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Arya-Dharma, l'héritage des spiritualités premières

La DAME BLANCHE (mythe français)

En France, le mythe de la dame blanche découle directement de celui de la nymphe fatale. Chez Amélie Bosquet (La Normandie romanesque et merveilleuse), nous trouvons ces quelques lignes intéressantes :

*

Nous connaissons encore en Normandie une autre espèce de fées appelées dames blanches. Ce sont des spectres en forme de femmes, qui se plaisent à surprendre les voyageurs égarés la nuit. Les dames blanches dressent leur embûche dans les passages étroits, tortueux, difficiles, où leur rencontre ne peut être évitée ; tantôt c'est au fond d'un ravin, tantôt c'est au gué d'une rivière, ou sur quelque pont rustique que deux personnes ne pourraient traverser de front. Bekker, auteur du Monde enchanté, rapporte, d'après Corneille van Kempen, Schott, Delrio, Picart, Wier et Kippingius, que les dames blanches habitaient des cavernes, espèces d'enfoncements souterrains qu'elles pratiquaient au sommet des collines. Elles enlevaient les bergers qui gardaient les troupeaux pendant la nuit, les femmes nouvellement accouchées, les enfants, et conduisaient dans leurs repaires ces malheureuses créatures.

Les femmes en couches parvenaient cependant à apaiser la colère jalouse des dames blanches, et même à se les rendre favorables, lorsqu'elles avaient le soin de tendre un drap blanc autour de leur lit… En Allemagne, où les dames blanches ont acquis, en quelque sorte, droit de nationalité, il en est parmi elles qui s'attachent à certaines maisons, certaines familles, dont elles se font le génie protecteur. Nous avons signalé déjà ce trait de caractère dans les fées magiciennes : ainsi Mélusine et nos fées de Pirou…

Les dames blanches, ou les bonnes dames, les bonnes et franches pucelles, comme on disait encore en parlant des fées, devenaient quelques fois de libérales pourvoyeuses, employées à des fonctions que, sans aucun doute, elles avaient empruntées aux déesses-mères. Elles se réunissaient en troupe et pendant la nuit visitaient les celliers, parcouraient les maisons, goûtant même aux provisions sans qu'il y parût ; dans ces excursions, elles étaient commandées par dame Abonde ou Habonde, leur reine, que l'on nommait ainsi, dit Guillaume d'Auvergne, parce qu'elle répandait l'abondance dans les lieux qu'elle fréquentait. Dame Abonde, à la tête de ses fantômes, était confondue avec le démon, chef des chasses fantastiques : Diane ou Hérodias. Mais notre fée se rapprochait d'autant mieux de Diane que les anciens prêtaient souvent à cette dernière, sous le nom de Proserpine, les attributs de Cérès. [...]

Voici ce que la tradition en rapporte : un seigneur d'Argouges, près de Bayeux, étant à la chasse, fit la rencontre d'une troupe de vingt femmes d'une rare beauté, toutes montées sur des chevaux blancs comme la neige. Une d'entre elles paraissait leur reine, et le seigneur d'Argouges en devint si subitement amoureux qu'il lui offrit aussitôt de l'épouser. Cette dame était une fée ; depuis longtemps elle protégeait, en secret, le sire d'Argouges ; même, elle lui avait fait remporter la victoire, dans un combat qu'il avait livré à un terrible géant. Comme elle aimait son protégé, elle voulut bien consentir à accepter sa foi, mais sous la condition expresse qu'il ne prononcerait jamais devant elle le nom de la Mort. Ce n'était pas une exigence à faire reculer un amoureux aussi passionné que le sire d'Argouges. Le mariage eut lieu sous les plus doux auspices ; de beaux enfants, qui naquirent de leur union, vinrent bientôt augmenter la joie des deux époux. Le sire d'Argouges s'observait si bien qu'après plusieurs années de bonheur, le mot désastreux ne s'était pas encore échappé de sa bouche. Aurait-on cru, hélas ! que cette félicité, soigneusement veillée, dût s'évanouir par la plus triviale des fatalités : la redite d'une locution familière ? Un jour que les deux époux devaient assister à un tournoi, la dame, occupée à sa toilette, se faisait trop attendre ; elle parut enfin ! Mais le sire d'Argouges, qui dévorait depuis longtemps son impatience, ne put modérer tout d'abord l'expression de son dépit, « Belle dame, dit-il à sa femme en l'apercevant, vous seriez bonne à aller chercher la mort, car vous êtes bien longue en vos besognes. À peine avait-il prononcé cette apostrophe fatale que la fée jeta un cri aussi déchirant que si ce mot lui eût, en effet, porté un coup mortel, puis elle disparut en imprimant sa main sur la porte du château. Toutes les nuits, vêtue d'une robe blanche, elle revient errer autour du manoir seigneurial, en poussant de longs gémissements, parmi lesquels on distingue ce cri funèbre : la mort ! la mort !

La DAME BLANCHE (mythe français)

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