Existait-il un MONOTHÉISME ANCESTRAL ? Quelques avis et pistes de réflexions

Existait-il un monothéisme ancestral ?

Quelques avis et pistes de réflexions

Le raisonnement de l'anthropologue écossais Andrew Lang (1844-1912) sur la notion sauvage d'un Dieu Père universel et Juge des hommes, est résumé par son confrère français Salomon Reinach (1858-1932) : « Quand un sauvage fabrique un outil, il sait qu'il en est l'auteur ; l'analogie doit ou peut l'induire à croire que le monde environnant est aussi l'œuvre d'un fabricant. Raisonnant encore par analogie avec lui-même, le sauvage paraît plus disposé (ici le doute est permis) à admettre un fabricant unique que plusieurs. En outre, le sauvage obéit à des tabous ou scrupules, à des règles de cérémonie et d'étiquette ; il sait d'ailleurs qu'il peut contraindre à l'obéissance sa femme et ses enfants. De là il conclut naturellement que les règles auxquelles il se soumet, et dont beaucoup coïncident avec nos préceptes de moralité, doivent avoir été dictées par un Maître [...] » (Andrew Lang et l'Histoire des religions, in Quaterly Review, avril 1913.)

Selon la vision très évolutionniste d'Alfred William Howitt (1830-1908), si les tribus de la côte et des plaines les plus irriguées, ont la croyance envers « les dieux élémentaires », ce n'est pas le cas des tribus les moins civilisées. Il s'agit alors d'une sorte d'athéisme animiste évoluant vers un polythéisme, la croyance en des pères universels allant « de pair avec le progrès social que l'on constatait sur la côte et les provinces bien irriguées. » Il s'agirait alors d'un athéisme animiste primordial, qui évoluerait ensuite vers le polythéisme.

Cependant, pour le mystique et universitaire roumain Mircea Eliade (1907-1986) : « Il est hors de doute que la croyance en un tel Être suprême, vivant au ciel, est l'une des traditions les plus anciennes et les plus authentiques des indigènes du sud-est. Cette croyance a été observée avant l'installation des missions chrétiennes. » (Religions australiennes, 1972). Le savant roumain cite à propos le serpent cosmique australien : « Il apparaît donc que la création, la pluie, la fécondité et les pouvoirs surnaturels des hommes-médecines remontent tous à une seule et même source : un Être suprême primordial, à structure cosmique. »

Au début du 21e siècle, une étude statistique du professeur Hervey C. People (Cambridge), proposa une réponse sans parti pris. Selon son étude, le dieu unique et primordial n'est pas une constante universelle, même s'il demeure très présent chez les « primitifs ». Si les tribus analysées déclarent être animistes (100 %) ou suivre largement une forme de chamanisme (80 %), le culte du grand dieu et la croyance en un dieu actif ne sont partagés que par 40% et 15% des tribus étudiées.