23 Décembre 2021
J’ai bu du vin dans un verre brillant
Avec les chefs de la guerre cruelle :
Mon nom est Merlin, fils de Morvryn.
J’ai bu du vin dans un gobelet
Avec les chefs de la guerre dévorante :
Merlin est mon nom glorieux.
Qui est Merlin exactement, lui que Disney qualifiait d'enchanteur ? C'est L. Faure-Goyau qui nous renseigne, dans La vie et la mort des fées :
« Certains le crurent fils d’une vestale et d’un consul romain ; d’autres le dirent fils d’une vierge chrétienne et, selon leurs croyances, d’un génie païen ou d’un esprit réprouvé. C’est lui qui symbolise les luttes religieuses de la Bretagne. D’après la légende, il aurait vécu sous beaucoup de rois ; dès sa plus tendre enfance, il se serait signalé par des prodiges à la cour du tyran Wortigern ; les plus fameux chefs bretons, Ambroise-Aurélien, Uter-Pendragon, Arthur, se seraient laissé guider par ses conseils. Il aurait été lui-même un prince commandant aux « Démètes » [Pays de Galles] superbes, et possédant la science de l’avenir. Rome même, et l’empereur Jules César, auraient expérimenté son pouvoir de divination. Il était prophète, magicien. […] Merlin appartient aux traditions païennes ; il incarne les coutumes druidiques. S’il fut baptisé par sa mère, il n’a point vécu selon l’Évangile ; et même on l’accuse d’avoir déchiré le saint livre. Sa lutte contre les moines fut une âpre guerre. »
Tel un prophète païen, Merlin est un sorcier bénéfique qui porte le bâton sacré des mages. Notons alors avec intérêt l'étymologie de « Merlin » : le merlin est un outil de bûcheron, semblable à la cognée. Comme nous l'indique Wikipédia, « cet outil est à mi-chemin entre la hache et la masse ». Cet objet ne peut donc manquer d'évoquer le marteau de Thor, le bâton d'Ogmios, la cognée d'Hercule, le baresma perse ou encore la torche enflammée de Bacchus.
« Le grand enchanteur Merlin, fils d'une honnête paysanne et d'un esprit nocturne, avait le don de seconde vue et la science des enchantements. Il commandait, en se jouant, au monde visible et au monde invisible. Mais il n'usait de son pouvoir qu'à bon escient. Les rois se disputaient sa compagnie. Le peuple riait de ses boutades et les répétait de l'un à l'autre. Merlin, insoucieux de son pouvoir et de sa renommée, n'aimait rien tant que la solitude, qu'il allait rechercher au cœur des forêts. » R. Dévigne, Légendaire des provinces françaises.
Enfin, tout comme Cernunnos est associé à Cernunna et Shiva à Parvati, le sorcier et ermite Merlin forme un couple avec la fée Viviane, qu'il rencontra dans la forêt de Brocéliande (Paimpont, Bretagne).
POÉSIE MÉDIÉVALE - La Quête du Graal, introduite par Michel ZINK (Académie royale de Belgique, 2009)
Voici la publication du mardi, jour dédié aux poètes français du Moyen-Âge :Une conférence de Michel Zink donnée, le 20 janvier 2009, à l'Académie royale de ...