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Arya-Dharma, l'héritage des spiritualités premières

Jack et le haricot magique

Traduction de Loys Brueyre, dans Lang, Contes populaires de la Grande-Bretagne.

 

Sous le règne d'Arthur, dans le comté de Cornouailles, près de la pointe extrême de l'Angleterre, vivait un riche fermier. Son fils unique se nommait Jack ; il avait l'esprit vif et prompt, de sorte que ce qu'il ne pouvait accomplir par la force, il le faisait par ruse et intelligence. Jamais on n'ouït dire que quelqu'un l'eût vaincu, tandis que très-souvent il déjoua les ruses de plus instruits par ses inventions subtiles et promptes.    

En ce temps-là, le mont de Cornouailles était gardé par un géant énorme et monstrueux de dix huit pieds de haut, d'environ trois yards de tour, d'un aspect féroce et hideux, la terreur de tous les villages voisins. Ce monstre habitait une caverne an milieu de la montagne, et il était si égoïste qu'il ne souffrait pas que personne demeurât près de lui. Quand il avait faim, il faisait main basse sur tout ce qu'il rencontrait. Les habitants, à son approche, fuyaient leurs demeures pendant qu'il s'emparait de leur bétail, n'emportant pas moins d'une demi-douzaine de bœufs à la fois sur son dos ; quant aux moutons et aux cochons, il les ficelait tout bonnement autour de sa taille. Ceci dura maintes années, de telle sorte qu'une grande partie du comté était ruinée par ses déprédations.    

Un jour que Jack se trouvait à la maison de ville, il apprit que les autorités étaient assemblées et  que la discussion roulait sur le moyen de se défaire du géant. Il eut la fantaisie de demander quelle récompense on donnerait à celui qui tuerait, le monstre.

On lui répondit que le trésor du géant appartiendrait à celui qui le prendrait. Alors Jack tenta l'aventure.    

Il se munit d'une trompe, d'une pelle, d'une pioche et se rendit sur la montagne. Il se mit à l'oeuvre au commencement d'une solide soirée d'hiver, et, avant le matin, il avait creusé une fosse de 22 pieds de profondeur et d'une largeur presque égale; il la recouvrit de longs bâtons et de paille. Puis, répandant un peu de terre dessus, il lui donna l'apparence d'un terrain uni. Ceci fait, Jack se plaça au bord de la fosse, du côté le plus éloigné de la demeure du géant, et, au point du jour, il souffla de toute sa force dans la trompe. Bien que Jack ne fût qu'un petit homme et que sa voix ne fût guère puissante, il trouva cependant le moyen de faire assez de bruit pour éveiller le géant et le mettre en colère.    

Le monstre se précipita hors de son antre en criant: Incorrigible vilain, tu viens donc troubler mon repos ? Tu me le paieras cher, car je te ferai griller pour mon déjeuner !» Mais en proférant, ces menaces, il tomba dans la fosse et sa chute ébranla les fondements de la montagne.

« Eh, géant, s'écria Jack, que ne parles-tu maintenant? Te voilà prisonnier; veux-tu encore me faire griller pour ton déjeuner ? n'avais-tu donc autre chose à te mettre sous la dent que le pauvre Jack ? Jack tourmenta ainsi le géant comme le chat fait la souris, et quand il en eut assez, il le frappa à la tête avec une pioche et l'étendit mort sur le terrain.

— Jack alla ensuite à la caverne, qu'il trouva pleine de trésors. — Les magistrats, tout joyeux, n'ajoutèrent pas de leur poche aux richesses de Jack, mais se contentèrent de lui donner le titre de « Jack le tueur de géants » et lui offrirent une épée et un ceinturon sur lequel était brodé en lettres d'or : Voilà le très-vaillant homme de Cornouailles. 

Comme on le pense bien, la nouvelle de la victoire de Jack se répandit par toute l'Angleterre. Un autre géant, nommé Thunderbore, fit alors le serment de venger sa race sur le petit héros.    Or il arriva que, quatre mois après son dernier exploit, Jack se promenant dans les environs du château du géant, se trouva fatigué et s'endormît au bord d'une fontaine ombragée de chèvrefeuille. Par malheur, Thunderbore vint chercher de l'eau à la fontaine ; il aperçut l'objet de sa haine et le reconnut aux mots brodés sur son ceinturon. Aussitôt il le chargea sur ses épaules et l'emporta à travers le fourré. Le bruissement des branches éveilla Jack, qui fut désagréablement surpris de se trouver dans les griffes du géant. Sa terreur redoubla quand il vit la cour du château jonchée d'ossements humains et quand Thunderbore lui dit que bientôt les siens viendraient en augmenter le nombre. Sur cette assurance, le cannibale enferma le pauvre Jack dans un grenier et il partit chercher un autre géant qui vivait dans le même bois, afin de le rendre témoin de la chute de leur ennemi.    

Dès que Thunderbore se fut éloigné, une voix se fit entendre, qui ne cessait de crier « Faites ce que vous pourrez pour vous sauver, sinon, vous deviendrez la proie du géant; il est allé chercher son frère pour vous torturer et vous tuer. »    

En entendant ces terribles paroles, Jack se sentit saisi d'épouvante et, allant à une fenêtre, il aperçut au loin les deux géants qui s'avançaient. « Allons, se dit Jack, en lui-même, c'est ma mort ou ma délivrance qui approche. »  

Heureusement les géants de cette époque, malgré leur force prodigieuse, étaient si stupides qu'on en venait aisément à bout par stratagème, fût-il des plus grossiers. Or, il y avait de forts cordages dans la chambre où se trouvait Jack ; il en prit deux auxquels il fit un noeud coulant, et dès que les géants arrivèrent à la porte de fer du château, il les leur jeta adroitement sur la tête; puis passant les cordes dans une poulie et tirant de toute sa force il étrangla ses ennemis. Il se laissa ensuite glisser le long de la corde, et une fois près d'eux, il eut bientôt fait de les dépêcher avec son épée.    

Après cet exploit, Jack mit en liberté les prisonniers, leur  donna les clefs du château et, en véritable chevalier errant, il continua son voyage sans s'occuper de ce qu'il y avait dans sa bourse.

Un jour que Jack s'était égaré, il arriva près d'une grande maison au fond d'une vallée solitaire ; il frappa à la porte. Quelle fut sa frayeur, quand se présenta pour lui ouvrir, un géant monstrueux à deux têtes ! Cependant il lui parut moins féroce que les autres, car c'était un géant gallois.    

Jack raconta au géant qu'il avait perdu son chemin et lui demanda l'hospitalité. On le mena dans une chambre où pendant la nuit il entendit son hôte proférer ces formidables paroles : « Toi qui loges sous mon toit cette nuit, tu ne verras pas la lumière du matin ; ma massue t'écrasera la tête ! — Ah ! tu crois cela! dit Jack ; voilà un de tes tours gallois ! nous verrons qui de nous deux sera plus habile. »

Puis il sauta hors du lit et, tâtant au hasard dans l'obscurité, il trouva un fort billot de bois. « Voilà mon affaire! » s'écria-t-il, et, fourrant la bûche dans le lit à sa place, il alla se cacher dans un coin obscur de la chambre.    

Bientôt après entra le géant qui, brandissant sa massue en asséna un coup sur la bûche, convaincu qu'il allait briser tous les os de Jack. Aussi le lendemain on juge de la surprise du géant quand il vit notre héros, qui descendait l'escalier comme si de rien n'était et qui poussa même la courtoisie jusqu'à le remercier de son hospitalité. « Comment as-tu dormi ? dit le géant, n'as-tu rien senti cette nuit ? »    

Jack lui répliqua : « Rien qu'un rat qui m'a donné deux ou trois tapes avec sa queue ! »    

Le géant dissimula sa surprise et retint Jack à déjeuner. Devant chacun d'eux fut placé un bol contenant quatre gallons de pudding. Notre héros n'eut pas l'air de s'étonner d'une si extravagante portion, mais il attacha un grand sac de cuir sous ses vêtements, de manière à y jeter le pudding sans être aperçu. Le déjeuner fini, Jack piqua la curiosité du géant en offrant de le rendre témoin d'un tour extraordinaire, et, prenant un couteau, il fendit le sac de cuir et tout le pudding tomba par terre. Le géant ne se douta pas de la supercherie, et, craignant d'être battu, il s'écria en véritable Welche : — Et moi aussi, je puis en faire autant. On devine la suite : le monstre saisit le couteau et, croyant imiter Jack impunément, il se tua sur le coup.

Le fils unique du roi Arthur avait demandé à son père une grande somme d'argent afin d'aller chercher fortune dans la principauté de Galles, où demeurait une belle dame possédée de sept méchants esprits. Le roi essaya vainement de le détourner de cette entreprise. Après quelques jours de voyage le prince arriva à une ville où il vit une grande foule entourant un convoi funèbre. S'en étant approché, on lui dit que le défunt ayant laissé de grosses dettes, ses créanciers s'opposaient à ce qu'on l'enterrât.    

Le prince répondit que c'était pitié que des créanciers fussent si cruels et leur dit : « Qu'on enterre ce mort, je paierai ce qu'il doit. » Il vint un tel nombre de créanciers qu'avant la nuit, le prince eut vidé sa bourse. Jack, arrivant sur ces entrefaites, fut si touché de la générosité du prince qu'il lui offrit de devenir son serviteur, offre qui fut aussitôt acceptée. Le lendemain tous deux partaient pour leur voyage.

Lorsqu'en quittant la ville, une vieille femme courut après le prince en disant : « II me devait deux pence depuis sept ans, je vous en prie, payez-moi comme les autres. » Le prince paya la dette avec son dernier penny. Jack n'ayant lui-même qu'une bourse fort légère, l'argent manqua bientôt. La nuit venue, le prince eût bien voulu trouver un logement, mais le moyen d'en trouver un sans argent !

Jack lui dit alors : « Maître, rassurez-vous. Mon oncle demeure à deux milles d'ici ; c'est un grand et monstrueux géant à trois têtes, capable de lutter seul contre cinq cents hommes armés et de les vaincre. — Hélas ! dit le prince, il ne fera de nous qu'une bouchée ; à peine  pourrons-nous remplir sa dent creuse. — Ne craignez rien ; dit Jack, j'irai en avant, attendez-moi jusqu'à mon retour. »

Puis il chevaucha à toute bride et alla frapper à la porte du château. A ce bruit, le géant furieux cria : « Qui est là? »    

Jack répondit :    

- C'est moi, c'est votre pauvre cousin Jack.    

- Quelles nouvelles apportes-tu, cousin ?    

Jack reprit :    

- Cher oncle, de mauvaises nouvelles.    

- Comment des nouvelles peuvent elles être mauvaises pour moi ? dit le géant. Ne sais-tu pas que j'ai trois tètes, et que je puis battre cinq cents hommes armés et les faire fuir comme menue paille devant le vent ?    

- Sans doute, dit Jack, mais malheureusement le prince s'approche avec mille hommes couverts d'armures afin de vous tuer et de saccager votre château.    

- Ah ! cousin Jack, dit le géant, voilà en effet de tristes nouvelles ! Je cours me  cacher ; toi tu vas m'enfermer dans la cave et tu en garderas les clefs jusqu'à ce que le prince soit parti.    

Jack accepta volontiers et, allant chercher son maître, ils firent la fête et prirent tous les trésors du géant, tandis que celui-ci tremblait dans la cave.    

Le lendemain, notre, héros envoya le prince à trois milles en avant afin qu'il fût hors de l'odorat du géant ; puis il délivra son oncle de la cave, et lorsque celui-ci lui demanda ce qu'il voulait pour sa peine, Jack lui dit : « Donnez-moi votre chapeau et votre vieux manteau; donnez-moi aussi la vieille épée  rouillée et les pantoufles qui sont à la tête de votre lit. »

Le géant lui répondit : « Je te donne volontiers tous ces objets ; garde-les en souvenir de moi comme choses d'excellent usage ; l'habit te rendra invisible, le chapeau te donnera le savoir, l'épée coupera tout ce que tu frapperas, et les souliers sont doués d'une vitesse merveilleuse. »

Jack fut enchanté de ces présents et, rejoignant son maître, ils arrivèrent promptement à la maison de la dame. Quand elle sut que le prince était un prétendant à sa main, elle prépara un splendide banquet en son honneur. Après le repas, elle essuya sa bouche avec un mouchoir, puis le cachant dans sa robe elle dit au prince : « Je vous ferai couper la tête si vous ne me montrez ce mouchoir demain matin. » Le prince se retira désolé ; mais heureusement le chapeau de science apprit à Jack ce qu'il fallait faire.    

Au milieu de la nuit, la dame ordonna à son démon familier de la porter à l'esprit du mal. Jack revêtit son manteau d'invisibilité, ses souliers de vitesse et arriva avant elle dans les régions infernales. C'est là qu'elle remit son mouchoir à un démon ; mais celui-ci l'ayant posé sur une planche, Jack s'en empara aussitôt. 

Le lendemain, le prince montra le mouchoir à la dame et sa vie fut sauvée ce jour-là. Quand vint l'heure du souper, la belle dame dit au prince : « Cette nuit je déposerai un baiser sur les lèvres de quelqu'un, et si demain vous ne me montrez pas celui que j'aurai embrassé, je vous ferai couper la tête. »

Le prince répondit galamment : « J'accepte la gageure, à condition que ce soient mes lèvres que vous embrassiez. — Ce ne sont ni les vôtres ni celles de quelqu'un que vous connaissez, dit-elle, et si vous ne faites ce que je demande, vous n'échapperez pas à la mort. »

A minuit, elle s'enfonça sous la terre et querella le démon pour avoir laissé prendre le mouchoir. « Or, dit-elle, je serai impitoyable pour le prince, car c'est toi que j'embrasserai et ce sont tes lèvres qu'il devra me montrer. » Jack, qui était, à côté de la dame, trancha aussitôt la tête du démon et l'apporta à son maître sous son manteau invisible, et celui-ci la produisit triomphalement le lendemain à sa belle. L'enchantement fut ainsi détruit; les mauvais esprits qui obsédaient la dame l'abandonnèrent, et elle  parut, plus douce et plus charmante, tout en restant aussi belle. Le prince l'épousa et l'emmena à la cour du roi Arthur, où Jack, pour ses éminents services, fut fait chevalier de la Table Ronde.

Jack demanda ensuite au roi la permission de purger le pays de Galles des géants qui l'infestaient. Il partit donc et arriva le troisième jour à un grand bois, où il fut assailli par des cris perçants. En approchant avec précaution de l'endroit d'où partaient les cris, il fut frappé d'horreur en apercevant un terrible géant qui traînait par les cheveux une belle dame et le chevalier son mari, aussi aisément que si c'eût été deux paires de gants. Jack, ému de pitié, revêtit son manteau d'invisibilité et, prenant son infaillible épée, il réussit après beaucoup de peine à dépêcher le monstre en lui coupant la cuisse.

Les cris de mort du géant étaient si terribles qu'ils faisaient retentir tout le bois d'alentour. — Le chevalier et la belle dame, après avoir témoigné leur reconnaissance à Jack, lui firent connaître que le géant laissait un frère plus farouche que lui. Mais, n'écoutant que son courage, Jack sauta à cheval pour aller tuer le second géant, et il promit de rendre visite au chevalier quand il aurait débarrassé le pays de cette engeance.    A un mille et demi de là, il aperçut à l'entrée d'une caverne le géant assis sur un bloc de bois ; à son côté était posée une massue noueuse en fer; il avait des yeux louches et brillants comme flamme, des joues pendantes comme flèches de lard; les poils de sa barbe ressemblaient à des fils de fer et les boucles de cheveux qui pendaient sur ses robustes 22 épaules avaient  l'air de serpents enroulés et de vipères sifflantes. — Jack revêtit son manteau d'invisibilité, s'approcha du géant et lui dit tout bas : « Ah ! vous voilà! je m'en vais vous tirer la barbe ! »

Puis il le frappa de son épée à la tête, mais manquant son coup, il lui coupa seulement le nez. Le géant  poussa des rugissements semblables aux éclats du tonnerre et courut de tous les côtés en manœuvrant sa massue de fer avec tant de furie que Jack lui-même en fut effrayé. Alors, Jack, sautant sur le bloc de bois, frappa le géant par derrière et lui trancha la tête. Ensuite il pénétra dans la caverne, et, en cherchant l'endroit où le monstre cachait ses trésors, il découvrit une chambre remplie de captifs humains : c'était le garde-manger du géant ; lorsque les prisonniers étaient bien gras, il s'en faisait servir pour son dîner. Jack leur rendit la liberté et leur distribua tout l'argent dont il s'empara.    

Pour lui, après une bonne nuit, il monta à cheval au lever du soleil et alla rendre visite au chevalier. Son hôte, pour le recevoir dignement, prépara une fête à laquelle il convia toute la noblesse du voisinage, et qui dura plusieurs jours. Le chevalier lui  offrit devant tout le monde un bel anneau, sur lequel était gravée, avec une devise rappelant l'exploit de Jack, la scène du géant traînant par les cheveux le malheureux chevalier et la belle dame.

Mais au milieu des fêtes arriva un page annonçant qu'un géant à deux têtes nommé Thunderdell accourait du nord pour venger ses parents ; il n'était plus déjà qu'à un mille du château, et tout le monde fuyait devant lui.    

Jack s'écria : « J'ai un outil pour lui arracher les dents; » et il invita  la société à assister au combat du haut de la terrasse du château. Or, vous saurez que le château du chevalier était entouré d'un fossé de trente pieds de profondeur et de vingt pieds de large avec un pont-levis. Jack fit scier ce pont des deux côtés 23 presque entièrement, puis, jetant sur ses épaules le manteau d’invisibilité, il marcha à la rencontre du géant avec son épée tranchante.    

Le géant cria d'une voix terrible: 

- Fi! Fi ! fo! Foum ! Je sens le sang d’un Anglais ; qu'il soit mort ou vivant, j'écraserai ses os pour en faire du pain.    

- Que dis-tu là, dit Jack, mauvais meunier ?    

Le géant répondit : « C’est donc toi qui as tué mes parents? Je te déchirerai avec mes dents et réduirai tes os en poudre. — Attrape-moi d'abord », dit Jack.

Alors, enlevant le manteau pour que le géant pût le voir et chaussant ses merveilleux souliers, il se fit donner la chasse en laissant approcher le géant d'assez près pour lui faire croire que sa capture était facile. Thunderdell suivait Jack avec la légèreté d'un château qui courrait, de sorte que la terre tremblait à chaque pas jusque dans ses fondements. Jack, pour amuser ses hôtes, fit courir Thunderdell quelque temps, puis voulant en finir, il franchit le pont-levis qui était à moitié coupé.

Le géant le poursuivit avec sa massue ; mais son grand poids fit écrouler le pont, et, une fois Thunderdell dans le fossé, Jack passa une corde à ses deux têtes et le fit traîner par des chevaux. Ensuite, il lui coupa ses têtes, et les envoya comme hommage au roi Arthur.

Jack fut bientôt fatigué du repos et alla au-devant de son dernier triomphe. Il arriva à une grande montagne, au pied de laquelle s'élevait une maison solitaire. La porte lui fut ouverte par un vieillard dont la tête était blanche comme neige, et qui le reçut très-courtoisement. Pendant le souper, le vieillard lui dit : « Mon fils, je sais que vous êtes un tueur de géants ; or donc, vous saurez que sur cette montagne s'élève un château enchanté, demeure du géant Galligantus, qui, par l'aide d'un magicien, retient prisonniers un grand nombre de chevaliers qu'il a transformés en bêtes de toutes sortes.

Parmi ces prisonniers se trouve une princesse que le magicien a enlevée de chez son père dans un chariot aérien 24 traîné par des dragons de feu. Il l'a enfermée ici, sous la forme d'une biche. Aucun chevalier n'a pu jusqu'ici la délivrer, à cause de deux terribles griffons qui gardent l'entrée du manoir; pour vous, mon fils, grâce à votre manteau, vous passerez près d'eux sans être vu, et vous apercevrez gravée sur les portes du château une inscription en grands caractères, qui vous apprendra comment l'enchantement peut être rompu.    

Le lendemain Jack revêtit son manteau et parvint au sommet de la montagne. Il passa invisible auprès des deux griffons, et quand il fut à la porte du château il aperçut une trompette sur laquelle étaient écrits ces mots : « Celui qui soufflera dans cette trompette vaincra bientôt le géant et rompra aussitôt l'enchantement. »    

Jack aussitôt souffla dans la trompe de manière à faire retentir les échos des collines. Le château trembla dans sa base, le géant et le magicien furent frappés de crainte. Jack eut bientôt tué le premier; quant au magicien, il s'éleva dans l'air comme un tourbillon et on ne le revit plus.    L'enchantement étant brisé, tous les seigneurs et dames reprirent leur forme naturelle.    

Jack le Tueur de géants revint alors à la cour du roi Arthur, où il fut uni à la princesse, non-seulement à la joie des seigneurs, mais de tout le royaume.

Jack et le haricot magique
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