14 Janvier 2022
La Grande Prière de Nammalwar
Nammalwar, ou Nammalwar, aussi nommé Maran ou Sadagopan (Satokopan, Sadakopa) : naissance légendaire vers 3059 av. J.-C. et historique vers 700 ou 800 apr. J.-C.
La tradition témoigne que Krishna, au moment de quitter sa dépouille terrestre pour retrouver sa forme infinie, prophétisa que s'il ne reviendrait plus sur terre avant la fin des temps, des chanteurs et des poètes inspirés seraient envoyés sur terre pour chanter ses louanges, et que ceux-ci seraient inspirés par Vishnou, qui vivrait en eux : ce sont les Alvars.
Leurs œuvres poétiques, qualifiées de « Védas dravidiens », sont composées de chants d'extase et de dévotion, qui permirent de populariser le vishnavisme. À la fin du premier millénaire, ils vont composer un très grand nombre de traités, de poésies et de chants dont les thèmes seront les plus communs de l’hindouisme : le sens de la vie, le renoncement à la vie, l'attente d'un signe divin, la vénération et la dévotion totale à une divinité suprême, déification de la vie elle-même.
Les Alvars furent des sages et des contemplateurs qui dédièrent leur vie à Vishnou et à son avatar Krishna. Leurs œuvres poétiques, qualifiées de « Védas dravidiens » sont composées de chants d'extase, de dévotion et ont permis de populariser le vishnavisme. Le Naalayira Divya Prabhandham, compilé par Nathamun vers l'an 1000 est une anthologie de leurs œuvres. Autre chef-d’œuvre tamoul, le Periya Thiruvandhadhi. il fut composé durant le premier millénaire de notre ère, selon la légende par l'enfant ermite et muet Nammalvar, « le premier des Alvars ».
Poèmes introductifs en hommage à l’œuvre de Nammalwar
Composé par Sriman Nathamuni
Les vers de Nammalwar sont comme du nectar pour les adorateurs du divin, ils couvriront de bonheur chacun d'entre eux. Déterminer ce qui est permanent de ce qui ne l'est pas, est égal à milles Upanishads. Je me prosterne donc devant l’œuvre de Nammalwar, cet océan tamoul de la connaissance.
Composé par Iswara Muni
Ô mon esprit, médite aux pieds de Nammalwar, qui transmit en poésie tamoule le Véda. Souviens-toi du pays de Tiruvazhudhi, de la ville sacrée de Kurugur, et du joli fleuve du Tamraparni.
Composé par Sottai Nambikal
Je ne cesserai jamais de chanter, en mots et en pensées, la ville prospère et peuplée de dévots de Kurugur. Je ne penserai jamais à rien d'autre et je serai en excellente santé spirituelle, tant que je demeurerai sous les pieds de Nammalwar, qui est mon père et mon refuge.
Composé par Ananthaalwaan
Je me prosterne aux pieds du glorieux Ramanuja. En faisant cela, je serai en mesure d’apprendre et de comprendre les mille stances du Tiruvaymoli, qui est le Véda tamoul composé par le vénérable Nammalwar.
Composé par Bhattar
Les mille stances du Tiruvaymoli sont véritablement le Véda qui proclame la grandeur et les nombreuses vertus de Ranganath (Vishnou). La mère biologique du Véda tamoul est Nammalwar, qui l'enfanta, tandis que sa mère adoptive est Ramanuja, qui l’a nourri et fait grandir.
Aussi composé par Bhattar
Le Véda tamoul est contenu dans le Tiruvaymoli composé par Nammalwar. Il renseigne sur les cinq grandes vérités suivantes :
1, la nature de l'Atman, le divin universel et infini.
2, la nature du Jiva, l'existence.
3, le moyen pour le Jiva de rejoindre l'Atman.
4, les obstacles pouvant empêcher ce rapprochement.
5, Enfin, l’œuvre de Nammalwar nous enseigne que le but de la vie est d'être heureux grâce à la Moksha, l'illumination qui fait l'existence se dissoudre à jamais dans le Brahman, la dimension divine, universelle et infinie de l'univers.
Composé par Ramanuja
Ô mon esprit, grand bien te fasse, tu désires t’intéresser à l’œuvre du vénérable Nammalwar. Informe donc s'il te plaît le grand Alvar de mes difficultés. Prosterne-toi devant lui et fais-le entrer dans mon cœur. Dans la ville sacrée de Kurugur, situé sur les berges du fleuve Tamraparni, il est le maître des fleurs sur lesquelles les abeilles vont récolter leur miel. On l'appelle aussi Maran, souviens-toi et récite ses noms le plus souvent possible.
Invocation préliminaire, par Ramanuja
Esprit tumultueux, étudie donc le sens profond des 4000 hymnes de Nammalwar, récite-les, suit leurs conseils, reconnaît la gloire des Alvars. Dans une clairière, sur les berges d'une douce rivière, à l'abri d'un bosquet de santal, sous un arbre dont perle le miel, chantent les nombreux noms de celui qui est né dans la Ville sainte de Kurugur.
1
Mon esprit tempétueux, calme-toi ! Si enthousiaste, trop excité, tu cours pour servir le Seigneur, mais tu m'as oublié. Chantons plutôt ensemble et dans une langue raffinée, les divins auspices de celui qui s’aperçoit dans la teinte des pétales d'anémone.
2
Seigneur, si nous te glorifions, nous ne ferons que t'insulter, car nos paroles sont trop modestes. Ainsi, faudrait-il mieux ne pas t'honorer. De même, si nous pensons à toi, sauf à te manquer de respect, il ne faudrait penser qu'à toi, sans discontinuer. Ainsi, faudrait-il mieux ne pas penser à toi.
Seigneur d'amour et de compassion, toi dont les yeux sont rougis par la pitié, je t'en prie, écoute nos prières. Que l'on soit saint ou pêcheur, que l'on chante ou non ta gloire, nos actions ne sont motivées que par l'illusion.
3
Seigneur, il semblerait que ne pas te glorifier ni penser à toi serait pour moi la meilleure chose à faire. Cependant, à cause de mon humble condition humaine, même si je suis en mesure de comprendre la véritable nature de mes actes, je ne peux ni les prévoir, ni les empêcher. Ainsi, je suis l'éternel prisonnier de mes propres actes, que je ne sais ni tolérés ou réprimés.
Je suis ton serviteur, Seigneur, dis-moi ce que je dois faire ?
4
Krishna, océan de vertus, mon esprit à toi s'est enchaîné, et je n'ai d'autre désir que de chanter ta gloire. Car enfin, qui d'autre que moi, qui suis bénit de Vishnou, serait plus qualifié pour une œuvre si délicate ?
5
Seigneur tout-puissant, si je devais te chanter, je dirais que tu es comme une mère qui serait toujours douce avec moi, et comme un père qui serait toujours à mes côtés. Mais tu es aussi mon gourou, qui veille sur moi.
Ta mystérieuse et impénétrable gloire te fit boire sans danger, enfant, le lait empoisonné de la démone Putana, la sorcière responsable des maladies infantiles et fatales. Comme est étrange la manière que tu as de combattre tes ennemis !
6
Seigneur, incarné en Krishna, comment te révéleras-tu à moi ? À travers chacun des innombrables aspects de ta gloire, ou plus simplement en tant que toi-même, petite forme obscure dans l'immensité, bébé qui dort dans une feuille de ficus, à la dérive sur l'océan cosmique ?
Quels sont tes plans me concernant, moi qui depuis l'aube des temps n'ai toujours été qu'un ignorant ? S'il te plaît console-nous et sèche nos larmes. Sans ton aide, toi seul sais tout le mal que nous pouvons causer.
7
Seigneur, ton cœur est le palais de la déesse mère qui y trône sur un lotus. Le jour du grand déluge, c'est toi qui feras passer les mondes souterrains par-dessus Terre et qui submergera les univers.
En accord avec toi, mais sans me demander ma permission, mon esprit s'est déjà hissé jusqu'à tes pieds. Cependant mon ego, lourd de vice et de rancœur, désespérément demeure trop loin de toi.
8
Seigneur ! Doux comme le nectar, tu emplis le monde mais trop subtil, tu restes inconnu de nos sens et nos yeux ne peuvent te percevoir. Pourtant, sans en savoir l'origine, un immense et irrépréhensible amour nous a mené vers toi, s'il te plaît dis-nous donc pourquoi.
9
Mon âme, qu'il m'est difficile de me rapprocher de toi et du Seigneur ! Pourquoi devrais-je répéter cent et mille fois et sur tous les tons, que le Seigneur est tout-puissant et que je suis son serviteur ? Comme tout cela semble vain… Qu’il se passe ce qu'il doit se passer, la vie est un cadeau pour les créatures que nous sommes, il faut penser à autre chose et se réjouir de la vie.
10
Qui sommes-nous après tout pour oser nous approcher de Vishnou, qui n'est accessible, paraît-il, qu'à ceux qui demandent à des divinités d'intercéder auprès de lui ?
Celles-ci peuvent être au choix les huit dieux et déesses essentiels que sont La Terre, le Feu, le Vent, l'Eau, le Ciel, la Lune et les Étoiles, les onze Rudras, qui sont autant de plaies redoutables, les douze fils de la Lumière [Adityas], que sont Varuna, Mitra, le Soleil, la Lune, l'Amour, le Feu et Indra, ou bien encore les jumeaux Ashvins, qui sont les gardiens de la médecine.
Quelle valeur peut bien avoir aux yeux de Vishnou les dévotions menées par notre simple personne, qui même pieuse, n'est façonnée que de notre ego ? Cependant, les miracles ne naissent-ils pas des prières sans espoir ?
11
Seigneur, tu es la Terre, tu es l'espace dans laquelle elle flotte, tu es le vent qui traverse cet espace, tu es le feu et l'eau. Tu es la raison d'être et la force motrice des éléments primordiaux. Ta grandeur est sans égale et c'est toi qui fus le vainqueur du démon Ravana qui, pousser par son ego, voulu te combattre.
12
Mon esprit, tu me tortures, depuis toujours tu t'obstines à m’entraîner vers de misérables abîmes. Dans quel but recommencerions-nous ce terrible jeu du gardien et de son prisonnier ? Allons, cessons cette mascarade.
Même quand je tente de t'instruire sur la véritable nature du Seigneur, tu ne veux rien entendre et tu te fâches. Comprendras-tu enfin que vénérer Krishna est pour nous la meilleure chose à faire ?
13
Seigneur ! Mes prières ne sont pas dénuées de sens, car enfin, même ici-bas, les meilleurs gourous ne sont-ils pas ceux qui répondent aux attentes de leurs disciples, même si cela doit parfois leur en coûter ?
Or, à toi il ne t'en coûtera rien de m'accepter comme ton serviteur. Maître, révèle-moi ta forme divine dans toute sa splendeur.
14
[La sorcière] Putana, agissant en démone mais ignorant la véritable nature du bébé à la peau d'un bleu sombre qu'elle venait d'empoisonner, essaya de tuer Krishna en l’allaitant de son immonde mamelle.
Mon esprit, elle semble t'avoir empoisonné, toi aussi qui te complais dans la décadence et qui ne vis qu'en fonction de tes sens. Même parfaitement conscient des causes et des conséquences de tes actions, tu ne peux t'empêcher de vouloir les réaliser… En vérité, tout ce que tu fais, c'est d'entrer plus en avant dans un samsara marqué par la faiblesse, la souffrance et le démérite. Tout cela fera de toi un être plus vil encore que cette sorcière.
15
Mon esprit, tu oublieras ta détresse en chantant avec moi les nombreuses qualités du Seigneur ! Observe-le, il est en méditation, ses yeux rougeoyants sont clos, les vagues de l'océan des eaux primordiales lui caressent la plante des pieds. Dépeindre ainsi le Seigneur, ce n'est pas lui faire de tort, car cela nous permet d'avoir un contact direct avec lui, puis de s'en saisir comme objet de méditation.
16
Seigneur, si tu ne t'étais pas incarné en Krishna, un fils de rien qui grandit à la cour entourée de luxe et d'amour, si tu ne t'étais pas incarné en Vamana, un nain qui ne put se réclamer d'aucun lignage, tu ne serais pas en mesure de régner sur cette Terre, que jadis tu sauvas en t'incarnant en Varaha, le sanglier qui plongea au fond du déluge pour l'en dégager.
Tu es celui qui protège en période de destruction et celui qui fait prospérer en période de création, nous t'en supplions, initie-nous à tes secrets.
17
Capable de retirer des montagnes leur sommet aussi facilement que de bander son arc, il décapita les nombreuses têtes du démon Ravana, qu'il mit ensuite au bout de ses flèches pour les envoyer au plus lointain des quatre directions, le Seigneur peut donc, s'il désire se rapprocher de ses fidèles, s'incarner en de multiples avatars. Cependant, les vrais disciples du Seigneur sont ceux qui, même si jamais de leur vie ils ne l'ont aperçu en personne, n'en ressentent aucune haine et n'en diront jamais du mal.
18
Seigneur, malgré les cicatrices des morsures du serpent, qui furent si profondes qu'elles firent paraître bien légères les marques de la corde avec laquelle ta mère adoptive te liait à un poteau pour que tu ne fasses pas de bêtise, tu continues ton œuvre de création, et sans égard pour le ressentiment, tu crées les sentiments, que tu élèves en cause ultime de l'univers.
L'univers… N’est-ce pas de toutes tes formes la plus ancestrale ? Nous aideras-tu à la comprendre ?
19
Mon esprit, tu es bien naïf si tu commences à faire la liste des qualités du Seigneur, car elles sont innombrables !
Jadis, il y eut dans ce pays une guerre qui opposa cinq frères sans défense à une armée de démons, jour et nuit, Vishnou ne les a-t-il pas protégés ? Ne sais-tu pas qu'il leur assura même le succès ?
20
Il devrait avoir honte de manquer de tant de raison, celui qui espère voir un jour le Seigneur dans toute sa puissance, sous la forme du nain qui reçut du démon Bali le monde en offrande et qui pour le remercier lui donna l'un des sept univers souterrains pour royaume.
21
Les pieds en forme de lotus de Vishnou reposent sur le domaine sacrificiel et infernal que le démon Bali reçu en pénitence. Jadis, Vishnou avait envahi chaque parcelle de l'univers, conquit tous les mondes, englouti la terre.
Ce qu'il en reste aujourd'hui c'est sa grâce que je reçois, ce sont ses pieds qui reposent sur ma tête, empêchant ainsi mon esprit de sombrer dans le spiral du samsara.
22
Le Seigneur tout-puissant est entré en moi et il a pris possession de mon esprit : à présent je vois clairement la véritable nature de mes actes, je comprends la portée de mes pêchés. Toutes ces pensées qui ont pu si fièrement diriger ma vie, toutes ces pensées qui jadis me torturaient, elles s’enfuient de mon esprit, ne trouvant plus aucun espace où se cacher.
23
Mon esprit, que tu sois frêle, en vivant dans l'ignorance du Seigneur, ou que tu sois fort, en suivant sa doctrine, je vais te donner un conseil qui n'a pas de prix : le Seigneur est la véritable mère et le véritable père de tous les êtres vivants. Et ceci demeure vrai quelles que soient les attaques dont nous pouvons être victimes de la part des chiens enragés que Yama, le dieu de la mort et du jugement dernier, aura lâchés à notre poursuite.
24
Il est sans égal, celui qui a pris la forme de tant d'avatars. Depuis l'intérieur des choses, il est celui qui contrôle ces choses. Si jamais, ne serait-ce qu'un instant, ils étaient privés de sa protection, les univers collapseraient.
Quand les mondes seront dissous dans l'océan primordial, qui serait alors capable de témoigner de son immense générosité, lui qui fera de nouveau surgir du néant les créatures, afin que les âmes ne soient pas piégées dans l'immensité ?
25
Quoi que les gens fassent, laissons-les donc faire… A-t-on déjà vu sur cette vaste Terre qu'il soit possible de corriger leurs actions ?
Je me satisfais au contraire d'avoir chassé de mon esprit la rancœur et la mélancolie. Car enfin, ma tête n'est-elle pas la demeure du Seigneur éternel, qui par sa propre grâce, a germé dans mon esprit sous les traits délicats de Krishna ?
26
Ma conscience et mon esprit consentirent enfin à ce que nous avait demandé notre implacable karma : nous nous exilâmes donc dans les forêts, aux sommets des montagnes. Au long du chemin nous ne cessâmes d'être poussé en avant par la grâce du Seigneur à la peau sombre comme les ténèbres.
27
Seigneur, comme ton visage rayonnait de bonheur lorsque tu apparus sous les traits du nain Vamana et qu'en quelques enjambées tu fis le tour du monde ! D'où te venait donc ce sourire ? De savoir la Terre sous tes pieds, ou d'avoir le ciel comme couronne ?
28
Le Seigneur ne peut être visualisé par nos yeux extérieurs, mais si nos yeux intérieurs sont ouverts, et s’ils sont prêts à accepter de voir les choses telles qu'elles sont, même à travers nos yeux extérieurs nous verrons la céleste noirceur qui annonce la présence du Seigneur. S'il ne s'est pas encore présenté à nous, c'est que notre regard intérieur n'est pas tourné vers lui.
29
Comprendre la nature du Seigneur n'est pas possible pour tout le monde. Car Vishnou a de l'amour pour ses disciples, mais dans l'exacte mesure où ses disciples ont de l'amour pour lui. En ce qui me concerne, pour moi qui suis animé d'un ardent amour, il est toujours disponible et proche de moi, et il s'incarne même à mes yeux dans ce monde de matérialité.
30
Contrairement à la vie que je menais jadis, lorsque je suivais un mauvais karma, à présent il n'y a plus nulle part dans ma vie où puisse s'installer le vice. Mon esprit étroit déborde des gracieuses qualités du Seigneur qui s'y déverse dedans. Mes pêchés, incapables de cohabiter avec tant de joie, durent même me quitter.
31
Nous savons à présent que le Seigneur est le moyen de nous libérer de nos mauvaises actions. Ainsi, nous sommes devenus l'ombre et l'empreinte de celui qui jadis, en tant que Krishna, parmi nous dansa follement, une cruche sur la tête, pour ensuite retourner se reposer sur l'océan de lait.
32
Enfant, Krishna, bien que turbulent, n'avait de cesse d'être serviable. Mon esprit est lui bien différent : quand on lui enseigne l'obéissance, il n'accepte d'apprendre que ce qui ajoute au bénéfice de son plaisir et de nouveau, implacablement, il m'entraîne vers les domaines les plus bas de l'existence.
Que peut-on encore espérer de nous en ce monde ?
33
Comme rien ne nous appartient, que tout est à lui, alors peu importe ce que l'on peut bien lui donner en offrande et rien ne sert de s'approcher de celui qui éradiquera nos adversaires comme il décapite de son disque les démons qui ne lui témoignent aucune gratitude.
Pourquoi est-ce si compliqué de comprendre ne serait-ce que la plus petite partie de son corps ? Pourquoi est-ce si difficile de ressentir de l'amour pour soi-même ?
34
Seigneur, resplendissant comme l'obscurité des abîmes océaniques, cause originelle de toute chose, il est dans ta nature de nous délivrer des pêchers de notre éternel passé.
À ta recherche, à l'écoute de ce que l'on dit de ta gloire, lorsque tu es allongé sur l'océan de lait, nous tressaillons, nos jambes nous abandonnent, notre cœur se fend et nos yeux se couvrent de larmes.
35
Bien qu'il réside en plusieurs sanctuaires, bien qu'il soit en même temps debout, assis et allongé, tout en se déplaçant autour de toute chose, le Seigneur pense encore qu'il n'a rien fait.
Jamais il ne quitte mon cœur, celui qui s'incarna jadis en Narasimha, l'homme-lion qui d'une gifle de ses gracieuses mains, défonça la gueule et éventra le démon Hiraṇyakashipu, prouvant ainsi qu'il était plein d'amour pour ses disciples.
36
Est-ce possible d'accéder au Seigneur ? Est-ce difficile ? Est-ce facile ? Les deux à la fois ? Est-il d'une transcendance que seuls quelques initiés peuvent connaître ? Si vous vous mettez ainsi à douter, comprenez qu'il donne toujours ses faveurs à ceux qui le suivent et que si vous devenez des disciples de Krishna, il deviendra lui-même et à bien des égards, votre protecteur et gourou.
37
Esprit sincère, il n'est pas rare de posséder quelque intelligence et par chance, il semble que nous en possédions assez. Nous devons donc rester concentrés dans nos prières et avec détermination adorer avec amour celui qui porte autour du cou un collier de tulsi [basilic sacré] et une guirlande de fleurs dans laquelle viennent butiner les abeilles.
38
Esprit ! Tout bien pensé, être calme et cessez de parler du Seigneur, ne serait-ce que le temps d'un battement de cils, ce n'est pas bien, et nous ne devons pas cesser de contempler notre merveilleux Seigneur, porteur du collier de basilic, même si c'est pour rire de la manière dont sa marâtre Yashoda le punissait.
39
Sans plus attendre, au lieu de l'appeler et d'espérer le rejoindre à Vaikuntha, ô mon esprit, je t'en prie décide toi, dis-moi si tu acceptes comme un devoir d'ordonner à ma bouche de chanter les louanges du Seigneur, dont la fraîcheur dépasse celle de la fleur de basilic ?
40
Mon esprit, rejoins-moi, il n'y a de meilleurs instants que ceux que l'on vit dans le présent. Tu t'éloignes toujours plus loin de moi et j'ai peur de me perdre dans le désert infernal de la séparation.
Louons le Seigneur qui, en buvant le poison comme s'il fut du lait, fut le vainqueur de la démone qui se présenta à lui comme sa mère. Lui seul nous rendra puissant.
41
Cette Terre vivra longtemps, car il est celui qui combat les lutteurs Chanura et Mushtika, qui avaient osé se mesurer à lui car se pensant plus puissant, et qui reçurent de Krishna et son frère Balarama une divine tornade qui s'abattit sur eux et les fit rouler dans l’abîme.
42
Le seigneur avala l'univers, puis le régurgita. Il remplit cette Terre des eaux du déluge et la mesura d'un pas. Les sages déclarent qu'il a créé les mondes à la fin de la Grande Dissolution, devenant lui-même chacun de ces mondes. Si ce n'est lui, qui d'autre pourrait être le refuge de l'univers ? Les mondes ne sont dépendants de personne d'autre que de lui-même.
43
Existe-t-il un meilleur remède à leur détresse, à ceux qui, sans douter de lui, ne portent pas le Seigneur au plus haut dans leur cœur en l'honorant régulièrement ? N'est-il pas celui qui sèche les larmes des dieux qui viennent pleurer à ses pieds, considérant qu'il s'agit là d'un refuge ?
44
Les êtres, bien qu’ils soient dotés d'un esprit pour utiliser la connaissance et d'une bouche pour chanter, ne montrent pas grand intérêt pour le Seigneur. Capables de mille efforts dans leur vie, ils vivent pourtant sans rechercher sa bénédiction. N'est-ce pas là, la conséquence des mauvaises actions de leurs vies passées ?
45
Effrayé des terribles conséquences qui résulteraient de ma séparation d'avec le Seigneur, je me suis livré avec obstination à la seule tâche de méditer sur lui, ne m'autorisant aucune pause, aussi courte soit-elle. En esprit, en mots et en corps, à travers les intendants que sont Garuda, l'oiseau de la connaissance, Hanouman, le courageux et juste dieu singe et Visvaksena, le gardien du Vaikuntha et le commandant en chef des légions de Vishnou, j'ai vénéré les pieds resplendissant du Seigneur.
46
Le Seigneur, qui a la couleur de l'océan et dont les yeux sont éternellement rougeoyants de béatitude, est notre protecteur contre les affres de la descente du Samsara. Mon esprit, rappelle-toi ces paroles, je les sais vrais et je te les répéterai quotidiennement.
47
Seigneur, ne sois pas fâché que des gens ne te prient que selon leurs petits désirs. Ils n'ont pas la sagesse de te considérer comme seul refuge et comme seul raison. En ce monde une telle sagesse n'est pas commune. Pour ceux qui ont obtenu ta grâce, la conduite de tels gens ne leur importe pas le moins du monde.
48
En contemplant Krishna d'un seul geste tuer les sept buffles afin de sauver la belle Radha aux bras doux et tendres comme des tiges de bambou, nous avons compris qu'il existe un domaine éternel au-dessus des cieux mêmes, vers où mène le chemin que nous devons emprunter.
49
À la vue des nuages s’amoncelant autour de sombres montagnes, du vaste océan au-dessous, de la profonde obscurité au-dessus, et d'un arbre que ne semblait pas vouloir quitter les abeilles, voyant en chaque chose une incarnation du sombre Krishna, mon esprit s’est enfui encore plus loin de moi.
50
Même après avoir eu pitié de moi et m'avoir accordé sa grâce, le Seigneur ne se montre pas sympathique avec moi, qui le suis fiévreusement à la trace, ne pensant jamais à rien d'autre qu'à lui ! Comme il est de pierre le cœur du Seigneur qui fracassa la gueule de Keshi le centaure.
51
Ce qu'un authentique disciple, à l'esprit assez large pour raisonner, souhaite pour lui-même, c'est de remporter la bataille contre ses organes sensoriels, lesquels si souvent faussent la raison. Ainsi, ses rancœurs et ses colères disparaîtront et dominés, ses cinq sens pourront être redirigés vers l'adoration de celui qui porte une guirlande de basilic en collier.
52
Jadis, il s'incarna en un nain solitaire et demanda au démon qui possédait la Terre trois pas de terrain sur son royaume, pour y mener une vie d'ascète. En tant que Krishna, s'il prétendit prendre la mamelle de la démone pour boire son lait empoisonné, c'était pour mieux lui extorquer la vie d'une simple succion. Ainsi, nos yeux ne désirent remarquer que les formes les plus étonnantes du divin et rien d'autre.
Ma langue sera-t-elle animée un jour par autre chose que la gloire du Seigneur ?
53
Seigneur aux jolis yeux rouges, comme tu es juste avec tes disciples ! Comme tu n'as de cesse de vouloir offrir tant et tant à ceux qui ne désirent plus rien ! C'est pour eux que tu as créé Vaikuntha, le domaine céleste éternel au-dessus même des sept mondes.
Est-ce alors vrai que la joie ressentie par celui qui réside à Vaikuntha est encore supérieure à celle que ressentent ceux qui ont pu être témoin de ta véritable nature ?
54
Nous nous inclinons devant celui qui fut le vainqueur de Vatsasura, le démon qui prit la forme d'un veau nouveau-né, et de Kapitasura, le démon caché dans un pommier.
Quel mystère que nous ne puissions pas percevoir les terribles vices qui nous entourent ! Sont-ils au ciel ? Sous la mer ? Sont-ils portés par le vent ou par les flammes ? Se cachent-ils au cœur des forêts ?
55
Tandis qu'il nous est difficile de nous rapprocher de celui qui demeure au milieu de l'océan de lait, au-dessus de vagues fracassantes, allongé sur Sesha, le serpent aux écailles en pierres précieuses, il nous est toujours possible de l'imaginer et de la visualiser à notre guise.
Alors, suite à l'apparition du Seigneur, l'anxiété, la mélancolie et la folie disparaissent.
56
Le Seigneur semble avoir pris possession de mon esprit sans même que ma volonté ne s'en mêle. Cependant ma vie est belle et je me réjouis chaque jour.
Afin de distribuer sa grâce à tous les êtres vivants, Krishna cacha ses véritables natures, formes et attributs, et c'est sans avoir besoin de se réclamer de sa divinité qu'il accomplit sa mission. Ainsi, le Seigneur resta ignoré des démons. Durant les temps immémoriaux, il se déplaçait même entre les mondes, accomplissant partout des miracles que personne ne saurait expliquer.
57
Mon esprit, le Seigneur ne supprimera-t-il pas nos désirs et notre ignorance et bien d'autres choses encore que nous avons héritées de nos précédents karmas et depuis l'aube des temps ?
Le seigneur a défait le démon Hiranyaksha, il a fracassé sa tête de sorte que son sang en coulant jusqu'au sol en large torrent. Ainsi, son ego et sa vie furent mis à l'écart des richesses matérielles qu'il avait amassées durant sa vie.
58
Seigneur resplendissant, je me suis perdu, immergé dans l'extase de toi. Je t'en supplie, fait que jamais cela ne s'arrête. À partir de maintenant, la santé que j'ai reçue en cadeau de toi, je ne l'utiliserai pas pour rechercher la Moksha, grâce à laquelle je pourrais te rejoindre pour t'adorer, mais elle me servira seulement à essayer de ne pas oublier ce moment d'extase vécu à tes pieds.
59
Les vagues de l'océan primordial viennent mourir aux pieds du Seigneur, allongé et méditant. Au moment même où nous prononçons ses glorieuses appellations, les vices qui nous collaient à la peau s'enfuient se cacher au sommet des montagnes et au plus profond des forêts. Pourquoi ont-ils tant tardé à nous quitter ? Reviendront-ils ?
60
Mon esprit, tu peux toujours chercher, il n'existe pas d'autre sauveur des affres de la vie mondaine et matérialiste. Sans jamais regarder ailleurs que vers lui, nous suivons le merveilleux seigneur, celui-là même qui porte les herbes de tulsi en collier. Suivre un autre chemin nous mènerait en enfer.
61
Les étoiles qui scintillent dans le vaste ciel sont semblables à des fleurs au pollen évanescent que les dieux, un par un, selon l'importance du rite védique qui leur est attribué, auraient jeté aux pieds du maître de l'univers, alors qu'en tant que Vamana, il mesurait la terre, le ciel et les enfers en seulement trois pas.
62
Le Seigneur, venu sur Terre sous la forme du nain Vamana se transforma pour prendre la forme du géant Trivikrama, qui grandit si haut qu'il mesura d'un seul regard l'univers, dont il devint le pilier central, semblable au mât d'un immense parapluie d'étoiles dont les planètes, Vénus et la Lune seraient à chacune des extrémités des armatures. Voici en vérité celui qui est le remède à notre mal, qui est d'être en vie, et prisonnier éternel du Samsara.
63
Au temps lointain du glorieux et vaillant roi Rama, en lequel s'était incarné le Seigneur, avec son disque rougeoyant, l'arme dont il ne se sépare jamais, il trancha le nez et les oreilles de la démone Shurpanakha, puis il retourna en sa demeure, sur le dos du serpent Shesha, au milieu de l'océan de lait dont les vagues furieuses ont la couleur des nuages chargés d'eau qui, soufflés par le vent des plaines, s'en vont au large crever d'éclair.
64
Si les sages réalisaient, au plus profond de leur cœur, que depuis la nuit des temps, Rama l'archer qui transperça les sept arbres et Krishna, le guerrier vainqueur de Baka, l'oiseau démoniaque, sont en vérité la même entité transcendantale, ne prieraient-ils pas tous le Seigneur matin, midi et soir ?
65
Mon esprit ! Il inhalera les effets provoqués par notre mauvaise conduite lors de nos vies passées, et qui nous causent à présent tant de détresse. Il faut donc toujours l'adorer et le couvrir de guirlandes de mots d'amour, celui qui est majestueux et invincible comme une montagne et qui est connu sous le nom de Vishnou, Narayana et Krishna.
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Mon esprit comprend le Seigneur dont l'arme est un disque. Comprends celui qui a glorieusement défait le démon Ravana, qui avait fait irruption dans sa vie pour la dévaster. Qu'il soit dit que je t'ai appris ceci : il est celui qui porte de fraîches guirlandes de tulsi tressées en collier, il est celui que glorifient les Védas.
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D'un côté, il est évident que jouir éternellement d'une vie de plaisir au plus proche du Seigneur, dans son domaine éternel et supérieur, serait une situation enviable et que si tu le souhaites assez fort, alors tu pourras certainement y accéder… Mais d'un autre côté, si tu préfères demeurer dans notre monde et jouir de ses plaisirs matériels, ce sera toujours possible !
Ô mon cher esprit, apprend d'abord à chanter les louanges à Krishna !
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Le temple, le tourbillonnant océan de lait, la demeure éternelle de Vaikuntha, tous ces lieux étaient devenus trop étroits ou trop communs au sombre Seigneur à la puissance sans pareil pour qu'il décide d'entrer en moi et de faire de mon cœur une résidence qu'il ne quittera pas.
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Si elles pouvaient s'incarner à nous, nos mauvaises actions nous apparaîtraient sous les traits d'un visage déformé par la douleur, les yeux rougis par un immense et interminable chagrin.
À présent que mon esprit s'est élargi au point de pouvoir contenir le vaste océan composé des vertus de Vishnou, qui pourrait bien me déstabiliser et m'infliger de quelconques souffrances ?
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Je l'ai accepté dans mon cœur comme ma mère et comme mon père, celui qui calmera ma détresse, le Seigneur, couronné de lumière et connu sous mille noms et mille formes différentes, armé d'un disque flamboyant comme si toutes les lumières de l'univers s'étaient jointes en ses bords.
Ce qu'il se passera dorénavant n'aura plus aucune espèce d'importance.
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Vishnou, tu es la cause sans cause, et c'est toi qui resteras seul à la fin des temps. Shiva, dont la chevelure emmêlée reçoit la chute du Gange, trouvera refuge dans la partie droite de ton corps. Quant à Brahma aux quatre visages, ne trouve-t-il pas son origine en ton nombril ?
Ainsi, comment pourrais-je donc ne serait-ce que commencer à décrire ta grandeur ?
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Certains prétendent que La Trinité de Brahma, Vishnou et Shiva, est la cause première du cosmos. Cependant, d'autres prétendent qu'il n'y a qu'une seule entité à la base de toute chose, y compris de la Trimurti elle-même. Ô Seigneur, la cause primordiale, celle qui naquit d'un amoncellement de sombres nuages, le resplendissant lotus, n'a-t-il pas germé depuis ton corps cosmique ?
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Dès que fleurissent les fleurs de Puvai, de Kayam et le nénuphar bleu, alors que s'ouvrent les frêles bourgeons des fleurs de Senkazhunir, mon esprit comme mon corps, exaltés, considèrent alors ce qui m'entoure comme une immense manifestation des différentes incarnations du Seigneur.
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Bien que je l’aie invoqué chaque jour sans faillir, Krishna, qui lorsqu'il était vacher, protégea son bétail en déplaçant Govardhana, la colline qui domine Vrindavan, ne daigne toujours pas m'offrir ses grâces.
- Ô mon esprit, là où nous sommes, semble un endroit trop éloigné pour être irrigué par la fontaine de grâce qui émane de lui…
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Seigneur, dont le disque est capable de baigner dans son sang n'importe quel adversaire, ce monde ainsi que le domaine éternel de Vaikuntha sont soumis à ta volonté.
Tel que tu es vraiment, par mes oreilles tu es entré en moi pour depuis ne plus me quitter. Qui pourrait dire, de nous deux, qui est le plus glorieux ? Je t'ai en moi à présent, penses-y donc !
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Ô Seigneur, quand je pense à toi qui as parcouru tous les mondes, mon esprit s'emplit de joie et, libéré de ses pêchés, il s'en va lui aussi rejoindre les autres mondes. Comment cela se fait-il ? Je t'en prie dis-le-moi.
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Narayana, toi qui es allongé sur un serpent nageant sur l'océan tempétueux, qui est ma famille et qui sont mes amis, sinon toi ? À part toi, je ne fréquente personne. Aucun engagement ni aucune responsabilité ne me lient d'aucune sorte à rien ni personne. Je n'ai pas autour de moi ce que l'on appelle des « proches », je n'ai pas non plus d'ami qui me veuille du bien et cela est très bien comme ça.
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Mon brave esprit ! Même si les amis, la vie sociale, le cycle des renaissances et les liens qui unissent les familles peuvent procurer un certain plaisir, il ne faut pas t'y attacher. Fais plutôt l'expérience de la communion permanente avec le domaine de Rama. Il te faut considérer Rama, et ses flèches toujours prêtes à être tirées pour défendre ses disciples, comme la meilleure des nourritures spirituelles, celle qui procure le bonheur éternel.
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Chaque habitant de cette planète, quelle que soit la caste dont il est issu, même s'il voue sa vie à la pire des vocations, s'il prie Krishna et devient son disciple obéissant, peut voir sa vie briller d'un éclat encore plus intense que celui du Vaikuntha. Mais auront-ils un jour peur de l'incessante accumulation d'actes néfastes dans leur karma ? Considéreront-ils le voyage vers Vaikuntha digne d’intérêt ?
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Ne plus renaître, vaincre le vieillissement, la maladie et la mort, et même atteindre l'extase infinie, celle-là même qui m'aura entièrement dissous dans l'univers, qui est le corps de Vishnou ; tout cela ne serait rien qu'un enfer si je vivais dans l'ignorance du Seigneur et s'il n'était pas à mes côtés.
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Le Seigneur, en sommeil méditatif, allongé sur le serpent qui lui sert de lit, a dû oublier que je ne suis qu'un être impropre et impuissant, quand par deux fois il me força à plonger avec lui en son domaine divin.
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Au cours des millénaires passés, je n'ai acquis aucune connaissance sérieuse et mes actions furent marquées par le mauvais karma. Toute cette éternité, je l'ai passée dans l'ignorance, négligeant de rendre un culte à Rama, le possesseur de l'anneau, le chasseur du démon caché dans la biche.
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Mon esprit, j'ai peur que tu te permettes des choses qui devraient t'être interdites ! Voici la seule conduite à tenir : prie donc le Seigneur qui, sous les traits de Krishna, prit la vie des deux démons qui l'avaient défié au concours de lutte. Ô mon esprit, je te dis cela pour ton propre bien : si tu ignores mes conseils tu cours à ta perte, mais si tu les écoutes ils te sauveront.
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Mon esprit, tu ne te prosternes pas à ses pieds, tu ne lui offres pas des guirlandes de fleurs, tu n'inclines pas ta tête devant lui et tu ne bats pas des mains quand on te le demande ! Tu ne le glorifies pas assez ! Demande-lui donc où il est allé, ce qu'il a fait, intéresse-toi à lui !
Oh ! Comme il est lourd le fardeau des effets du Karma !
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Comment font les lourds nuages tempétueux qui traversent le vaste ciel pour avoir exactement la même teinte que celle du Seigneur, endormi sur l'océan primordial aux vagues agitées ? Combien de privation et d'effort sont-ils nécessaires pour en arriver à une telle couleur ?
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Les habitants de cette planète sont empêtrés dans la détresse qui résulte de leurs mauvaises actions. Que pourraient-ils donc faire de mieux que de méditer sur les mantras et les mots sacrés, et glorifier le Seigneur sous toutes ses formes :
Sa couleur est celle des nuages annonçant la pluie, son bras est armé d'un disque, son ventre est assez spacieux pour accueillir le monde à l'heure de sa dissolution, il est allongé sur un serpent à mille têtes plus grandes même que l'univers.
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Brave esprit, essaie de ne jamais cesser de chanter la gloire de celui qui, gracieux comme le lotus, un disque toujours à la main, sépare de nos vies les effets de nos actes injustes. À présent, ainsi que pour l'éternité des temps à venir, chante la gloire et les nombreux noms du seigneur !