27 Novembre 2023
Après mille ans de domination musulmane, puis deux cents autres de colonisation britannique, l'Inde est aujourd'hui indépendante. Elle est cependant une exception culturelle dans un monde globalisé. Menacée à ses frontières par la Chine productiviste et communiste, menacée intérieurement par l'islamisme et menacée culturellement par le consumérisme occidental, l'Inde se sent en danger.
En Inde, comme au Pakistan ou au Bangladesh, des tensions animent effectivement les communautés hindoues, indigènes et musulmanes. Il convient donc d'en rappeler les circonstances : le millénaire de colonisation musulmane étant le plus souvent à l'origine de ces conflits.
Au siècle, comme au millénaire dernier, l'Inde fut colonisée et non colonisatrice. Ce sont les Arabo-musulmans, les Perses et les Turcs qui ont ravagé le pays et mis fin à son âge d'or. Puis ce furent les Britanniques de la Compagnie des Indes qui pillèrent ses richesses.
En Inde, le Kali Yuga, le mythique âge védique de la destruction, fut sans aucun doute incarné par les invasions musulmanes, dont les exactions durèrent plus de 800 ans et firent du génocide des hindous le plus grand massacre de tous les temps (devançant sur ce triste sujet celui des Amérindiens).
Cette sinistre histoire, trop souvent ignorée en Occident, nécessitait d'être résumée en quelques dates et événements essentiels.
Le prophète Mohamed
Si le prophète Mohamed (aussi orthographié Mahomet) est la figure centrale de l'islam, on sait très peu de choses sur lui. Ce n'est que plusieurs siècles après sa mort qu'une première biographie de Mahomet fut composée, mais celle-ci était emprunt de fantastique, ce qui rajoutait à la légende plutôt qu'à la véracité historique.
Au début de l'islam, le prophète est considéré comme un moyen de parvenir à la doctrine ultime de Dieu, réunie dans le Coran. Ce n'est que plus tard que sa personne devint aussi importante que son message. D'abord présenté comme un homme simple, capable de fauter, le personnage de Mahomet se complexifia, se mystifia, avant de devenir un être quasi céleste. Celui-ci peut alors fauter, ou sembler inflexible et cruel, mais il n'en demeure pas moins implacable de sagesse.
Ce que l'on sait avec certitude de Mahomet se résume en quelques lignes. Né en 570 et mort en 632, le prophète des Arabes aurait donc vécu 62 ans et aurait exercé, avec son frère, la profession de caravanier, c'est-à-dire de garde du corps et d'agent de sécurité au service des commerçants qui traversaient alors le désert d'Arabie à dos de dromadaires et de chameaux.
Sa première femme, Khadija, de quinze ans plus âgée que lui, avait déjà été mariée mais ses précédents maris étaient décédés. Faisant partie d'une riche famille de notables nestoriens (une communauté chrétienne en Orient), Khadija apportera à Mahomet une aisance financière qui lui permettra toute sa vie de se livrer sans faillir à l'activité de prophète et d'homme politique.
Ce que l'on croit savoir de Mahomet ne repose bien souvent que sur des sources douteuses. Par exemple, certaines traditions musulmanes refusent de reconnaître la différence d'âge conséquente entre Khadija et Mahomet. Par ailleurs, la doctrine chiite ne lui reconnaît aucun mari antérieur à Mahomet, alors que la doctrine sunnite en reconnaît plusieurs. Il en est de même pour l'âge exact de Aïcha, la dernière épouse légitime du prophète, qui aurait eu entre six et neuf ans à l'âge de son mariage, et guère plus lors de la consommation de ce mariage, tandis que d'autres traditions la présentent au contraire comme une adolescente pubère.
Khadija Meurt en 619, alors que Mahomet a 49 ans et prêche depuis une dizaine d'années la parole sainte. Elle lui laisse un empire financier conséquent et une respectabilité sociale non négligeable. Après 25 ans de vie commune monogame, comme il est coutume dans le monde arabe de l'époque, Mahomet prend un nombre important d'autres femmes, d'origines ethniques et religieuses différentes, dont certaines sont des jeunes filles encore vierges, tandis que d'autres sont des vieilles femmes déjà veuves, qui se marient au prophète afin d'échapper à la misère ou pour que leur union bénéficie aux enjeux d'alliances. Le nombre total de femmes du prophète varie entre dix et treize, dont : Khadija, Sauda, Aïcha, Hafsa, Zaynab, Umm Salma Hend, Zaynab, Juwayriya, Oum Habiba, Safia, Maimouna. En outre, Mahomet avait également deux esclaves, Maria et Rayhana, avec qui il entretenait des relations conjugales. Ibn Khatir (1301-1373) ajoute quant à lui 25 esclaves femmes. Si toutes ne furent pas les concubines du prophète, toutes furent par lui affranchies.
À partir de 610 jusqu'à sa mort, l'archange Gabriel, le messager divin, dicte à Mahomet le Coran, c'est-à-dire le livre saint ultime qui référence les paroles de Dieu lui-même, dans un arabe poétique et raffiné, bien que taillé dans une langue qui manie avec obsession la menace et l'anathème. Impressionner, faire peur, et séduire, voilà en somme l'objectif du Coran, qui est censé offrir à l'espèce humaine le code ultime de bonne conduite qu'elle se devra de respecter pour ne pas provoquer la colère divine. Fortement ancré dans la culture bédouine, tout autant qu'influencé par les mystiques juives et chrétiennes, Mahomet propose alors une doctrine universelle, basée sur la sauvegarde des intérêts patriarcaux, de l'ordre établi, en même temps que sur la crainte d'un châtiment éternel et implacable pour qui ne croirait pas, ou ne respecterait pas ces quelques lois essentielles et intraitables.
De même que Jésus, Moïse ou Abraham, Mahomet possède à son crédit de nombreux miracles, comme de s’être déplacé une nuit, de La Mecque à Jérusalem, en volant dans les airs grâce à un divin cheval, offert par l'ange Gabriel à Mahomet (et semblable à Uchchaihshravas le cheval blanc aux multiples têtes d'Indra, le dieu védique du tonnerre, ou encore à Pégase, le cheval ailé de la mythologie gréco-romaine).
Le prosélytisme de Mahomet gêne dans une contrée ou règne un polythéisme tolérant et où fourmillent une multitude de divinités qui cohabitent en harmonie (si les peuples du désert se font la guerre, ce n'est pas au nom de leurs dieux respectifs). La volonté mahométane d'éradiquer toute forme de culte qui ne soit pas uniquement dédié à Allah, le dieu du ciel, brusque les autorités locales qui, effrayées de l'importance économique et démographique des sectateurs de Mahomet, décident de pousser ses partisans à l’exil.
En 622, trois ans après la mort de sa femme et dix ans après avoir reçu les premiers messages de l'ange Gabriel, Mahomet et sa communauté (qui n'était alors qu'une secte), quittent La Mecque, capitale de l'Arabie, pour s'en aller vivre à Médine, dans une oasis alors peu peuplée. Durant cet épisode qui est appelé l'hégire (l’exil), Mahomet ordonne à ses disciples de couvrir leurs femmes, afin que celles-ci ne cèdent pas aux étrangers, et que les étrangers ne leur demandent pas la main (ceci afin que la congrégation reste soudée, unie et imperméable aux influences extérieures). Certains de représenter une foi nouvelle qui surpassera toutes les autres par son implacable justice, les partisans de Mahomet vivent alors huit ans en exil, grossissant leurs rangs en attendant le jour propice pour revenir à La Mecque et régner enfin sur la ville, puis sur l’ensemble de la péninsule arabique.
La conquête de La Mecque eut finalement lieu en 630, à la suite d'une bataille opposant Mahomet et 10 000 des siens aux défenseurs de la ville. Régnant deux années seulement sur un empire commercial pour une fois unifié derrière une seule autorité et une seule culture religieuse, Mahomet meurt bientôt, laissant derrière lui un très vaste héritage mystique, littéraire et politique. À sa suite, l'Arabie connaît un essor sans précédent grâce à la pacification de la région. Au lieu d'un désert livré aux pirates et aux brigands, l'islam a fédéré les clans locaux au nom du djihad, et c'est en dehors de l’Arabie, vers la Perse, l’Inde ou la Palestine, que s'exerceront alors les pressions militaires arabes, et en particulier les célèbres et funestes razzias.
L'expansion musulmane
Trois ans après la mort du prophète, Damas (Syrie), la ville la plus prospère du Moyen-Orient, tombe aux mains des Arabes. À nouveau se jouait dans l'Histoire le même épisode : les nomades passaient sur les cités et les nations pour les détruire ou les transformer à jamais, comme les Germains marchèrent sur Rome, comme les Huns sur l'Europe, comme les Conquistadors sur l'Amérique, et comme les Turco-Mongols vers l'Occident.
Cinquante ans après la mort du prophète, l'entière péninsule arabe est soumise au dieu Allah, qui de chef des dieux du panthéon berbère, devient dieu unique et nouvelle incarnation du Yahvé des juifs ou du Seigneur des chrétiens. Ceux qui héritèrent du pouvoir de Mahomet furent ses héritiers directs, qui furent alors les premiers califes musulmans. Leur rôle était d'incarner le pouvoir théologique, mais bientôt, enivrés de luxe et de confort, ces califes ne furent plus que les représentants sur Terre d'un pouvoir politique soumis aux enjeux de pouvoir.
Quelques décennies seulement après la mort de Mahomet, l’essentiel de la route commerciale terrestre entre l’Europe et l'Asie est sous domination musulmane et adopte la loi coranique. En quelques siècles à peine, des rives de l’Atlantique à celles du Pacifique, du détroit de Gibraltar à celui de Malacca, d'innombrables peuples tombent sous le joug de l'islam.
De 711 à 1200, les razzias musulmanes sur l'Inde du Nord, puis du Sud, seront la cause de millions de morts et d'une dépréciation totale de la démographie et des cultures indiennes, qu'elles soient jaïnes, bouddhistes ou hindoues.
Sous pression militaire permanente, victimes de l’intolérance fanatique des califes et de la nouvelle aristocratie arabe, puis turque et enfin persane, les hindous vont subir quelque 800 ans de domination religieuse et raciale, comprenant un nombre incalculable de massacres, de viols et de pogroms gigantesques. La quasi-totalité des temples hindous de la vallée du Gange seront détruits et avec leurs pierres, l'envahisseur construira des casernes et des mosquées.
Ceux qui n'avaient pas été massacrés ou qui n'avaient pas encore été convertis de force, se virent proposer des réductions de taxe et des facilités de commerce en échange de leur soumission. Tous les moyens furent employés afin que de Constantinople à Singapour, les peuples soient soumis à Allah et donc aux chefs de guerres arabes.
Si les habitants les plus pauvres du sous-continent se convertirent de bon cœur, dans l’espoir de se libérer du système des castes, l'immense majorité des Indiens demeurèrent sourds aux sirènes de l'islam. Les hindous, trop attachés à la richesse de leurs traditions spirituelles, ne firent pas l'erreur des Celtes qui abandonnèrent leurs cultes ancestraux pour adopter ceux de Rome. Au contraire, c'est avec mépris et condescendance que les hindous ont toujours considéré les monothéismes abrahamiques (religions qu'ils considèrent comme jeunes, schismatiques, intolérantes et relativement pauvres spirituellement).
Quant à la population autochtone du sous-continent qui s'était convertie à la foi des envahisseurs arabes, turcs ou perses, elle resta profondément divisée entre les plus riches, qui avaient été mis au sommet des État par les califes et les plus pauvres, qui demeuraient en rade, convertis par intérêt à une religion étrangère, et condamné à demeurer à jamais étrangers dans leur propre patrie.
La traite orientale
Très tôt après la mort du prophète, la traite orientale commence. Si l'esclavage était aboli entre musulmans, il restait légal si l'esclave était un infidèle. Un infidèle n'avait cependant pas le droit de posséder d'esclave musulman.
On estime à près de douze millions le nombre de ses victimes, c'est-à-dire d'esclaves déportés par les Arabo-musulmans à l’intérieur du triangle constitué de l'Asie centrale, de l'Inde et de l'Afrique orientale, avec en son centre la péninsule arabique. Par comparaison, huit millions d'Africains furent victimes du commerce triangulaire occidental, aussi appelé traite négrière. La traite orientale dura plus d'un millénaire (approximativement de 650 à 1900).
Les femmes, les filles et les garçons des nations conquises qui refusaient de se convertir ou qui avaient eu l'audace de se défendre, étaient envoyés comme esclaves dans les grandes villes de la Mésopotamie. De là, ils repartaient, à pied et traité comme du bétail, vers le Moyen-Orient et le Maghreb, où ils étaient finalement achetés pour peupler les harems des guerriers qui s'étaient enrichis en pillant l'Afrique du nord et l'Espagne.
Des premières incursions et razzias vers 700 jusqu'à la pacification britannique, des millions d'Indiens et d'Indiennes furent déportés comme prostitués, esclaves et travailleurs forcés. Des côtes du Gujarat, ils embarquaient, pour rejoindre Oman, Barhain, pour être renvoyés dans les colonies arabo-musulmanes soudanaises ou nord-africaines.
Quand l'islam progressa en Perse puis en Asie centrale et en Europe, les esclaves à la peau blanche et aux cheveux blonds furent les plus appréciés. Capturées par des tribus turques alors que leurs villages étaient l'objet de razzias, les femmes slaves étaient particulièrement valorisées.
Au sud, c'était en Afrique, sur la côte est, entre le Kenya et la terre d’Oman, que les commerçants arabes achetaient aux roitelets locaux des hommes de bonne corpulence, en bonne santé, qu'ils émasculaient pour en faire des hommes à tout faire, janissaires (hommes de main), gardiens de harem ou autres jardiniers.
De Kashgar à Grenade : la route de la soie
En 656, Bagdad et la Perse tout entière tombent sous la domination islamique. Là où le modèle arabe se heurte à la culture millénaire de la Perse, c'est l'islam qui poursuit le mécanisme d’acculturation. En 661, un schisme intervient entre chiites persans (Iraniens) et partisans sunnites de la lignée des califes, c'est-à-dire des chefs de guerre qui succédèrent à Mohammed.
En 680, 42 ans seulement après la mort de Mahomet, un schisme intervient dans la communauté des croyants, créant ainsi le courant dissident du chiisme. La cause en est le massacre des 70 membres de la suite de Hussein, le petit-fils du prophète qui désirait destituer les califes corrompus et s'approprier à leur place l’exercice du califat islamique. La bataille opposa l'armée du calife Yazid Ibn Mu'awiyya, composée d'environ 30 000 hommes, aux quelques sectateurs partisans de Hussein. À la suite du massacre de Kerbala, leurs cadavres furent livrés aux chiens, et les proches d'Hussein furent réduits en esclavage, puis torturés en place publique.
En 700, soit pas même un siècle après la mort du prophète, les riches et stratégiques régions de Transoxiane et de Sogdiane (actuel Afghanistan) commencent à subir l'influence musulmane, qui ne cessera de s’étendre jusqu’aux conversions de masse vers l'an 800 et à l'instauration de l'islam comme religion d'État vers l'an 1000.
Les montagnes d'Asie centrale contrôlées, c'est tout naturellement que les conquérants pillent sans relâche les cités prospères de la route de la soie : vers l'ouest, c'est Samarcande (710), vers l'est c'est Kashgar (715), qui subissent la razzia, entraînant systématiquement massacres, déportations, conversions de masse, application de la charia et surtout : mise en place d'une aristocratie étrangère à la tête des cités, des États et des empires, dont le principal dessein était de s'enrichir par le pillage, de convertir par la force et de détruire les cultures et les traditions autochtones.
En 715, Kashgar, la porte de la Chine est donc prise. Dans le cours du siècle suivant un génocide ethnique et culturel extermine les bouddhistes de Transoxiane et les peuples indo-européens caucasoïdes assimilés aux Tokhariens du bassin du Tarim.
En 751, Khotan, cité millénaire de la route de la soie associée au passage du désert du Taklamakan, est prise. C'est-à-dire qu'elle est pillée. En, 786, c'est Kaboul qui subit elle aussi la première de ses innombrables razzias.
Malgré le chaos et les tourments des guerres incessantes, un tel rassemblement de peuples et un si vaste empire, gouverné non pas par un empereur ou un roi mais par un dieu et la parole de son prophète, permirent d'unifier et de pacifier des régions jadis hostiles à la civilisation. Le commerce s'en trouva augmenté, car facilité. La loi coranique devint la base religieuse et juridique d'une civilisation commune à des peuples aussi disparates que les Berbères, les Tamouls ou les Huis.
Combattu et dégradé sur son front nord, l'hindouisme va, dès le 9e siècle, s'étendre vers les îles de l’Indonésie. Le brahmanisme et le système des castes s'imposent à Bali comme structure sociale de référence. Vers l'an 800, l’hindouisme est présent dans les îles des Philippines (Moluques).
Mohammed ayant été un commerçant spécialisé dans la défense armée des caravanes qui traversaient le désert d'Arabie, l’islam s'est naturellement développé selon deux ressorts principaux : l'un guerrier, l'autre commercial. L'empire que le sabre avait conquis, le commerce le maintenait et la religion l'augmentait. De plus, les conversions volontaires parmi les aristocraties locales permettaient à cette religion de s'ancrer dans les nations. Aux hordes de pilleurs succédaient les prédicateurs, les imams et les dignitaires du culte, seuls à pouvoir rendre la justice selon les préceptes du Coran.
De Venise à Xi'an, sur quelque 8000 kilomètres de distance, le commerce et ses bénéfices se faisaient selon la bienveillance de l'islam et de ses partis. Par conséquent, la suprématie économique des Arabes dans le monde médiéval était sans partage. En comparaison des fastes orientaux et des harems de Bagdad, les châteaux forts et les teintures européennes devaient paraître humbles et ternes.
L'hégémonie et l'insolente réussite islamique prirent cependant fin à deux dates symboliques : en 1494, Colomb découvre l'Amérique et en 1498, le Portugais Vasco de Gama ouvre le passage au sud de l'Afrique vers l'Inde. Ces deux voyages permirent d'enfin contourner la route de la soie, mais aussi celle des épices, pour se procurer directement les produits asiatiques à leur source.
L'islam en Europe
En Europe, en 712, soit pas même un siècle après la mort du prophète Mahomet, les Arabes s'emparent de l'Andalousie et dépossèdent de leur autorité les dynasties wisigothes et catholiques. Les Maures saccagent puis détruisent les royaumes germaniques de la péninsule Ibérique. Bientôt commencent les incursions et les razzias en territoires franc et ligure. La progression islamique se heurte pourtant à une véritable résistance des Francs qui dominent alors l'Europe et dont le goût des combats violents, des tournois, des joutes et des duels, en font des adversaires de valeur.
Dans une Europe ou le polythéisme n'est plus qu'une saveur que l'on dépose sur une morale judéo-chrétienne, Charlemagne est sacré empereur et protecteur des chrétiens. C'est un roi qui dialogue avec l'ennemi maure, mais qui s'oppose à ses invasions. Ces dernières sont stoppées du côté méridional des Pyrénées.
En 732, non loin de Poitiers, le maire du palais du roi des Francs, Charles Martel (« Charles le Marteau », du nom de son arme favorite) défait une campagne de razzias menée depuis le midi et qui menaçait directement Paris et le bassin Seine-Rhône-Rhin-Danube. En 736, ceux que l'on nomme les Sarrasins, sont malgré tout à Avignon, où ils ont fondé un royaume. Ils sont installés pour commercer mais aussi pour mener des pillages en Provence et dans les Alpes.
Les îles de la Méditerranée sous contrôle arabe ou ravagées par eux, la paix n'est plus assurée dans cette mer. Les pirates arabes font peser sur les voyageurs qui l'empruntent le risque d'être capturé et réduit en esclavage. Des navires arabes pillent les embouchures des principaux foyers de population des côtes ligures, françaises et adriatiques. En 827 et 831, les Arabes débarquent et procèdent à des razzias en Sardaigne, puis en Sicile, deux royaumes insulaires normands. Ces offensives sont repoussées à chaque fois. Rome est malgré tout pillée.
Les croisades au Moyen-Orient
Dès 636, Jérusalem et la Palestine, qui appartenaient à des royaumes francs, passent aux Arabes. Des siècles de guerres territoriales et religieuses vont marquer la cohabitation des Européens et des Arabes en Palestine, pour culminer dans les croisades (1096 à 1270), que mena l'Occident afin de libérer et venger leurs alliées de Palestine et d'Asie mineure.
Des royaumes francs vivaient depuis le début du premier millénaire en terre palestinienne, en parfaite cohabitation avec les tribus berbères, juives, arabes et hellènes. Mais quand l'islam s'implanta dans la région, la charia s'appliqua. Ceux qui ne se convertirent pas, ni ne prêtèrent allégeance à Allah, à Mahomet et aux califes et vizirs qui représentent leur autorité sur Terre, furent massacrés.
En quelques années, de terre chrétienne, la Palestine devint musulmane. Les croisades furent aussi dévastatrices qu'inefficaces, principalement à cause des rivalités entre les roitelets européens, plus attirés en Terre sainte par le pillage que par la sauvegarde réelle des intérêts de la chrétienté ou la protection pérenne des royaumes francs de Palestine. Alors que les troupes de Saladin s'amassaient en vue d'imposer l'hégémonie islamique sur ce côté du bassin méditerranéen, les armées chrétiennes, désorganisées, corrompues, aux mains de la trouble organisation templière, ne réussirent jamais à véritablement disputer le pouvoir aux Arabes et c'est dans des bains de sang inutiles que se finirent la plupart des croisades. Aussi, après avoir été souvent chassé temporairement du littoral palestinien, l'islam y est finalement demeuré pour ne plus en repartir.
Cependant, la vertu des croisades est d'avoir éloigné pour quelques siècles la guerre en dehors de l’Europe, en canalisant loin des terres anglaises, picardes et gasconnes, la violence qui minait le Moyen-Âge européen. Par ailleurs, les croisades confortèrent encore le pouvoir de la papauté. Enfin, les croisades eurent pour effet de marquer un arrêt définitif à l’expansion arabe en détournant les forces arabes d’Espagne vers le Moyen-Orient, ce qui laissa quelques siècles de répit à l'Europe.
Par la suite, contenu dans ses frontières naturelles, l'Empire arabe s'effondra en quelques décennies, remplacé par celui des Turcs, nomades d'Asie centrale qui se convertirent très vite à l'islam pour infiltrer la noblesse perse et mongole. Ce sont les Turcs qui envahirent les Balkans et menacèrent Vienne en 1529. À cette date, la menace arabe ne se limitait plus qu’à de la piraterie sans grande envergure.
La Reconquête espagnole
En revanche, en Espagne, grâce à des siècles de lutte acharnée ayant mobilisé les forces de très nombreux monarques francs et goths, la croisade de la Reconquista fut un succès.
C'est au 10e siècle, que l’Europe chrétienne, mais surtout franque, célèbre ses premières victoires significatives : Barcelone est reprise en 985, de même qu'en 990 les Maures sont chassés des Alpes, dont ils terrorisaient la population en menant des razzias tout au long des vallées d'altitude, riches en étapes commerciales. Libérés de la menace islamique, les pouvoirs du roi de France et ceux du Pape s'étendent alors sans obstacle sur l’Europe continentale.
En 999, durant la Grande Peur de la fin du monde, renforcée encore par un épisode de peste et de famine, le maître de l'Al Andalou, le redoutable Almanzor pille la ville sainte de Compostelle. Cet événement provoque une telle vague d'indignation et une telle soif de revanche à travers les seigneuries européennes que la Reconquista reprend. Des comtes, des ducs, des chefs, des volontaires normands se joignent aux Goths et aux Francs, afin de résister à l'Empire des Maures (qui s'étendait du Sahara jusqu'aux Pyrénées).
Quelques siècles, le front s'est stabilisé au milieu de l'Espagne, qui devint alors une zone tampon que les puissances franques et normandes surveillaient et armaient pour qu'elle soit un bouclier contre les Maures, qui sans cela, auraient dévasté l’Europe en y pratiquant les mêmes razzias que de l'autre côté de l’Eurasie, dans les plaines du Penjab et dans la vallée du Gange et de l'Indus.
La frontière se stabilisa donc quelque temps dans les plaines de l'Aragon et du Léon, ce qui créa un pays sans droit, ni loi, qui fit le bonheur des trafiquants et fut le refuge de bandes armées de renégats et de soldats en déroute. Les déserts semi-arides qui entourent l'Aragonais, comme celui des Bardenas Reales devinrent de véritables repères à brigands, qui n'hésitaient pas à rançonner les commerçants.
À la prise de Grenade en 1492, la charia fut abolie ; les musulmans et les juifs durent soit se convertir afin de participer à la ré-hispanisation de la péninsule Ibérique, soit quitter l'Espagne au plus vite.
La fin de la Pax Indica
Après la mort du prophète Mahomet en 632, l'islam, c'est-à-dire littéralement, « la soumission à Dieu », et qu'il faut comprendre comme « la soumission au dieu unique des Arabes », s'est étendu très rapidement des côtes atlantiques à celles du Pacifique. En moins de quatre siècles, toutes les nations du monde, à part celles d'Amérique ou d’Océanie, sont sous domination musulmane (Afrique, Asie, Moyen-Orient), ou craignent de le devenir (Europe).
Les plus anciennes traces de présence de l’islam en Inde remontent à l'époque même où vivait Mahomet. Des communautés arabes, de longue date installées au Tamil Nadu et au Kerala, avaient propagé dans leur communauté sa parole et la première mosquée indienne, la mosquée Cheraman Juma, dans le Kerala, fut construite en 629, soit trois ans avant la mort du prophète.
Ces premières communautés de fidèles étaient des commerçants, des navigateurs, parfois des petits agriculteurs convertis, et ils n'avaient aucun intérêt à semer le trouble dans leur pays d’accueil. Cette cohabitation pacifique entre musulmans et populations locales explique pourquoi, alors que l'Inde du Nord était ravagée par des guerres menées par des mercenaires venus de Perse et d'Arabie, dans le sud du pays, la paix régna encore pour quelques siècles de plus.
À l'inverse de l'Europe, où les rois catholiques francs, normands et goths stoppèrent, puis chassèrent les arabo-musulmans d'Espagne, de France, de Sardaigne, de Sicile, et plus tard, des Balkans, l'Inde dut subir presque un millénaire complet d'une occupation militaire, religieuse et culturelle qui faillit lui être fatale. L'islam et ses dirigeants furent imposés aux Indiens si longtemps et d'une manière si brutale, que l'on ne saurait comprendre l'Inde si l'impasse était faite sur cette période funeste mais essentielle de son Histoire. L'irruption de l'islam dans le sous-continent fut la cause principale de la décadence irrémédiable d'une culture raffinée et d'un pays jadis prospère et en avance scientifique sur son temps.
En tentant d'imposer un dieu importé d'Arabie, un livre rédigé dans une langue étrangère, ainsi qu'un gouvernement unique à tous les peuples de l'Inde, les conquérants musulmans arabes, turcs et persans, commirent un des pires crimes qui puisse être imputé à une puissance d'occupation : empêcher à ceux que l'on tient sous le joug de l'épée, de continuer à vivre leur vie, d'aimer leurs dieux et d'honorer leurs traditions, pour la simple et cruelle raison qu'ils ne furent pas supérieurs à leurs envahisseurs dans les arts de la guerre et dans le vice du commerce (deux domaines que les hindous méprisaient mais dans lesquels leurs nouveaux maîtres excellaient).
Les razzias
La technique de combat de la razzia consiste à piller de manière rapide et préparée une zone géographique plus ou moins étendue. Suite au pillage, qu'accompagnent viols et massacres, les troupes se retirent aussi vite qu'elles sont apparues, en ne réclamant ni terre, ni suzeraineté. Après avoir dévasté des contrées sur plusieurs centaines de kilomètres et brûlé et profané tous les temples rencontrés en chemin, les armées arabes se retiraient, charrettes pleines de trésors, prisons roulantes pleines de femmes et d’enfants, de filles, d'hommes enchaînés (qu'on fouettait pour qu'ils ne s’effondrent pas de fatigue).
Dans Islamic Jihad : A legacy of forced conversion, imperialism and slavery, l'historien M. A. Khan nous renseigne en ces termes sur l’originalité des guerres musulmanes en Inde :
« Il y avait bien sûr des guerres dans l'Inde préislamique, mais elles n’aboutissaient pas à l’esclavage, ni aux ravages ou aux massacres à grande échelle, ne détruisaient pas les sites religieux, ni les récoltes, ni les paysans. Les batailles étaient habituellement menées en rase campagne et mettaient en contact des armées régulières. […] Il n’y avait pas de concept de razzia, c’est pourquoi les Indiens ne s’attendaient pas aux massacres qui les attendaient. Les Indiens étaient forcés de fuir dans la jungle ou dans les montagnes ou de faire face aux massacres, ou à la réduction en esclavage et à leur exploitation impitoyable, tandis que leur société était réduite puis détruite. Les musulmans attaquaient constamment les populations indigènes, les populations idolâtres et parfois se battaient également entre eux au cours de révoltes de généraux, de chefs ou de princes durant toute la période de l’occupation islamique. »
Du fait de cette technique de guerre déloyale, il était très difficile aux nations indiennes de résister à la puissance de destruction déployée par les armées arabes en campagne, dont les mouvements étaient décidés à l’instinct et inspirés par le fanatisme religieux. Au contraire, les armées indiennes étaient composées de mercenaires salariés. Or, les rajas qui avaient tant investi dans leur armée de fonctionnaires, n'avaient aucun intérêt à les voir mourir au combat.
En effet, les soldats indiens appartenaient à la caste des kshatriyas (« guerriers » en sanskrit) ; ils considéraient comme leur devoir de défendre leur nation, mais non d'envahir leurs voisins. De fait, face à des armées nombreuses, bien entraînées mais qui ne bataillaient qu'en ultime ressort, et seulement si tous les autres moyens diplomatiques avaient été épuisés, les forces musulmanes, ne craignant ni la mort ni le déshonneur, rompues à toutes les techniques de la piraterie, ne connurent aucun obstacle.
La première razzia sur le territoire indien date de 636, lorsqu'à la suite d'un acte de piraterie de la marine gujarati, une campagne éclaire menée par les Arabes pilla l’embouchure de la Narada, un des foyers du commerce et de l’économie indienne.
D'abord sporadiques, les razzias devinrent plus fréquentes après l'an 700, pour devenir régulières et systématiques vers l'an 1000, jusqu'à l'invasion et la domination totale de l'Inde par les musulmans vers 1200 et après.
Constatant depuis un demi-siècle que les proches vallées du Gange, de l'Indus et de la Yamuna n'étaient pas bien défendues, en 711, les premiers musulmans arabes, conduits par Muhammad Bin Qasim, arrivent dans le Sindh, sur la rive occidentale de l'Indus.
En 712, en représailles à une attaque de la piraterie indienne sur les navires de commerces arabo-perses, les troupes islamiques remontent la vallée de l'Indus en la dévastant, pour prendre et piller Multan, ville prospère et capitale du Penjab. Lors de la bataille de Multan, la suprématie au combat des Arabes est presque miraculeuse : accompagné de seulement 6000 cavaliers et fantassins, le célèbre général Qassim dévaste la région du Sindh, et démolit tant qu'il le peut tous les temples qu'il rencontre, tandis que les 50 000 soldats hindous qui leur font face ne peuvent les arrêter. Tout comme Alexandre n'avait pour cible que Darius et non son armée, les musulmans avaient concentré leurs efforts sur la personne du raja, qui perdit la vie durant la bataille… Ce qui eut comme conséquence la sédition et la débandade de ses troupes.
De 712 à 715, les campagnes de Youssouf Sakifi dévastent toute l'Inde du Nord. Qasim organisa des raids menés depuis Karachi, dont l'objectif était le pillage des villes prospères du Gujarat et du Rajasthan (cependant, pour avoir violé deux princesses hindoues destinées au harem d'un calife, Qasim fut rappelé et exécuté en étant cousu vif dans une peau d’animal).
Les États qui tombaient sous domination musulmane furent systématiquement pillés, et leurs populations massacrées. Des impôts furent prélevés auprès des nations conquises, et les membres des familles royales furent maintenus en détention tant que ces tributs n'étaient pas versés. Les Indiens des castes inférieures, comme les agriculteurs Jats, furent considérés comme des prisonniers de guerre et déportés. Les premières communautés musulmanes autochtones d'Inde du Nord, c'est-à-dire composées d'Indiens convertis, furent donc celles qui émergèrent des camps de réfugiés du Sindh. Elles étaient « composées de larges groupes d’esclaves convertis de force à l’islam et d’un petit nombre de maîtres arabes » (M. A. Khan, op. cit.) Jacques Dupuis, dans son Histoire de l'Inde, résume très bien la situation :
« Il y eut des conversions forcées, surtout au début : un certain nombre d'hindous se convertirent pour échapper à la mort. Mais, lorsque le pouvoir des sultans fut établi dans l'Inde, l'attrait des avantages sociaux devint plus efficace que la contrainte. En effet, l'égalitarisme musulman efface toute distinction officielle entre les conquérants et les hindous convertis : celui qui s'est converti devient, en principe, l'égal des vainqueurs ; il cesse de payer l’impôt spécial que paient les infidèles (le jizya) ; il peut prétendre à toutes les fonctions qu'exercent les autres musulmans ; et il est fondé en droit à partager leurs privilèges. Aussi, les musulmans deviennent-ils nombreux dans le nord de l'Inde. »
Le Sindh est donc islamisé puis annexé à l'Empire des califes, qui s'étend dès lors de Grenade à l'Indus. Plus à l'est, pour quelque temps encore la progression musulmane va être ralentie, les États de la vallée du Gange, farouchement hindous, lui opposant une véritable résistance. L'état montagneux du Cachemire demeurait lui aussi encore hindou. Il était dirigé par le raja Lalitaditya (v. 724 - 760), alors maître d'un empire qui s'étendait du Ladakh aux plateaux supérieurs de l'Indus.
L'islamisation des pays conquis
Ne craignant aucune menace à ses frontières orientales, occidentales et septentrionales, les conquérants islamiques entreprirent l'épuration ethnique et culturelle de leur vaste territoire. Commencée en 780 en Mésopotamie sous le règne du troisième calife abbasside Al-Madhi, une vaste inquisition va être menée presque trente ans durant, à l'encontre non seulement des polythéistes, mais aussi des monothéistes qui ne respectent pas l'unité de Dieu et professent à la place la dualité ou la pluralité d'un dieu unique.
L'inquisition musulmane reposait sur l'observation et la dénonciation de tous les maîtres spirituels du manichéisme, du christianisme, et du zoroastrisme, qui professaient que Dieu n'était pas « un et indivisible », mais « un divisible en trois », comme le Père, le Fils et le Saint-Esprit, ou « divisible en deux », comme le Bien et le Mal des théories dualistes inspirées de l'ancienne Perse. Les comportements suspects, les théories hétérodoxes, étaient aussitôt rapportés au calife, qui pouvait décider d'un procès, qui menait invariablement vers une mise à mort pour mécréance et diffusion d'idées fausses et idolâtres.
L'inquisition islamique se répéta durant le règne du calife suivant, Al-Hadi, tout comme sous celui de son successeur le calife Al-Rachid, qui finit tout de même par l'abolir avant de mourir en 809. Cependant, les persécutions ne s’arrêtèrent pas pour autant.
Un siècle plus tard, durant la première partie du 10e siècle et le règne du 18e calife Al-Muqtadir, les persécutions envers les manichéens sont telles que seulement 500 d'entre eux réussirent à quitter la Mésopotamie vivants et à fuir à travers l'Iran pour s'installer à Samarcande, ville de commerce cosmopolite. Cette ville prospère fut la nouvelle demeure pour quelques siècles encore de leur patriarcat, avant que les musulmans ne les en chassent de nouveau… Suite à quoi ils furent contraints de suivre la route de la soie vers l'est, pour subsister encore quelques siècles dans les steppes mongoles et s'introduire enfin en Chine, où se situe encore aujourd'hui le dernier temple manichéen encore en activité (Cao'an, Fujiang).
En l'an 1000, la Perse, l’Afghanistan, toute la Mésopotamie et l’Afrique du Nord sont composés de populations majoritairement musulmanes. Quant aux minorités religieuses et ethniques, elles sont maîtrisées, soumises et vivent dans la crainte et l'humilité.
La persécution qu'ils subissent en Perse pousse les derniers zoroastriens à émigrer en Inde, où ils s'affairent alors dans les métiers réservés aux castes nobles mais subalternes, comme le commerce, l'usure ou l'administration. Ce sont les « farsis », c'est-à-dire les Perses qui vivent en dehors de leur patrie ancestrale.
L'islam a pu s’étendre plus à l'est de l'Indus, par le média d'un commerce florissant, qui accoste les rives de l'Indonésie et propose des réductions à l'importation aux commerçants et aristocrates locaux qui se convertissent.
Très vite, attirées par les traités d'alliances et le commerce florissant des arabo-perses, les tribus turques et mongoles d'Asie centrale se convertissent rapidement, puis continuent de mener, à présent au nom du djihad, la guerre permanente qu'elles avaient de tout temps menée aux civilisations sédentaires.
En 1006, la ville la plus prospère du bassin du Tarim, Khotan, tombe sous la domination des Turcs musulmans et sa population indo-européenne est éradiquée (de sorte que l’on crut jusqu'à de récentes découvertes archéologiques que ces peuples à la peau blanche et aux cheveux roux, mentionnés par les chroniques chinoises, appartenaient au domaine de la mythologie et des aberrations légendaires…)
En 1200, durant le règne de Khorezm, les bouddhistes d’Ouzbékistan (anciennement Sogdiane et Transoxiane) sont eux aussi massacrés en très grand nombre et leurs temples rasés pour édifier à leur place des mosquées et des bases militaires. Le même sort frappe leurs coreligionnaires afghans ou penjabis. Pour l’islam, tout ce qui n’est pas musulman provient d’un temps d’ignorance, « jahiliya », et doit être détruit et rebaptisé « islamique ».
L'islamisation de l'Afghanistan
Après les premières razzias qui le frappèrent au début du 8e siècle, le territoire de l'Afghanistan actuel est en l'an 1000 presque entièrement islamisé. Et ceci, grâce à une campagne définitive menée par Subuktigin de Ghazni, qui anéantit sa population hindoue et bouddhiste. Les cols d'altitude qui servent de passage aux biens et aux esclaves entre l'Inde, l'Asie centrale et le monde perso-arabe, prirent alors le nom d'Hindu Kush, qui veut dire littéralement « le massacre des hindous ». Ibn Battuta, qui traverse la région vers 1333, signale en effet qu' « il y a au milieu de la route une montagne nommée Hindu Kush, c'est-à-dire « qui tue les Hindous », parce que beaucoup d'entre les esclaves mâles et femelles que l'on emmène de l'Inde meurent dans cette montagne, à cause de la violence du froid et de la quantité de neige. » Selon un chroniqueur musulman, à la suite du raid et de la capture d'esclaves par le sultan turc Subuktigin de Ghazni (942 – 997) : « [les esclaves] étaient si nombreux que leurs prix tombèrent très bas… » Loin de s’offusquer du nombre élevé de victimes innocentes, le même chroniqueur ajoute : « la condition des hommes était dégradée mais c’est là la bonté d’Allah de faire pleuvoir les honneurs sur sa propre religion et de dégrader les infidèles. »
En 980, le sultan Subuktigin de Ghazni envahit le Gandhara, dernière poche hindoue dans la région. Son roi, le Raja Jaya Pala, dont la demeure était dans la capitale Kaboul, est déporté et meurt en captivité. Selon Victoria Schofield, historienne des armées :
« Subuktigin avait pour objectif l'expulsion de tous les hindous de la vallée de Kaboul ainsi que du Gandhara, et pour cela il menait une guerre sainte contre les hindous qui avaient habité ces régions [depuis la fin du troisième millénaire avant J.-C.] »
Affairé à unir les provinces afghanes sous la bannière islamique, Subuktigin de Ghazni meurt durant une campagne qui l'avait mené jusqu'à la ville prospère et triplement millénaire de Bactres. Son fils aîné Ismaël lui succéda quelque temps, avant qu'il ne soit assassiné par son frère cadet, qui deviendra le redoutable Mahmoud de Ghazni. En 40 ans de carrière, ce dernier ne perdit pas une seule bataille.
De la mort de Subuktigin en 997 jusqu'en 1300, les tribus turco-afghanes originaires d'Asie septentrionale s'imposeront comme les maîtres du Penjab, de la Bactriane, mais aussi de l'Asie mineure et d'une partie de l'Europe balkanique. Ils donnèrent naissance aux dynasties ghaznévide, ouïgoure et ottomane.
L'an 1000
L'an 1000 marque l'islamisation totale de la Perse, qui devient après l’Afghanistan (anciennement Arachosie, Ariane et Bactriane), le second territoire indo-européen à se convertir. Toute l'Inde du Nord est sous la domination musulmane et seul l’extrême sud de la péninsule indienne est encore hindou et indépendant. C'est dans cette poche de résistance dravidienne que va subsister le sanskrit, qui sera la langue des philosophes et poètes Ramanuja et Shankara. Ainsi, la culture aryenne sera sauvegardée par ceux qui se feront un devoir de la conserver, alors que le foyer aryen nordique subissait quant à lui de plein fouet l'acculturation arabo-musulmane.
Le début du second millénaire est donc une période noire pour les cultures polythéistes indo-européennes : sous la pression han, mongole et turque, elles ont disparu de Chine et de Sibérie. En Afrique du Nord et en Anatolie, il ne reste plus aucune trace des royaumes normands et celtes. Les villes du Gange sont régulièrement pillées par les Arabo-Turcs (à la suite du sac de Varanasi en 1194, la ville sainte de Shiva n'est plus qu'un vaste monceau de gravats que parsèment, suivant la coutume, des amoncellements de crânes en forme de collines et de pyramides).
L'an 1000 aura été fatal au bouddhisme indien, qui quitte la vallée du Gange pour trouver refuge dans les hauts plateaux tibétains et en Chine. Contrairement aux prêtres hindous, dont les familles nombreuses assuraient, malgré les persécutions, la survivance, le clergé bouddhiste, célibataire et ascète, fut éradiqué sans difficulté.
De 950 à 1050 se construit un immense complexe de temples hindous ainsi qu'une nouvelle capitale à Kadjuraho. Pour la première fois en plusieurs millénaires, le centre névralgique de l'Inde se déplace vers le sud, pour s'installer dans les jungles qui annoncent le plateau du Deccan.
Vers 1100 et pour un siècle, l'hindouisme fuit les plaines du Gange pour rejoindre les plus hauts plateaux du Brahmapoutre et la vallée de l'Assam. L'Assam devient alors un refuge pour les rajas qui refusent de se soumettre aux musulmans. Une alliance de rois hindous dont certains viennent de Birmanie, fonde une capitale à Sivasagar (« le fort de Shiva »). En 1253, le royaume indo-birman de Sivasagar entre en guerre et réussit à stopper les Turcs, qui n'étendront pas leur influence plus à l'est vers la péninsule de Siam.
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