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Arya-Dharma, l'héritage des spiritualités premières

La diseuse de bonne aventure (la GITANE)

Si la nymphe connut son âge d'or durant l'Antiquité et si la sorcière connut le sien au Moyen Âge, le mythe de la femme fatale et sensuelle est propre aux temps modernes. Il s'agit en vérité du même mythe, qui jamais ne cesse de se renouveler. Les conteurs folkloriques, qu'ils soient poètes ou linguistes, tout comme Walt Disney, participèrent grandement à la réactualisation perpétuelle de cette figure féminine ancestrale.

Mentionnons donc un des plus récents mythes européens : celui de la gitane diseuse de bonne aventure. À mi-chemin entre la chamane ancestrale (voyance), la sorcière médiévale (voleuse) et la femme fatale (beauté) des films hollywoodiens du début du 20e siècle, la gitane réactualise le mythe de Salomé ou celui de Lilith, mais surtout celui de la devineresse Sibylle. Dans sa revue critique de The Zincali (1841), la monographie de George Borrow consacrée aux gitans, Philarète Chasles résume très bien ce personnage. Dès l'arrivée des premiers gitans en Europe vers 1450, il fut une source de cliché comme de profond fantasme (en témoigne la foisonnante littérature romantique à son sujet) :

*

C’est une femme de taille moyenne, brune ou plutôt noire, et dont tous les mouvements annoncent l’agilité et la vigueur. Sa figure est ovale, ses traits réguliers sont durs et aigus, sa chevelure sans ornement, noire comme l’ébène, retombe en boucles naturelles sur ses épaules, son regard est farouche, pénétrant et rusé ; sa bouche, délicatement dessinée, laisse briller des dents fines et blanches, à faire envie aux plus coquettes et aux plus fières beautés de Naples ou de Paris ; à son col est suspendu un enfant noir comme elle, aux yeux étincelants et dont la physionomie porte déjà les caractères de sa race, malice, ruse et sagacité. De larges anneaux d’or faux sont suspendus à ses oreilles, et des sandales protègent ses pieds. » Elle est la Gitana ; la gypsy, la bohémienne, la sorcière du Moultan, la femme de cette race inconnue qui a couvert d’un flot immonde toutes les contrées de l’Europe, toujours misérable, coupable et inflexible. [...]

Tous les mauvais penchants de l’humanité sont servis et exploités par cette femme qui éveille la cupidité, dérobe les trésors, sert les intrigues, fraie la route aux assassins, indique les moyens et les ressources de la fraude, et conserve deux seules vertus, mais avec un étrange acharnement, la pureté féminine et l’amour de la famille. Sa journée finie, journée toute vouée au pillage, au dol, la ruse, à la débauche qu’elle excite chez les autres, mais qu’elle repousse, elle rentre heureuse et fière dans son repaire, et là, elle retrouve sa caste qui parle le même langage qu’elle et qui habite une caverne dans un bois désert, une cave dans le faubourgs, un grenier abject sous quelque toit de Séville, de Madrid ou de Cordoue ; car il y a de ces romi (tel est leur nom véritable et sacré) de ces kali (noirs) ou zinkali (noirs de l’Inde), non-seulement en Espagne, mais en Russie, en Hongrie, en Allemagne, en Angleterre, en Italie, où ils ont été tour à tour nommé égyptiens (gitani), gypsies, bohémiens, zingari, zigeuner. Partout ils ont les mêmes mœurs et se servent des mêmes mots, diversement modifiés par la syntaxe et les habitudes du pays qu’ils saccagent plutôt qu’ils ne l’habitent.

La diseuse de bonne aventure (la GITANE)

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