23 Décembre 2021
Dans sa correspondance (Lettres à l’Ashram), le Mahatma Gandhi, que les Indiens surnomment Babaji (« petit père »), se fait le défenseur absolu de la vache. Nous reproduisons ici une lettre écrite vers 1940, traduite de l'anglais par Dino Castelbou (Wikisource) :
Au sein de l’Hindouisme, il y a un fait essentiel, qui est la protection de la vache. Pour moi, la protection de la vache est un des plus merveilleux phénomènes qui est apparu durant l’évolution humaine. Cela rend l’être humain au-delà des autres espèces. La vache symbolise, ainsi, l’intégralité du monde non-humain. L’homme, à travers cet animal, est invité à réaliser son identité profonde, similaire avec tout ce qui vit. Pourquoi la vache a-t-elle été choisie comme étant l’archétype de la compassion ? Cela est flagrant à mon avis : la vache était le meilleur compagnon que l’humanité puisse espérer en Inde. Elle était mère d’abondance. Non seulement en offrant son lait, mais aussi en rendant l’agriculture possible.
La protection de la vache est le présent de l’Hindouisme au monde. Et l’Hindouisme vivra aussi longtemps qu’il y aura des Hindous pour protéger la vache. Les Hindous ne seront point jugés pour leur tilak sur le front, ni sur la justesse qu’ils pourront atteindre en chantant leurs mantras, ni sur leurs pèlerinages, et ni, non plus, sur leurs plus méticuleuses observances du système des castes, mais bien sûr leurs réelles aptitudes à protéger la vache.
Je ne peux tuer un être humain pour protéger une vache, tout autant que je ne peux tuer une vache pour sauver une vie humaine. Être est tellement précieux. Ma religion m’apprend que je dois insuffler, par ma conduite personnelle, dans l’esprit de ceux qui ont un avis différent du mien, la conviction qu’abattre une vache est un péché, afin que, sincèrement persuadés, ils abandonnent cette pratique. La moindre ambition que je possède est de voir ce principe de protection de la vache honoré partout à travers le monde. Mais cela exige que je réussisse à l’établir parfaitement, en premier lieu, et à tout prix, dans mon propre pays natal.
La protection de la vache n’est pas seulement l’aide que l’on se doit d’apporter à la vache. Cela signifie aussi la protection envers toutes les vies, sans défense, et faibles, en ce monde.
La vache est un poème de miséricorde. On lit sa compassion en contemplant ce doux animal. Elle est la mère de millions d’Indiens, hommes et femmes, et enfants. La protection de la vache représente la protection de l’entière Création, muette, de Dieu. En Inde, les ancestrales prédications commençaient sur la vache. L’appel des êtres les plus faibles de la Création, est le plus difficile à comprendre, parce que dépourvu de voix articulée. La vache est la référence, incarnée, de la forme la plus pure des vies non humaines. Elle supplie, au nom de toutes les espèces non humaines, la Justice entre les mains de l’homme, l’être dominant parmi toutes les vies. Elle semble nous dire, grâce à l’expression de ses yeux : « tu n’es pas autorisé, pas plus que nous ne le pouvons, à nous tuer, et à manger notre viande, ou encore, à nous abuser en nous maltraitant, car tu te dois d’être notre ami et notre gardien. » Je leur rends donc un culte, et je défendrai leurs vénérations, contre le monde entier, s’il le faut.
Mère Vache est, par de nombreux aspects, bien meilleure que la mère qui nous a donné naissance. Notre mère nous donne son lait pour un, ou deux ans, puis, ensuite, elle attend de nous que nous la servions à notre tour, l’âge venu. Mère vache, quant à elle, n’attend rien de nous, si ce n’est suffisamment d’herbes et de graines pour simplement vivre. Tandis que notre mère tombe souvent malade, et attend de notre part une aide nécessaire, mère vache conserve généralement, si on ne la malmène pas, toujours sa santé.
Le lecteur observera que, derrière les réalités développées précédemment, se cache en fait une chose primordiale, qui est l'ahimsa (non-violence), aussi connue comme étant la compassion universelle, ou la non-nuisance envers toutes les créatures, qui s’obtient par l’amour total, en s’abstenant de violence par la pensée, la parole, et le corps, et à chaque fois, soit personnellement, soit en le commandant à d’autres, ou en consentant à son exécution par d’autres –, sans oublier les œuvres entreprenantes d’absolue générosité. Lorsque ce suprême idéal sera réalisé, tout deviendra aisé, et sera simple. Car, là où il y a ahimsa, il y a infinie patience, sérénité intérieure, discernement, sacrifice de soi et connaissance véritable. »
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