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Arya-Dharma, l'héritage des spiritualités premières

La voie des justes et celle des méchants (la morale mazdéenne)

Extrait de l'Avesta, yasht 1 et 22 (trad. de Harlez)

 

Zarathoustra demanda à Ahura-Maada :

« Ahura-Mazda, esprit très saint, créateur de tout ce que l'on peut apercevoir, dis-moi : lorsqu'un juste vient à mourir, où son âme séjourne-t-elle la nuit suivante ? »

Alors Ahura-Mazda lui dit :

« Elle demeure près de sa tête et répète la prière d'espoir et de salut. Pendant cette nuit, l'âme goûte autant de joie qu'en éprouve l'ensemble du monde vivant. »

« Pendant la deuxième nuit, où séjourne son âme ? » demanda encore Zarathoustra.

Ahura-Mazda lui répondit qu'il en était de même pour les trois premières nuits, mais qu'à partir de la troisième nuit, une lueur commençait à poindre. L'âme se dirige alors vers les plantes et en respire la douce odeur. Sur elle, souffle une brise venue des plus méridionales des régions méridionales, emportant avec elle le meilleur des parfums. L'âme respire alors profondément ce parfum, quand apparaît devant elle une belle jeune fille de quinze ans, aux bras roses et frais, grande, forte et majestueuse, à la silhouette élancée et fière. C'est la plus radieuse des créatures.

L'âme du juste lui demande qui elle est. Sa propre nature lui répond :

« Je suis tes bonnes pensées, tes bonnes paroles et tes bonnes actions, la nature même de ton propre corps.

- Qui t'a faite si glorieuse, si parfaite, si belle ? lui demande l'âme. D'où vient ce parfum si parfumé, si triomphant, grâce auquel tu domines tes ennemis et telle que tu te présentes à présent devant moi ? »

- C'est toi, ô jeune homme, qui m'a faite ainsi car je suis formée de tes bonnes pensées, de tes bonnes paroles et de tes bonnes actions. Lorsque, là-bas sur Terre, tu remarquais quelqu'un qui pratiquait la sorcellerie, séduisait illégitimement, refusait de répondre à toute demande, ou encore déracinait les arbres, alors tu t’incluais et tu récitais les prières à voix haute en rendant hommage aux eaux et au feu. Tu cherchais à satisfaire, par des cadeaux ou des services, le fidèle, qu'il soit de ton village ou qu'il s'en vienne de loin. Ainsi tu m'as rendue, moi qui suis d'un bon naturel, encore plus aimable. Moi qui suis belle, tu m'as rendue encore plus belle. Moi qui suis désirable, tu m'as rendue plus désirable encore. »

L'âme du juste fait alors un premier pas et le pose dans le Humata, le domaine de la pensée correcte. Elle fait ensuite un second pas et le pose dans le Hukhta, le domaine des paroles de vérité. Elle fait encore un troisième pas et le pose dans le Huvarstha, le domaine des actions correctes. Enfin, au terme du quatrième pas, l'âme du juste, se pose dans le domaine de la lumière sans origine.

C'est alors qu'un juste, mort auparavant, l'interroge et lui dit :

« Comment, ô juste, es-tu mort ? Comment es-tu venu depuis la Terre où vivent les troupeaux ? Comment es-tu passé du monde corporel, au monde spirituel, et de l'univers périssable à l'univers impérissable ? Comment le bonheur te fut - il offert à jamais ? »

Cependant, moi, Ahura-Mazda, je l’interromprai :

« Ne la dérange pas avec tes questions ! lui dirai-je. Cette âme s'en revient de loin et a traversé bien des épreuves. Son chemin fut difficile car elle a dû en passer par la séparation du corps et de l'esprit. »

Je demanderai ensuite qu'on apporte pour cette âme de quoi manger et je veillerai à ce que cette nourriture soit cuisinée avec les meilleures huiles. Mangeront de mes plats les âmes des hommes qui pensent, parlent et agissent avec sainteté, ainsi que celles des femmes qui sont obéissantes et soumises à leur chef.

Aux sages qui me rejoignent dans mon domaine céleste, je leur présente alors mes créatures : Vohu Manah, Asha Vahista, Armaiti, Kshathra, Haurvatat et Ameretat. Ensemble ils forment les saints archanges immortels. Vohu Manah est l'esprit saint, Asha est l'ordre juste de l'Univers, Armaiti est la Dévotion généreuse, incarnée par la Terre. Elle est la Grande Mère, celle qui préserve et distribue l'amour. Kshathra est l'Empire, la Puissance, Haurvatat est l’Honnêteté, la Santé, l'Eau et la Perfection. Ameretat est l'Immortalité, aussi bien sur Terre que dans l'au-delà. Voici donc les récompenses que peuvent attendre les sages. »

Zarathoustra demanda encore :

« Lorsqu'un méchant vient à mourir, où séjourne donc son âme la première nuit ? »

- Elle court autour de la Terre, tout en récitant ces quelques vers que prononcent les persécutés : « vers quel pays me dirigerai-je, où fuirai-je ? » La première nuit, l'âme ressent autant de souffrance que le monde vivant tout entier en ressent. Il en va de même pour les deux nuits suivantes. Lorsque la troisième nuit est écoulée et que la lumière paraît, l'âme du méchant arrive dans un lieu horrifique où flotte dans l'air une infecte odeur. Là, souffle un vent venu de l'ouest qui répand sur son passage la plus fétide des odeurs. L'âme du méchant la respire puis s'étonne de cette puanteur, la plus horrible qu'il n'ait jamais sentie. « Je suis ton odeur, lui dit-on. Je suis le parfum que sur Terre tu laissas derrière toi, marquant ton passage par ta cruauté, ton ignorance, tes mensonges et tes infidélités. » L'âme du méchant fait alors un premier pas, qui la mène dans le domaine des pensées vicieuses et criminelles. Son second pas la mène dans le domaine des paroles de haine et d'insulte. Son troisième pas la mène dans le domaine des actes interdits. Son quatrième pas la fera sombrer dans les ténèbres sans origine.

C'est alors qu'un pécheur, mort avant lui, l'interroge : « Comment es-tu mort, comment es-tu passé du monde corporel au monde spirituel, du monde périssable à celui qui ne connaît pas de fin ? Comment ce malheur éternel t'est-il arrivé ? »

C'est alors que du plus profond des abysses se fait entendre Ahriman, l'Esprit du Mal, qui s'écrie alors :

« Ne dérange pas cette âme avec tes questions ! Elle s'en revient de loin et a traversé bien des épreuves. Son chemin fut difficile car elle a dû vivre la séparation du corps et de l'intelligence. Qu'on lui apporte du poison car c'est cela qui convient aux hommes dont les pensées, les paroles, les actions et les passions ont été mauvaises. Qu'on donne aussi la même chose aux âmes des filles de mauvaise vie, dont les pensées, les paroles, les actions ont été en plus souvent mauvaises que bonnes, et qui mal gouvernées, vivent indépendantes de tout chef. »

 

Les mêmes mythes se retrouvent dans le Livre d'Arda Viraf :

 

« Les trois premières nuits, ils avaient vu plus de vices et de mal que dans toute leur existence sur Terre. Je demandai donc à Srosh et Adar quelles étaient ces âmes et ils me répondirent :

« D'abord, l'âme des méchants erre là où la vie les a quittés, puis elle s'inquiète et dit : « Créateur, Ahura Mazda, où dois-je aller, où dois-je me réfugier ? » Cette première nuit, l'âme la passe à vivre autant de malheur et de peine que peut causer la vie d'un homme qui vit du malheur et de la peine des autres hommes.

Ensuite, un vent glacial se lève sur elle. Ce vent souffle depuis le nord, depuis la demeure des démons, et ce vent pue plus que toutes les mauvaises odeurs que cette existence aurait pu expérimenter alors qu'elle était encore en vie. À travers ce blizzard, le méchant aperçoit alors sa religion et ses propres actions sous la forme d'une femme alanguie, nue, décomposée, étouffée, aux jambes difformes et aux maigres hanches. Aux difformités s'ajoutaient d'autres difformités et cette créature [khrafstar, monstre] était bien la plus hideuse, la plus dégénérée, la plus sale et la plus puante qui jamais ne fut. C'est alors que l'âme du méchant s'adresse à cette créature : « qui es-tu, toi qui es la plus laide, la plus sale et la plus puante créature d'Ahura Mazda et d'Ahriman que je n'ai jamais eu l'occasion de rencontrer ? »

Alors le monstre lui répond : « Je suis tes mauvaises actions, ô jeune aux pensées mauvaises, aux paroles mauvaises et adonné à la religion du mal. C'est par ta faute et par ta volonté que je suis vile et hideuse, fausse, malade, pourrie et nauséabonde, malchanceuse et angoissée, telle que j’apparais devant toi. Quand tu trouvais sur ton chemin ceux qui pratiquaient les cérémonies du Yazishn et du Dron, quand tu les voyais adresser leurs louanges et prier, au service de Dieu, préserver et protéger l'eau et le feu, le bétail et les vergers et toutes les autres créations bénéfiques, quand tu fus témoin de tout cela, par tes mauvaises actions, tu as fait la volonté d'Ahriman et des démons. Aussi, quand tu voyais ton voisin offrir l'hospitalité et donner à celui qui venait de loin et qui était du coin, tu fus avaricieux et tu fermas ta porte. Ainsi, bien que je sois impure, je me suis encore salie à travers toi, et bien que je sois effrayante, je le suis devenue encore plus à travers toi. Bien que j’aie été effrayé, je le suis encore plus après toi, et bien que j'aie habité dans les régions nordiques fréquentées par les démons, j'ai vécu encore plus au nord avec de toi. Tout ceci fut par la faute de tes mauvaises pensées, de tes mauvaises paroles et de tes mauvaises actions, car ce sont elles qui m'ont maudit depuis longtemps en me forçant à communier avec l'exécration et l'esprit malfaisant. »

Ensuite, l'âme du méchant s'avance ; son premier pas la mène à Dush-humat, le domaine des idées malsaines, le second à Dush-hukt, le domaine des insultes, le troisième à Dush-huvarsht, le domaine des mauvaises actions et après leur quatrième pas, elle se retrouve en enfer. » Arda Viraf, 17.

 

La voie des justes et celle des méchants (la morale mazdéenne)

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