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Arya-Dharma, l'héritage des spiritualités premières

Les NAINS

Les nains

Avant de clore ce passage en revue des différents types d'hommes des bois, il convient de mentionner les nains, surtout présents dans la culture celto-germanique1. Ce sont les fameux lutins (et autre leprechauns).

Dans Quelques origines du royaume des fées, avec la grande érudition qu'on lui connaît, le maître de l'horreur H. P. Lovecraft résume une théorie étonnante mais qui ne manque pas d’intérêt. Avant d'entreprendre cette lecture, rappelons cependant que ceux que Lovecraft nomme Aryens sont en réalité les Indo-Européens d'Europe du nord, c'est-à-dire les Celtes et les Germains. Cet abus de langage était fréquent au 19e et au début du 20e siècle.

« À l'examen des faits, les anthropologues ont acquis depuis de nombreuses années la certitude que les caractéristiques que l'on a toujours prêtées aux elfes proviennent de la mémoire collective plutôt que de l'imagination mythologique. C'est-à-dire que l'elfe, le troll, le gnome, le kobold, le leprechaun, le brownie, le lutin ou le farfadet de la tradition ne sont pas à proprement parler des démons nocturnes de la tradition aryenne mais une synthèse de ce personnage et d'une authentique race d'hommes nains ou pygmées que les Aryens chassèrent à une époque ou à une autre et qu'ils obligèrent à se réfugier dans des retraites souterraines et qui, par la suite, ne cessèrent de mener des représailles furtives et vindicatives contre leurs conquérants.

Réduits au troglodytisme, décimés et pourchassés à vue, les nains vaincus devinrent des créatures nocturnes et sournoises organisant des sorties furtives pour attaquer les voyageurs solitaires, voler des nouveau- nés pour des sacrifices sans nom, piller des fermes isolées, dresser des embuscades et donner libre cours de quelqu'autre manière à leur haine envers leurs conquérants aryens. [...]

Le souvenir de ces ennemis hargneux, frustes et minuscules, ne pouvait que demeurer extrêmement vif chez les conquérants de l'Europe, et il n'est pas étonnant que ces créatures qui, pour les grands Aryens blonds, n'avaient rien d'humain, se soient mêlés dans leur esprit à l'ancienne tradition héréditaire des démons nocturnes qui datait d'avant la venue de nos ancêtres dans la région. Si les Aryens n'avaient pas rencontré cette race sombre et courtaude, il est probable que leurs légendes de démons nocturnes auraient conservé une forme plus ou moins ambiguë et instable.

C'est indubitablement à ce petit peuple conquis que nous devons l'existence des elfes, des lutins, des trolls, des gnomes et des farfadets, tels que se les représentaient nos aïeux.

Il reste à présent à s'interroger sur la véritable identité de ces nains que vainquirent nos aïeux, le lieu où ils vivaient, et l'endroit où ils les rencontrèrent. [...]

De l'opinion des spécialistes anciens et modernes de la mythologie, le petit peuple des elfes ne représente en fait que la souche mongoloïde courtaude de l'Europe du Nord, c'est-à-dire les Lapons et les Finnois que les Aryens trouvèrent lors de leur entrée dans cette région. La taille, la couleur, les œuvres et les manières de ces souches raciales dans leurs formes les plus pures rendent cette hypothèse des plus plausibles; et il est fort probable qu'elles recouvraient une plus grande partie de l'Europe que ce n'est le cas à présent. Un autre argument en faveur de cette hypothèse est le fait que la plupart des légendes de petits êtres souterrains semblent venir du Nord, de chez ces Teutons qui, plus que tout autre peuple, se heurtèrent de façon directe aux souches mongoles durant la bataille pour le continent.

Une théorie plus moderne et plus audacieuse identifie nos ennemis nains des temps préhistoriques avec les néanderthaliens qui se répandirent en Europe environ trente mille ans av. J.-C. et qui furent exterminés par les vagues successives d'êtres humains véritables qui balayèrent la région après cette date. Cette théorie, bien que prodigieusement intéressante, recueille beaucoup moins de crédit que celle précédemment mentionnée.

Une troisième théorie, partant de l'existence de légendes de nains maléfiques provenant de régions éloignées de la zone de peuplement finno-lapone (par exemple le « petit peuple» des îles Britanniques et le Kalli Kanzari de la Grèce moderne, lointain cousin des esprits de la nature tels que les faunes et les satyres) pose en principe qu'une race naine jusqu'ici inconnue (de type mongoloïde ou autre) a occupé de grandes étendues de l'Europe à une époque très reculée quoique non paléolithique. Cette théorie actuelle- ment très populaire se trouve renforcée par l'existence dans le sud de l'Autriche de certaines galeries préhistoriques souterraines qui semblent avoir été faites par des hommes plus petits que la normale. Dans le même temps, il convient de relativiser la chose puisqu'il suffirait que les zones de peuplement finno-lapones (ou celles des Huns orientaux) aient été à l'origine plus importantes qu'elles ne le sont actuellement pour expliquer facilement la présence d'architecture et d'objets fabriqués par des nains loin de leur habitat historique. Les anthropologues plus conservateurs pensent au contraire (en dépit des légendes encore courantes sur les Pictes minuscules et les elfes d'Écosse, les petites fées et les lutins troglodytes d'Irlande, le sinistre « petit peuple » souterrain du Pays de Galles et la « joyeuse bande » de Robin Goodfellow en Angleterre) qu'aucune race naine n'a jamais habité les îles britanniques. Ces contes nous viendraient en fait d'une époque où nos ancêtres vivaient encore sur le continent européen. » Trad. Ph. Gindre pour l'édition Laffont Bouquins.

Dans Barzaz Breiz, Th. H. de La Villemarqué les décrit en ces termes : « Les nains sont sorciers, devins, prophètes, magiciens. » Ces créatures fantastiques sont les négatifs des fées. « Loin d’être blancs et aériens, ils sont généralement noirs, velus, hideux et trapus ; leurs mains sont armées de griffes de chat, et leurs pieds, de cornes de bouc ; ils ont la face ridée, les cheveux crépus... »

Quant aux farfadets et autres korrigans, A. Mélandri (Les Farfadets) en fait un autre portrait :

Ils n’étaient faits ni de chair, ni d’os, ni de muscles. Pourtant chacun d’eux était aussi redoutable à lui seul qu’une armée de Bretons. N’avaient-ils pas levé les pierres fabuleuses de Karnak, dressé les dolmens, creusé les cavernes ? Pour s’ébattre, s’ils l’eussent voulu, ils auraient, disait-on, transporté la plus grosse tour de Rennes au fin fond de la mer. Et si menus, pourtant ! Ils pouvaient se poser sur un épi de seigle, sans en courber la tige ! Ni pâtre ni métayer ne les redoutait, quant à la nuit tombante on les apercevait rassemblés en conclave sur les marches des vieux calvaires. Chacun savait que l’influence de ces bons génies était, pour les villages, bénigne et bienfaisante.

Jérôme Pimpurniaux dans le Guide du voyageur en Ardenne, mentionne un témoignage local qui propose la description d'un « nuton », la version belge du nain :

 Il n’était pas plus haut qu’une botte de gendarme ; sa tête, couverte de cheveux aussi roides que les poils d’une brosse, était plus grosse que celle de notre bourrique : il avait un nez rouge et épaté, et quand il riait, sa bouche, fendue, jusqu’aux oreilles, montrait deux rangées de dents blanches et longues comme des noisettes franches, ce qui prouve l’habitude de manger de la chair humaine. 

Tout comme le Daikokuten, version japonaise bedonnante de Shiva, les nains « portent toujours sur eux une large bourse en cuir qu’on dit pleine d’or, mais où ceux qui la leur dérobent ne trouvent que des crins sales, des poils et une paire de ciseaux » (Barzaz Breiz).

Leur ronde nocturne évoque celle des sorcières. Tout comme le leshi, il représente un danger pour le voyageur isolé et sans défense : « Malheur au voyageur attardé qui passe ! il est entraîné dans le cercle et doit danser parfois jusqu’à ce que mort s’ensuive » (Ibid).

Tout comme les satyres, les nains effraient les jeunes femmes, mais leur étreinte ne semble pas criminelle : « Les jeunes filles en ont grand ’peur, et goûtent peu, quoiqu’elles soient sans danger, leurs privautés lutines » (Ibid).

Comme dans la légende germanique des Nibelungen, et comme dans le mythe slave de Kovlad, les nains celtes vivent au cœur des forêts, à l'intérieur de grottes (ou de mines), où sont cachés leurs ateliers.

Il n’est guère de grotte dont on ne raconte qu’elle a été jadis habitée par de petits hommes, hauts tout au plus de deux pieds, parlant une langue inconnue et d’un caractère tantôt serviable, tantôt farceur. Ces nains s’appellent sotê (province de Liège), massotê (prov. de Liège et de Luxembourg), luton (prov. de Luxembourg), nuton (province de Namur), lapon ou napon (environs d’Ath), sarazin (Hesbaye). 

E. Monseur, Le Folklore wallon.

On retrouve dans les coutumes et superstitions liées aux nains des traces de pratiques sacrificielles païennes :

On raconte partout que jadis on allait porter à l’entrée de leurs grottes des objets à raccommoder (il s’agit ordinairement de souliers dans les légendes de la province de Liège, d’outils en fer dans celles de la province de Namur), en ayant soin de déposer avec ces objets de la farine, ou un petit gâteau, ou des fruits (dans quelques villages, on dit même : une pièce de monnaie). Le lendemain, on retrouvait les objets remis en bon état.

Ibid

Les NAINS

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