22 Décembre 2021
Inventeur de la houe, le dieu mésopotamien Enlil est le garant des richesses agraires, mais aussi le facilitateur du travail des champs. Dieu de la fertilité, son activité sexuelle est sujette à de nombreux mythes, dont les plus connus sont ses aventures avec les déesses Ninlil et Sud (que la mythologie tardive syncrétisera en une seule et même parèdre).
Comme Shiva pour les doctrines shivaïtes et shaktistes, Enlil est une divinité de première importance, mais cette importance repose surtout sur son union avec une déesse. Tout comme Shiva n'est rien sans Parvati, les mythes sumériens nous représentent Enlil encore célibataire, en quête d'une femme qui l'aime et qu'il puisse aimer.
Sa parèdre, Ninlil, évoque donc sans surprise la grande déesse des Indiens. Qu'elle soit nommée Parvati, Shakti, Durga, Kali, Amman ou Dévi, la déesse-mère indienne est une Aphrodite Céleste, en tout point semblable à Cérès ou Ishtar. Sublimement belle, parfaitement attirante, grande séductrice, la grande déesse est aussi la grande prostituée, la grande tentatrice, la grande vengeresse. La grande déesse n'est cependant pas animée par le vice, bien au contraire. Si elle est la grande séductrice, c'est avant tout pour séduire les hommes qui doivent se tourner vers elle pour connaître le bonheur, la richesse ou l’éveil spirituel. Si l’avatar tamoul de Parvati, Abhirami, « la séductrice sans obstacle » est si belle, si lascive, si Ushas, la déesse védique de l’Aurore apparaît nue au-dessus du monde, ce n'est pas pour semer la jalousie, l'envie ou le lucre parmi les hommes, mais au contraire pour leur montrer, à travers l'immaculée beauté féminine, la vérité dans ce qu'elle a de plus beau, de plus simple et de plus authentique.
Le mythe d'Enlil et Ninlil présente de nombreuses ressemblances avec le mythe de Shiva et Parvati. Enlil est présenté comme célibataire, en quête d'une femme, il parcourt la Terre car quelque chose lui manque. Il en va de même pour Shiva qui possède d'innombrables mythes et contes populaires le présentant seul, en proie au doute et à la dépression parce que Parvati a quitté le foyer familial. Shiva s'incarne alors sur Terre, afin de la rechercher et de la ramener avec lui. Sans elle, il ne peut régner avec sérénité sur le monde. Au mythe indien décrivant Shiva visitant les castes les plus basses de la société pour retrouver sa parèdre, répond le mythe mésopotamien de la rencontre entre Enlil et Ninlil, alors que cette dernière se tient seule sur le pas de la porte, elle est prise pour une prostituée.
Enlil est présenté comme un marchand, c’est-à-dire un voyageur, un étranger, un perpétuel errant. Dans d’innombrables mythes indiens, Shiva est lui aussi présenté comme un voyageur, souvent un moine errant (sadhu).
Enfin, dans la Trimurti, la sainte trinité hindoue moderne, Shiva occupe la troisième place, celle du destructeur. Or, Enlil est lui aussi le responsable du déluge dans les traditions mésopotamiennes.
Dans une version de son mythe, Enlil n'obtient pas le consentement de Ninlil et la viole. Suite à ce viol, la communauté des dieux le condamne à l'exil en enfer. Enlil est donc une figure tout aussi tendancieuse que peut l'être le Rudra védique.
Dans une autre version, le désir entre les deux divinités est réciproque, mais c'est alors la famille de Ninlil qui s'oppose à cette union. On retrouve la même déconvenue dans le mythe de Sati, la fille du rishi Daksha qui refuse de se marier avec un déva car elle désire consacrer sa vie à Rudra. Son père lui interdit alors cette union, sous prétexte que Rudra n'était pas un brahmane, c'est-à-dire un fils de Brahma. En conséquence de ce refus, Sati se suicida par amour et par dévotion envers celui qu'elle s'était elle-même choisi.
Dans une version du mythe n'évoquant pas un viol mais un amour partagé, il est fait mention d'un plaisir charnel intense qui unit les deux partenaires lors de leur première nuit de noces (« Enlil fit l'amour à sa femme et en prit grand plaisir »). Cet accouplement désirable et agréable, qui donnera naissance à des enfants-dieux, nous le retrouvons dans chacun des mythes unissant Shiva à sa parèdre. Shiva est alors le maître de l'ascétisme, mais aussi le maître de l’abstinence. Il est donc le partenaire sexuel tantrique par excellence, le complément actif idéal à l'immanente puissance féminine.
Tout comme le mariage de Shiva et Parvati, celui d'Enlil et Ninlil est somptueux. Les cadeaux envoyés par Enlil au père de la fiancée sont très nombreux, parmi lesquels on remarque des animaux « typiquement » shivaïtes, tel que des aurochs (correspondant à l'avatar shivaïte Nandi), des singes (avatar Hanuman), des vaches (Dévi) et des éléphants (Ganesh). On retrouve aussi certains des animaux entourant le Cernunnos celte ou le Pashupati de l'Indus : des cerfs, des daims et des gazelles. Notons enfin la présence des panthères dans le cortège des offrandes nuptiales, animaux dionysiens par excellence.
De même que Shiva amène Parvati à Varanasi pour célébrer son union puis la consommer, Enlil mène Ninlil à Nippur, « sa » ville. Nippur était alors une ville sacrée entièrement dédiée à Enlil. Tout comme Varanasi est encore de nos jours la ville sainte de Shiva, Nippur était un des lieux de pèlerinages les plus importants de la plus haute Antiquité.
Un élève change de nom suite à l'initiation que lui a fait passer son gourou, c'est pourquoi Sati, ayant rejoint Shiva, devient Parvati. Ninlil elle aussi change de nom après sa première nuit avec Enlil. Plus encore qu'un acte sexuel, ou que l'union être deux concepts, il s'agit de l'union entre le corps et l'esprit, entre le temporel et l'intemporel, entre la matière et l'essence.
Enlil offrit à Ninlil plusieurs appellations, comme autant de qualificatifs à sa puissance : sa parèdre devient alors « la dame qui enfante ». Avec une nuance à double sens, elle est aussi « celle qui écarte les cuisses ». Déesse-mère, donc déesse de la fertilité, elle est celle qui fait naître les femmes mais aussi fleurir la nature et croître les champs ; elle est « la déesse du grain ». Enfin, de même qu'en Inde védique Sarasvati est la gardienne des Véda, la déesse de l'intelligence et de l'étude, Ninlil devint « la patronne des scribes ».
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