Le DIEU ARTISAN à travers le monde

La mythologie dogone présente le premier forgeron comme le premier conteur. C'est un des premiers êtres que Dieu (Amma) envoie sur terre. C'est aussi une figure prométhéenne :

« Il a donné le fer aux hommes sous forme de houe, signalant ainsi le début de l'agriculture. C'est lui qui a délimité le premier champ : un carré de 80 coudées de côté, divisé en 80 fois 80 carrés d'une coudée répartis entre les huit familles descendantes des premiers ancêtres. Il purifia le sol souillé par la faute du chacal en y mettant du torchis céleste, toute entreprise de culture devant dès lors faire reculer l'impureté de la terre. […] Sur le plan symbolique, la masse du forgeron est la main palmée du Génie de l'eau, le Grand Nommo mâle du ciel et l'enclume sa femelle. Quand la masse frappe l'enclume, le couple s'unit. » Goisbeault, Un mythe de création ; le mythe dogon.

Dans le vaudou du Dahomey, Gu est le dieu du fer et des forgerons. C'est un dieu civilisateur qui a rendu la terre habitable grâce à la force de Mawu (Dieu premier) qui l'habite. Dans le Dahomey moderne, il est le protecteur des chauffeurs et des mécaniciens. Il représente le progrès et l’intelligence active. Son corps est en pierre, sa tête est une épée.

En Égypte, à Memphis, Ptah est un dieu à la fois artiste et artisan.

En Inde c'est Brahmanaspati (Brhaspati) « qui a soudé ensemble ces mondes, comme un forgeron. » (Rig-Véda, 10, 72. Trad. Renou) C'est aussi Vishnakarman, le dieu-architecte encore célébré de nos jours dans les garages et les usines :

« Dieu unique, il crée le Ciel et la Terre, il les soude ensemble avec les bras, avec les ailes. Quel était donc le bois et quel était l'arbre d'où l'on a charpenté le Ciel et la Terre ? […] Sur quoi s'appuyait-il quand il fondait les univers ? » (Rig-Véda, 10, 81. Trad. Renou).

Dans le Rig-Véda, Tvastar est le dieu forgeron, dont la forge est située à Indrapura, la cité céleste.

En Grèce, le forgeron divin est Héphaïstos (Vulcain), dont les Romains plaçaient la forge dans le Vésuve.

La Théogonie d'Hésiode mentionne les Cyclopes, artisans et forgerons : « La vigueur, la force et la puissance éclataient dans leurs travaux et ce sont eux qui remirent à Zeus le tonnerre et forgèrent la foudre. »

Le dieu artisan forgeron des Finnois est Ilmarine, il est l'artisan de la voûte céleste :

« Les bras pliés, ramenés dans le dos, la tête baissée, Ilmarine faisait impatiemment les cent pas dans le ciel, en lançant de temps à autre un coup d’œil sur la Terre hostile, créée par l'Ancien. Tout à coup, ne se retenant plus, il bondit vers sa forge, y jeta un énorme morceau de fer et se mit en devoir d'attiser le feu avec un soufflet. Wâjnâmôjne ne dit mot. Tout en observant le travail de son frère, il hochait la tête d'un air grave. La chaleur de la forge teinta de rouge son visage et dans ses yeux voltigeaient les reflets d'or des flammes. Le métal fut enfin chauffé à blanc : Ilmarine le mit sur l'enclume et commença à le battre avec un lourd marteau. Longtemps sonna le marteau dans la forge du héros. Petit à petit, le métal prenait la forme d'un arc puissant, dont les deux extrémités se perdaient dans l'infini. Alors Ilmarine rejeta le marteau. Il attendit un moment que l'arc refroidisse, puis de ses bras puissants, il le souleva au-dessus de sa tête, et il le descendit au-dessus de la Terre. Une voûte gigantesque se déploya au-dessus d'elle, pour l'instant vide et inutile. » Le forgeron céleste et l'aède, in J. Serych, Légendes de la Lune, du Soleil et des planètes.

En Chine, Fuxi, le dieu de l'artisanat, tient dans ses mains une équerre (outils capable de tracer des angles), et Nuwa, déesse de la fertilité, tient dans sa main un compas (capable de tracer des cercles arrondis comme le ventre d'une femme enceinte).

Pour la tribu australienne Kurnai (Victoria) : « Il y a très longtemps existait un grand Être appelé Mungan-ngaua. Il vivait sur terre. Il enseigna aux Kurnais de cette époque à faire des outils, des filets, des canots, des armes ; bref tous les arts qu'ils connaissent. Il leur donna aussi les noms qu'ils portent. » (A. Van Gennep, Mythes et légendes d'Australie, E. Guilmoto Éditeur, 1906)

Enfin, la mythologie maya rapportée dans le Pop Wuh, présente Tzaqol comme l'« Architecte-Sculpteur ». Il est un des trois dieux primordiaux.