14 Janvier 2022
Le testament d'un roi mourant à son fils
v. -1950
Traduction française à partir de la traduction anglaise publiée en 2000 par l’University College de Londres, ainsi que celle de Aksel Volten (Zwei Altägyptische Politische Schriften, Analecta Aegyptica, vol. 6, Einar Munksgaard, Copenhague, 1945).
L'ordre du texte initial est respecté, ainsi que la numérotation. Les titres ont été ajoutés.
Fait sur ordre du roi Sehetepibra Amenemhat 1er, maître des deux Égypte, fils de Ra.
D'une voix parlant vraie, celui-ci enseigna à son fils les vérités qui vont suivre.
« Lève-toi comme un dieu, lui dit-il, et écoute ce que j'ai à te dire. Il se pourrait qu'un jour tu sois le roi de la Terre et que tu sois le maître des rives du Nil. Alors, tu pourras encore ajouter à cette œuvre la perfection. »
Garde-toi des intrigants, rien de bon ne peut advenir d'eux. Chacun d'eux met son cœur où se trouvent ses peurs. Ne les approche jamais seul, ne considère personne comme ton frère, ne te fais pas d'ami ; ça n'en vaut pas la peine.
Car on n'a plus de serviteurs quand le jour maudit arrive. J'ai donné aux déshérités, j'ai donné aux orphelins, j'ai aidé celui qui n'avait rien comme au riche.
Ceux qui ont le plus mangé de mon pain furent aussi ceux qui déclenchèrent des révoltes. Celui à qui j'avais offert mon bras pour le protéger, nourrissait de la peur envers moi, celui que j'avais habillé de fins habits me regardait comme si je lui avais donné des nippes, et ceux que j’avais oints de myrrhe, se lavaient dans une eau sale…
Cependant, l'image que je renvoyais, ma propre différence envers le commun des mortels, fut pour moi un sujet de lamentations, que personne n'écouta. Malgré mon combat intérieur, je n'ai jamais percé mon secret et ce fut là une des plus belles de mes gloires.
Quand tu engageras le combat dans l'arène, soit conscient de ce qui t'a mené là, car rien de bon ne peut résulter d'un combat mal préparé.
C'était après le dîner, la nuit venait de tomber. Je me suis pris une heure de repos. J'étais fatigué, je me suis allongé sur mon lit. Mon cœur a ralenti son rythme, j'allais m'endormir… Quand se sont jetés sur moi des légions de traîtres : j'étais fait comme un serpent dans le désert !
Réveillant mon garde du corps, je comprenais alors que celui-ci était infiltré parmi les traîtres et que les soldats se battaient. Si j'avais eu à portée de main une arme, j'aurais eu l'ascendant dans la confusion, mais au cœur de la nuit, personne ne joue les champions et quand on est seul et sans protecteur, personne ne peut s'assurer d'un succès !
Vois-tu, cette attaque s'est déroulée alors que j'étais loin de toi. Avant que l'on annonce que j'abdique en ta faveur, et parce que je n'ai pas été capable de devancer cette attaque contre moi, je voudrais te dire quelque chose. [2 lignes manquantes]
Est-ce que des femmes se sont déjà réunies en légions ? Est-ce que des traites furent nourris dans nos maisons ? Est-ce que les barrages furent ouverts alors que les digues n'étaient pas encore terminées et que des villageois travaillaient à leur construction ? Aucun de ces désastres nous n'avons été témoins depuis ma naissance. Et si jamais des calaminés nous ont accablées, j'ai toujours œuvré selon mon devoir.
J'ai agrandi le royaume vers le sud et Abu, et vers le nord et les Marches. Je me suis tenu à l'extrémité du monde et j'ai vu ses contours. J'ai atteint les limites de la puissance, par la force de ma volonté et la grâce de mon pouvoir.
J'étais alors un simple paysan, béni de Nepri, le dieu des grains et des récoltes. À chaque saison, le Nil m’honorait de ses inondations. Personne n'avait alors ni faim, ni soif. Le peuple, qui se reposait en profitant de ce que j'avais fait, racontait des légendes dont j'étais le héros. Tout ce que j'avais toujours décrété avait maintenu les choses à leur correcte place.
J'ai piégé les lions et fait fuir les crocodiles. J'ai dominé les Assouanais nubiens et déporté leurs guerriers Medjay. Quant aux Hyksos d'Asie, je les ai fait marcher au pas.
J'ai couvert ma maison d'or. Les plafonds sont en lapis-lazuli, les murs en argent, le sol en marbre, les portes en cuivre, leurs vérins en bronze. Tout cela a été bâti pour l'éternité, et conçu pour ne jamais faillir. Je le sais car j'en suis le créateur et mon œuvre n'est autre que moi.
Cependant, il demeure bien des mensonges qui vont par les rues. Ça, les sages le savent, mais les fous refusent de l'accepter, car ne peut rien savoir celui qui ne veut rien voir.
Ô mon fils Senusret, vit, prospère, soit bon ! Je ne sens plus mes jambes, mais c'est à toi seul qu'appartient mon cœur, depuis le jour où je t'ai vu naître. Le peuple du soleil était alors en adoration devant toi.
Vois comme j'ai ordonné le passé et prévu l'avenir, car le futur contiendra tout ce que contient mon cœur et que j'ai réuni pour toi. Revêts à présent la couronne blanche des fils de Dieu, le spectre t'appartient, comme je l'ai ordonné.
[Nombreuses lacunes, en partie reconstruites :] Augmente encore la gloire de la royauté. Deviens ce qui était. Élève des monuments, embellis ce qui est déjà. Bats-toi.
Il n'y a rien qui ne soit plus digne de mon amour que ce que tu entreprendras. Vit ! Prospère ! Sois bon ! »
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