, Priam. Ces deux personnages, rongés par la tristesse et brisés par la guerre, ne croient plus en rien si ce n'est en la stricte pratique des rituels ancestraux. Ce sont ces rituels qui vont permettre à Patrocle et à Hector de rejoindre les Champs Élysée, et non de terminer au plus profond du Tarare, parmi les âmes du commun.

Commençons par les funérailles de Patrocle, extrait du chant 23 de L'Iliade (trad. Bitaubé) :

*

Tout gémissait dans Troie. Cependant les Grecs, arrivés aux bords de l'Hellespont et près de leurs vaisseaux, se dispersent dans leurs tentes. Achille ne permet point aux Thessaliens de se retirer. Entouré de leurs cohortes belliqueuses, il dit :

« Braves combattants, chers Compagnons, ne dételons pas encore nos coursiers vigoureux ; approchons de ce lit funèbre avec nos chars ; offrons à Patrocle le tribut de nos regrets et de nos larmes, honneurs qui sont dus aux morts. Ne détachons les coursiers, et ne prenons tous de la nourriture, qu'après avoir satisfait aux témoignages de notre amère douleur. »

À ces mots les cohortes nombreuses font éclater leur douleur. Achille est à leur tête, et les superbes coursiers sont conduits trois fois autour du corps de Patrocle : l'air retentit de plaintes lugubres ; et Thétis [mère d'Achille], au milieu des Thessaliens, les excite elle-même à la tristesse et au deuil. Le sable est mouillé de leurs pleurs, leurs armes en sont inondées, tant ils regrettent ce héros, qui fut la terreur des ennemis. Achille, ouvrant le deuil, tire de fréquents soupirs du fond de son cœur ; et posant ses mains ensanglantées sur le sein de son ami :

« Réjouis-toi, ô Patrocle ! quoique tu sois dans les enfers. J'accomplirai tout ce que j'ai promis ; je t'ai juré de traîner Hector jusqu'en ces lieux pour le livrer aux animaux dévorants, et de faire mourir autour de ton bûcher douze jeunes Troyens d'un sang illustre, dans le courroux dont m'enflamme ta mort. »

Et traitant le noble Hector avec la plus grande barbarie, il le fait étendre devant le lit de Patrocle, le front dans la poussière.

Les Thessaliens déposent leurs armes brillantes, détellent leurs bruyants coursiers, et s'assemblent en foule devant la tente du petit-fils d'Æcus. Il leur donne avec splendeur le repas funèbre. Des troupeaux de bœufs tombent égorgés, poussant de rauques et sourds gémissements ; des troupeaux de chèvres et de brebis bêlantes sont immolés, et des porcs, aux dents éclatantes, gras et succulents, sont étendus et fument devant les flammes d'Héphaïstos ; le sang des victimes ruisselle à grands flots autour du corps de Patrocle.

Cependant, et non sans peine, les rois conduisent vers Agamemnon Achille, toujours désespéré du trépas de son ami. Dès Qu'ils entrent dans la tente, le chef des Grecs ordonne à ses hérauts d'allumer le feu sous une grande urne, dans l'espoir d'engager Achille à laver le sang et la poussière dont il est souillé : mais il le refuse d'un ton ferme, et scelle d'un serment son refus.

« J'en atteste Zeus, le plus élevé des dieux, il ne m'est pas permis d'approcher du bain avant d'avoir mis Patrocle sur le bûcher, érigé sa tombe, et de lui avoir consacré l'offrande de ma chevelure ; car, tant que je serai parmi les vivants, je n'éprouverai pas une seconde fois la douleur dont je me sens pénétré. Je prendrai part maintenant au festin, quelqu’odieux qu'il soit à ma tristesse. Mais, Atride, roi des guerriers, ordonne que dès l'aurore on amène le bois de la forêt, qu'on dresse le bûcher, et qu'on prépare les honneurs qui doivent accompagner son ami au ténébreux empire ; qu'une grande flamme consume promptement le corps de ce héros ; et que les troupes, n'ayant plus sous leurs yeux ce spectacle funeste, retournent aux travaux de la guerre. »

Les chefs se rendent à tous ses désirs. Le repas étant prêt, chacun se hâte de jouir de l'abondance ; et, ayant retrouvé ses forces, va dans sa tente chercher le repos. Achille, entouré de ses nombreux Thessaliens, se couche sur la terre purifiée par l'onde au bord du rivage que la mer bruyante vient battre de ses flots ; et il remplit l'air de profonds gémissements. […] L'Aurore, paraissant avec ses doigts de rose, les trouve encore versant des larmes autour du cadavre d'un héros si digne de leurs regrets.

Cependant Agamemnon veut qu'une troupe nombreuse d'hommes et de mulets sorte des tentes, et se hâte d'amener du bois de la forêt ; un guerrier distingué se charge de les conduire. Les hommes partent précédés des mulets, et tenant en main des haches tranchantes et de forts cordages. Ils vont gravissant, descendant, remontant, et suivant des chemins tortueux. Arrivés au milieu de la forêt d'Ida, arrosée de sources, leurs mains, armées du large acier, abattent les chênes majestueux, qui tombent en faisant gémir profondément la terre. Ils fendent les troncs et les attachent aux mulets, dont les pas deviennent rapides, empressés d'arriver dans la plaine à travers l'épaisseur des buissons. La troupe des bûcherons les suit, chargée des mêmes fardeaux. Ils déposent ces bois sur le rivage, où Achille avait prescrit d'élever une tombe pour Patrocle et pour lui-même.

Après avoir entassé le bois dont la forêt vient d'être dépouillée, la troupe attend de nouveaux ordres. Alors Achille commande à ses Thessaliens belliqueux de revêtir l'airain et d'atteler leurs coursiers. Ils accourent revêtus de leurs armes, et montent, écuyers et chefs, sur les chars qui ouvrent la marche, et que suit une nuée d'immenses légions. Au milieu d'eux est le corps de Patrocle porté par ses compagnons, et couvert des cheveux entassés qu'ils se coupent pour les lui consacrer. Le grand Achille paraît ensuite, soutenant de ses mains la tête de son ami. Plongé dans une sombre tristesse, il conduisait ce noble compagnon au tombeau.

Arrivés au lieu qu'il leur a marqué, ils déposent le corps, et dressent le bûcher pour satisfaire cette ombre magnanime. [Alors s'élève une nouvelle pensée dans l'esprit du héros : il coupe sa chevelure flottante d'un blond éclatant ; et attachant l'œil sur l'empire de la mer il dit en soupirant :]

« Puisque je ne dois jamais revoir ma terre natale, je veux qu'un héros, que Patrocle emporte cette chevelure aux enfers. »

Cet hommage réveille la douleur et le deuil de tous les assistants : et le soleil, en terminant sa carrière, les eût laissés dans les pleurs ; mais Achille s'approchant d'Agamemnon, dit :

« Prince dont nous respectons la voix, le sort ramènera la saison des plaintes ; ordonne que les troupes s'éloignent du bûcher, qu'elles aillent renouveler leurs forces. Nous aurons soin des funérailles nous auxquels surtout appartient ce devoir : que les chefs seuls restent avec nous pour l'accomplir. A ces mots Agamemnon donne l'ordre, et les troupes se dispersent dans leurs tentes.

Alors ceux qui veillent au soin des funérailles, entassent les chênes, dressent un bûcher, qui occupe dans sa longueur et dans sa largeur cent pieds d'étendue. Le cœur serré de tristesse, ils placent Patrocle au haut du bûcher. On immole et on dépouille une grande multitude de brebis grasses et de bœufs à la corne redoutée. Le magnanime Achille couvre de la graisse de ces victimes tout le cadavre, autour duquel il amoncelle leurs corps ; tenant de grands vases, il verse aux deux côtés du lit funèbre le miel et l'huile. Il y précipite quatre coursiers vigoureux, en poussant de longs gémissements. Des neuf dogues qu'il nourrissait de sa table, il en égorge deux, et les livre au bûcher. Il y livre douze rejetons de nobles Troyens, qu'il a percés de son fer dans son courroux, que rien ne pouvait arrêter. Enfin il porte au bûcher la flamme invincible pour le dévorer ; et, faisant retentir l'air de ses cris douloureux, il appelle son fidèle compagnon :

« Reçois mes adieux, ô Patrocle, et ressens quelque satisfaction dans le séjour même des ombres. J'ai rempli mes promesses ; douze jeunes Troyens d'un sang illustre vont être consumés avec toi par les flammes : je n'y livre point Hector, il sera la proie des animaux carnassiers. » [...]

Cependant le bûcher de Patrocle tardait à s'embraser. Alors l'impétueux Achille s'écarte ; il implore Borée et le vent d'occident ; il leur promet des sacrifices somptueux ; et, leur faisant de grandes libations d'une coupe d'or, il les conjure d'accourir pour allumer promptement le bûcher et consumer le cadavre. […]

Les vents sortent avec un tumulte horrible, chassent devant eux les nuages, arrivent sur la mer enflée sous leur baleine sonore ; et, touchant aux rives de Troie, fondent sur le bûcher ; les flammes s'élèvent jusqu'au ciel avec un bruit éclatant. Durant toute la nuit les vents agitent les flammes de leur souffle impétueux ; et Achille, tenant une coupe profonde, puise le vin dans une urne d'or, et arrose à longs flots la terre de libations, appelant à haute voix l'ombre du malheureux Patrocle. Tel qu'un père se désole en consumant les os d'un fils prêt à former les nœuds de l'hyménée, et dont la mort plonge dans le deuil les infortunés dont il tenait la naissance : tel Achille se désolait en consumant les os de son ami ; et se traînant autour du bûcher, son cœur sans relâche exhalait de profonds soupirs, jusqu'à ce que, l'étoile du matin paraissant sur la terre pour annoncer le jour, suivi de l'aurore qui dorait la mer de ses rayons, les flammes commencèrent à s'amortir, et enfin s'éteignirent. Les vents revolent alors dans leur demeure à travers la mer de Thrace, qui, furieuse, s'enfle en mugissant sous leur passage. Et le héros, qui s'éloigne du bûcher, se repose, épuisé de fatigue ; le doux sommeil vient fermer sa paupière : mais bientôt réveillé par le tumulte des chefs qui s'assemblaient en foule, il se lève et leur tient ce discours :

« Agamemnon, et vous princes de la Grèce, achevons d'éteindre avec la liqueur du vin les flammes, qui ont répandu leur ardeur ; dévorante dans tout le bûcher ; et soyons attentifs à recueillir les os de Patrocle. Il est facile de les reconnaître ; il était étendu au milieu du bûcher ; sur les bords ont été consumés les captifs, confondus avec les chevaux. Renfermons dans une urne d'or ces restes précieux, enveloppés deux fois de la graisse des victimes, et qu'ils reposent dans cette urne jusqu'à ce que je descende moi-même aux royaumes sombres. Je ne veux point qu'on lui érige encore de magnifique tombeau ; contentons-nous de l'ensevelir avec peu d'appareil. Tous qui me survivrez, vous pourrez, avant de couvrir la mer de vos navires, élever un monument vaste et pompeux.

 

 

*

Les funérailles d'Hector (fin du chant 24) sont en quelque sorte le négatif de ceux de Patrocle. Les constantes présentées par les deux versions sont les points essentiels de la coutume indo-européenne.

*

Achille, avec la rapidité d'un lion, se précipite hors de sa demeure, accompagné de deux pages. Ils détellent les mules et les coursiers, conduisent le cadavre d'Hector dans la tente, le placent sur un siège, puis déchargent du char les dons destinés à la rançon du mort, et y laissent deux riches manteaux et une tunique fine pour en couvrir le corps que l'on remmènera dans Troie.

Achille, appelant ses captives, leur ordonne de laver ce corps, de le parfumer d'essences loin des yeux de Priam, de peur qu'à l'aspect de son fils sa douleur réveillée n'enflamme son courroux, et ne l'expose à la fureur du héros qui, dans le premier transport, immolerait peut-être le vieillard. Après que les captives ont lavé ce corps, qu'elles l'ont parfumé d'essences, et couvert de la tunique et des manteaux, Achille aidé de ses compagnons, l'étend sur le lit funèbre, et le place sur le chariot éclatant. Il pousse ensuite des soupirs, et appelant le fantôme de Patrocle, il s'écria :

« Ne t'irrite point, ô mon cher Patrocle, si tu apprends dans les enfers que j'ai rendu le noble Hector à son père. Les dons qu'il m'a faits ne sont point indignes de nous ; fidèle au plus saint devoir, je veux ne m'en réserver qu'une légère partie, et les consacrer à tes mânes. »

Puis, se tournant vers Priam, il dit :

« Vieillard, ton fils est à toi selon tes désirs, il est couché sur un lit funèbre ; tu le verras en l'emmenant au lever de l'aurore. Songe en ce moment à prendre quelque nourriture. »

Et se levant aussitôt, il immole une brebis à la toison argentée. Ses compagnons la dépouillent, la partagent, en chargent de longs dards qu'ils approchent des flammes ; ils les retirent. Automédon distribue le pain entassé dans de belles corbeilles ; Achille sert les viandes. [...] Il s'adresse à Priam :

« Combien désires-tu de jours pour rendre les derniers honneurs au grand Hector ? pendant ce temps je suspendrai mes desseins et retiendrai l'ardeur de nos troupes.

- Si tu me permets, dit Priam, de faire paisiblement des obsèques à l'illustre Hector, j'en conserverai, Achille, la plus vive reconnaissance. Tu sais que, remplis de consternation, nous sommes renfermés dans la ville, et que la forêt et la montagne où nous irons chercher le bois sont éloignées. Neuf jours seraient consacrés aux pleurs dans nos maisons, le dixième nous commencerions les funérailles, et donnerions au peuple le repas funèbre ; nos mains, le jour suivant, érigeraient la tombe. Après cela nous combattrons, si la nécessité nous l'impose.

- Vénérable Priam, répond le héros, tes désirs seront accomplis ; je ne permettrai point qu'avant ce temps on revole dans la lice des combats.

En disant ces mots, il met sa main dans celle du vieillard pour dissiper entièrement ses alarmes. […]

Hermès a préparé les chars : il conduit les deux Troyens et leur fait traverser le camp avec rapidité, sans être vus d'aucun des Grecs. Dès qu'ils arrivent au bord du Xanthe, fameux par son beau cours, et né de l'immortel Zeus, Hermès reprend son vol vers le haut Olympe : déjà l'Aurore répandait ses rayons de pourpre sur la face de la terre. Le roi et son héraut s'avançaient vers la ville avec des gémissements et des plaintes ; marchant à la tête, les mules traînaient le cadavre. Aucun des habitants de Troie ne les aperçut avant la belle Cassandre ; montée dans la citadelle, elle vit son père debout sur le char, et le héraut dont Troie connaît la voix ; elle vit le corps inanimé, étendu sur le lit funèbre, et amené par les mules. A cet aspect elle jette des cris perçants, et fait retentir la ville entière de ces paroles :

« Troyens et Troyennes, si vous reçûtes souvent Hector avec des transports de joie lorsque, plein de vie et triomphant, il revenait des combats, sortez maintenant en foule et allez recevoir le cadavre de ce héros ; il fit la gloire de Troie et de tout le peuple. »

A ces mots, tel est le deuil de tous les citoyens, il n'est personne, ni homme ni femme, qui reste dans la ville ; tous courent hors des portes à la rencontre du cadavre qui s'approchait de Troie. A leur tête, la tendre épouse et la mère vénérable d'Hector, précipitées jusqu'au char, s'arrachent les cheveux sur ce corps, et l'embrassent, environnées de tout un peuple qui fond en larmes. Et l'on eût passé tout le jour à regretter et à pleurer Hector devant les portes de Troie, si le vieux Priam, du haut de son char, n'eût pris la parole :

« Ne fermez point, dit-il, le passage aux mules ; quand nous aurons conduit le corps dans le palais, vous pourrez faire éclater votre douleur sans contrainte. »

Les flots du peuple s'ouvrent, et font place au char. Après qu'il est arrivé dans le palais, on dépose le corps sur un lit superbe ; on l'entoure d'un chœur dont les chants lugubres sont entremêlés de gémissements et de larmes ; et les femmes y répondent par des soupirs douloureux. [...] Lorsque Priam interrompt les plaintes :

« Troyens, il est temps d'amener le bois pour le bûcher. Ne craignez point d'embuscades de la part des Grecs ; Achille, à mon départ de sa tente, m'a promis de ne point tourner contre nous les armes, que nous n'ayons vu paraître la douzième aurore. »

Aussitôt attelant et les bœufs et les mulets, ils sortent en foule hors des murs. Neuf jours sont employés à dépouiller la forêt de ses sapins et de ses chênes, et à dresser le bûcher. À peine l'aurore annonce aux mortels le retour de la lumière, que les Troyens versant d'abondantes larmes, portent hors du palais le corps de l'intrépide Hector, et le placent au sommet du bûcher, qu'ils allument de toutes parts.

Le lendemain, dès que les cieux sont parsemés des rosées de l'aurore matinale, un peuple immense se hâte encore d'entourer le bûcher de l'illustre Hector : des flots de vin teignent les flammes qui se répandirent dans tout le bûcher avec furie. Les frères et les amis d'Hector rassemblent ses os blanchis, non sans répandre de nouvelles larmes ; elles coulent en torrents le long de leurs joues. Ils placent ces os dans une urne d'or ; et la couvrant de voiles de pourpre d'une étoffe douce et moelleuse, ils se hâtent de la déposer dans une fosse profonde sur laquelle ils entassent de grandes pierres, élèvent avec précipitation le tombeau : et de toutes parts des gardes étaient attentifs aux mouvements des Grecs, de peur qu'ils ne surprissent la ville avant qu'elle eût accompli ce pieux devoir. La tombe étant élevée le peuple se rassemble en foule dans le magnifique palais de Priam, qui leur donne avec splendeur le repas funèbre.

Tels furent les derniers honneurs que les Troyens rendirent au vaillant Hector.

Les coutumes funéraires des HÉROS GRECS - les funérailles de Patrocle et Hector
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